Pascal Negre et les airs tristes
Décidément, c’est la grande offensive pour l’industrie du divertissement. Les propos de Pascal Negre sur France-Inter et l’appel des "artistes" en faveur de la loi "Création et Internet" (HADOPI) font de plus en plus penser au soc-réalisme stalinien.

Ces "artistes" ont récemment Hadoptés la rengaine liberticide bien connue. Certains d’entre eux sont des médiocres et des mièvres casse-oreilles notoires, mais ce qui fait de la peine, c’est que les cinéastes un peu plus profonds, comme Corneau, Annaud ou autres Beneix, n’ont, après tant d’années de carrière, toujours pas compris que ce n’est pas avec de l’argent, que l’on fait du cinéma, mais avec des idées. Je comprends bien que l’argent fut le nerf du cinéma dans le temps, vu le prix du matos et des consommables. Un metteur en scène devait jadis avoir les compétences d’un expert-comptable. Aujourd’hui, avec un matériel de moins de 500€ on peut faire de la vidéo HD, dont la qualité aurait fait palir d’envie n’importe quel cinéaste il y a 10 ans à peine. Les coûteuses machines pour contrôler les mouvements de la caméra peuvent être maintenant remplacées par des robots bricolés dans son garage et le post-traitement numérique Il n’y a plus de consommable, puisque tout est numérique, ce qui permet aussi de traiter les séquences sur ordinateur et de se passer ainsi de certains décors coûteux et à usage unique - voilà un secteur, où les vrais talents peuvent émerger en nombre. Au regard du prix de revient de tous les navets coûteux que l’on produit, on se demande comment ces cinéastes arrivent encore à nous faire croire que la qualité d’un film est proportionnelle à la somme d’argent investie.
Et, si tous ces "artistes" étaient, dans l’avenir, poursuivis pour "Crime contre la culture" ? En effet, à favoriser la chansonnette à la mode, style Starac’, ou des navets "d’action", comme Luc Besson, on remplit le cerveau humain jusqu’à la saturation. Ce dernier n’est alors plus réceptif à l’expression artistique sincère qui privilégie passion et enthousiasme et se démarque de la recherche du profit. Dans cette mer de médiocrité, un vrai talent ne peut évidemment pas s’épanouir ; la recherche du profit a remplacé l’audace, l’inspiration et la passion qui caractérisent l’artiste vrai. Serait-ce une théorie du complot que de dire que l’on fait exprès de favoriser les gens sans talent pour occuper le cerveau, la véritable expression artistique étant de toute manière bien trop subversive et dangereuse pour l’ordre établi ?
L’énigmatique succès des Ch’tis, disponible sur les réseaux P2P dès sa sortie dans les salles, a prouvé que le téléchargement peut, du moins dans certains cas, favoriser la fréquentation des salles obscures. Est-ce alors encore pertinent de demander : /"Mais comment-diable les artistes feront-ils pour vivre, si tout le monde télécharge ?"/. N’oublions pas que ce sont des créateurs. Si un modèle économique adapté aux nouvelles possibilités dans la diffusion de la culture n’existe pas, il faut donc le créer. Et qui est mieux placé pour le créer que les artistes eux-mêmes ? C’est ce que l’on attend d’eux. Radiohead et bien d’autres l’ont fait.
Le succès financier de leur opération n’a apparemment pas provoqué de réflexion analytique au sein des majors...
Lors du récent débat entre Pascal Nègre et Françoise Benhamou sur Inter, un auditeur demande pourquoi il devrait payer pour la 3ème fois un morceau de Beatles qu’il avait à l’époque déjà acheté sur vinyle, puis sur CD. Pascal Negre s’énerve : "Avez-vous une voiture ? Quand vous achetez une voiture, ça a une durée de vie, non ?". Cet argument fallacieux typique met en évidence la vessie du matériel que l’on veut nous faire prendre pour la lanterne de l’immatériel. Une oeuvre culturelle s’use donc comme une voiture ? Et dire qu’il y a des gens pour gober ça ! Sans parler du mot "/gratuit/" qui revient sans cesse dans son discours. Le sens de ce mot est pour lui assez clair : on ne paie rien, certes, mais on subit la pub. Donc, on paie en temps de cerveau disponible au lieu de payer en argent. Pour ma part, je trouve que le terme "/gratuit/" prend ici une connotation négative, je préfère parler du "/libre/", mais ce mot est exclu des débats, l’amalgame entre les deux arrange tout ce beau monde.
Si les gens se mettent à réfléchir à la différence entre "gratuit" et "libre", où va-t-on ?
Nous serons sans doute dans l’avenir amenés à séparer l’économie matérielle et l’(anti)économie de l’immatériel. Les droits d’auteur et la propriété intellectuelle n’existeront plus. De mettre en chantier l’anticipation de cette révolution serait peut-être aussi une issue honorable de la crise boursière actuelle qui fait paniquer nos puissants. Mais ça ne se fera pas, car ils manquent singulièrement de clairvoyance. Combien d’entre-eux sont internautes ? Cherchez un ordinateur à l’Elysée .
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