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Rousseau en écho aux débats actuels sur le « multiculturalisme »

A lire l'avant dernier chapitre du Contrat social de Rousseau, intitulé « De la religion civile », on a l'impression qu'au siècle des Lumières, les gens discutaient de la coexistence des religions dans une même société, un peu de la même manière qu'aujourd'hui nous discutons sur la coexistence des cultures dans une même société. Sur la coexistence des religions, la position de Rousseau est très intéressante, parce qu'elle paraît être une tentative de synthèse pour mettre d'accord deux points de vue qui peuvent entrer en conflit : ceux qui veulent qu'il y ait une religion commune à tous les membres de la société, et ceux qui veulent que toutes les religions y soient tolérées.

La recherche de la synthèse qui fait consensus est sûrement la meilleure démarche possible, dès lors qu'on aborde le sujet de la coexistence des religions ou des cultures dans la société, car la manière dont a lieu cette coexistence est en relation étroite avec l'acceptation par chacun de vivre avec les autres dans la même société, c'est à dire avec le « contrat social », ou le cœur du lien social. Cette coexistence des religions ou des cultures n'est donc pas une simple loi « courante », dont on débat après avoir accepté de vivre ensemble sous de mêmes lois, c'est plutôt quelque chose dont on débat pour accepter de vivre ensemble : sur un tel sujet le compromis ne doit peut-être pas seulement réunir une majorité en sa faveur, mais peut-être carrément une quasi-unanimité (selon Rousseau le « contrat social » doit être accepté à l'unanimité, puis les lois « courantes » à la majorité).

Rousseau commence par décrire les défauts des trois sortes de religions qu'il a observées, dans leur relation avec la société. Personnellement, j'ai trouvé que les religions de la première sorte étaient un peu analogues à une certaine forme de cultures très « universalistes », et que les religions de la deuxième sorte étaient analogues à des cultures très « nationalistes ».

Rousseau propose ensuite que chaque société ait une croyance qui lui est propre, qui devrait être commune à tous ses membres, et qu'il appelle la « religion civile ». Enfin il propose qu'au sein de chaque société, toutes les autres croyances aient une certaine « tolérance » vis à vis des autres croyances.

Voilà ce texte (auquel j'ai rajouté un découpage en parties et les titres des parties).

[Les trois sortes de religions qu'on peut observer, et les défauts des religions de la troisième sorte.]

La religion, considérée par rapport à la société, qui est ou générale ou particulière, peut aussi se diviser en deux espèces : savoir, la religion de l’homme, et celle du citoyen. La première, sans temples, sans autels, sans rites, bornée au culte purement intérieur du Dieu suprême et aux devoirs éternels de la morale, est la pure et simple religion de l’Évangile, le vrai théisme, et ce qu’on peut appeler le droit divin naturel. L’autre, inscrite dans un seul pays, lui donne ses dieux, ses patrons propres et tutélaires. Elle a ses dogmes, ses rites, son culte extérieur prescrit par des lois : hors la seule nation qui la suit, tout est pour elle infidèle, étranger, barbare ; elle n’étend les devoirs et les droits de l’homme qu’aussi loin que ses autels. Telles furent toutes les religions des premiers peuples, auxquelles on peut donner le nom de droit divin civil ou positif.

Il y a une troisième sorte de religion plus bizarre, qui, donnant aux hommes deux législations, deux chefs, deux patries, les soumet à des devoirs contradictoires, et les empêche de pouvoir être à la fois dévots et citoyens. Telle est la religion des Lamas, telle est celle des Japonais, tel est le christianisme romain. On peut appeler celui-là religion du prêtre. Il en résulte une sorte de droit mixte et insociable qui n’a point de nom.

A considérer politiquement ces trois sortes de religions, elles ont toutes leurs défauts. La dernière est si évidemment mauvaise, que c’est perdre le temps de s’amuser à le démontrer. Tout ce qui rompt l’unité sociale ne vaut rien ; toutes les institutions qui mettent l’homme en contradiction avec lui-même ne valent rien.

[Les défauts des religions de la deuxième sorte (analogues à des cultures « nationalistes » ?).]

La seconde est bonne en ce qu’elle réunit le culte divin et l’amour des lois, et que, faisant de la patrie l’objet de l’adoration des citoyens, elle leur apprend que servir l’État, c’est en servir le dieu tutélaire. C’est une espèce de théocratie dans laquelle on ne doit point avoir d’autre pontife que le prince, ni d’autres prêtres que les magistrats. Alors mourir pour son pays, c’est aller au martyre ; violer les lois, c’est être impie ; et soumettre un coupable à l’exécration publique, c’est le dévouer au courroux des dieux : Sacer esto [« qu'il soit voué aux dieux infernaux »].

Mais elle est mauvaise en ce qu’étant fondée sur l’erreur et sur le mensonge, elle trompe les hommes, les rend crédules, superstitieux, et noie le vrai culte de la Divinité dans un vain cérémonial. Elle est mauvaise encore, quand, devenant exclusive et tyrannique, elle rend un peuple sanguinaire et intolérant, en sorte qu’il ne respire que meurtre et massacre, et croit faire une action sainte en tuant quiconque n’admet pas ses dieux. Cela met un tel peuple dans un état naturel de guerre avec tous les autres, très nuisible à sa propre sûreté.

[Les défauts des religions de la première sorte (un peu analogues à une certaine forme de cultures « universalistes » ?).]

Reste donc la religion de l’homme ou le christianisme, non pas celui d’aujourd’hui, mais celui de l’Évangile, qui en est tout à fait différent. Par cette religion sainte, sublime, véritable, les hommes, enfants du même Dieu, se reconnaissaient tous pour frères, et la société qui les unit ne se dissout pas même à la mort.

Mais cette religion, n’ayant nulle relation particulière avec le corps politique, laisse aux lois la seule force qu’elles tirent d’elles-mêmes sans leur en ajouter aucune autre ; et par là, un des grands liens de la société particulière reste sans effet. Bien plus, loin d’attacher les cœurs des citoyens à l’État, elle les en détache comme de toutes les choses de la terre. Je ne connais rien de plus contraire à l’esprit social.

On nous dit qu’un peuple de vrais chrétiens formerait la plus parfaite société que l’on puisse imaginer. Je ne vois à cette supposition qu’une grande difficulté : c’est qu’une société de vrais chrétiens ne serait plus une société d’hommes.

Je dis même que cette société supposée ne serait, avec toute sa perfection, ni la plus forte ni la plus durable ; à force d’être parfaite, elle manquerait de liaison ; son vice destructeur serait dans sa perfection même.

Chacun remplirait son devoir ; le peuple serait soumis aux lois, les chefs seraient justes et modérés, les magistrats intègres, incorruptibles ; les soldats mépriseraient la mort ; il n’y aurait ni vanité ni luxe ; tout cela est fort bien ; mais voyons plus loin.

Le christianisme est une religion toute spirituelle, occupée uniquement des choses du ciel ; la patrie du chrétien n’est pas de ce monde. Il fait son devoir, il est vrai, mais il le fait avec une profonde indifférence sur le bon ou mauvais succès de ses soins. Pourvu qu’il n’ait rien à se reprocher, peu lui importe que tout aille bien ou mal ici-bas. Si l’État est florissant, à peine ose-t-il jouir de la félicité publique ; il craint de s’enorgueillir de la gloire de son pays : si l’État dépérit, il bénit la main de Dieu qui s’appesantit sur son peuple.

Pour que la société fût paisible et que l’harmonie se maintînt, il faudrait que tous les citoyens sans exception fussent également bons chrétiens : mais si malheureusement il s’y trouve un seul ambitieux, un seul hypocrite, un Catilina, par exemple, un Cromwell, celui-là très certainement aura bon marché de ses pieux compatriotes. La charité chrétienne ne permet pas aisément de penser mal de son prochain. Dès qu’il aura trouvé par quelque ruse l’art de leur en imposer et de s’emparer d’une partie de l’autorité publique, voilà un homme constitué en dignité ; Dieu veut qu’on le respecte : bientôt voilà une puissance ; Dieu veut qu’on lui obéisse. Le dépositaire de cette puissance en abuse-t-il, c’est la verge dont Dieu punit ses enfants. On se ferait conscience de chasser l’usurpateur : il faudrait, troubler le repos public, user, de violence, verser du sang : tout cela s’accorde mal avec la douceur du chrétien, et après tout, qu’importe qu’on soit libre ou serf dans cette vallée de misères ? L’essentiel est d’aller en paradis, et la résignation n’est qu’un moyen de plus pour cela.

Survient-il quelque guerre étrangère, les citoyens marchent sans peine au combat ; nul d’entre eux ne songe à fuir ; ils font leur devoir, mais sans passion pour la victoire ; ils savent plutôt mourir que vaincre. Qu’ils soient vainqueurs ou vaincus, qu’importe ? La Providence ne sait-elle pas mieux qu’eux ce qu’il leur faut ? Qu’on imagine quel parti un ennemi fier, impétueux, passionné, peut tirer de leur stoïcisme ! Mettez vis-à-vis d’eux ces peuples généreux que dévorait l’ardent amour de la gloire et de la patrie, supposez votre république chrétienne vis-à-vis de Sparte ou de Rome : les pieux chrétiens seront battus, écrasés, détruits, avant d’avoir eu le temps de se reconnaître, ou ne devront leur salut qu’au mépris que leur ennemi concevra pour eux. C’était un beau serment à mon gré que celui des soldats de Fabius ; ils ne jurèrent pas de mourir ou de vaincre, ils jurèrent de revenir vainqueurs, et tinrent leur serment. Jamais des chrétiens n’en eussent fait un pareil ; ils auraient cru tenter Dieu.

Mais je me trompe en disant une république chrétienne ; chacun de ces deux mots exclut l’autre. Le christianisme ne prêche que servitude et dépendance. Son esprit est trop favorable à la tyrannie pour qu’elle n’en profite pas toujours. Les vrais chrétiens sont faits pour être esclaves, ils le savent et ne s’en émeuvent guère ; cette courte vie a trop peu de prix à leurs yeux.

Les troupes chrétiennes sont excellentes, nous dit on. Je le nie, qu’on m’en montre de telles. Quant à moi, je ne connais point de troupes chrétiennes. On me citera les croisades. Sans disputer sur la valeur des croisés, je remarquerai que, bien loin d’être des chrétiens, c’étaient des soldats du prêtre, c’étaient des citoyens de l’Église : ils se battaient pour son pays spirituel, qu’elle avait rendu temporel on ne sait comment. À le bien prendre, ceci rentre sous le paganisme : comme l’Évangile n’établit point une religion nationale, toute guerre sacrée est impossible parmi les chrétiens.

Sous les empereurs païens, les soldats chrétiens étaient braves ; tous les auteurs chrétiens l’assurent, et je le crois : c’était une émulation d’honneur contre les troupes païennes. Dès que les empereurs furent chrétiens, cette émulation ne subsista plus ; et, quand la croix eut chassé l’aigle, toute la valeur romaine disparut.

[Une société devrait avoir une croyance qui lui est propre, commune à tous ses membres : sa « religion civile ».]

Mais, laissant à part les considérations politiques, revenons au droit, et fixons les principes sur ce point important. Le droit que le pacte social donne au souverain sur les sujets ne passe point, comme je l’ai dit, les bornes de l’utilité publique. Les sujets ne doivent donc compte au souverain de leurs opinions qu’autant que ces opinions importent à la communauté. Or il importe bien à l’État que chaque citoyen ait une religion qui lui fasse aimer ses devoirs ; mais les dogmes de cette religion n’intéressent ni l’État ni ses membres qu’autant que ces dogmes se rapportent à la morale et aux devoirs que celui qui la professe est tenu de remplir envers autrui. Chacun peut avoir, au surplus, telles opinions qu’il lui plait, sans qu’il appartienne au souverain d’en connaître : car, comme il n’a point de compétence dans l’autre monde, quel que soit le sort des sujets dans la vie à venir, ce n’est pas son affaire, pourvu qu’ils soient bons citoyens dans celle-ci.

Il y a donc une profession de foi purement civile dont il appartient au souverain de fixer les articles, non pas précisément comme dogmes de religion, mais comme sentiments de sociabilité sans lesquels il est impossible d’être bon citoyen ni sujet fidèle. Sans pouvoir obliger personne à les croire, il peut bannir de l’État quiconque ne les croit pas ; il peut le bannir, non comme impie, mais comme insociable, comme incapable d’aimer sincèrement les lois, la justice, et d’immoler au besoin sa vie à son devoir. Que si quelqu’un, après avoir reconnu publiquement ces mêmes dogmes, se conduit comme ne les croyant pas, qu’il soit puni de mort ; il a commis le plus grand des crimes, il a menti devant les lois.

Les dogmes de la religion civile doivent être simples, en petit nombre, énoncés avec précision, sans explications ni commentaires. L’existence de là Divinité puissante, intelligente, bienfaisante, prévoyante et pourvoyante, la vie à venir, le bonheur des justes, le châtiment des méchants, la sainteté du contrat social et des lois : voilà les dogmes positifs. Quant aux dogmes négatifs, je les borne à un seul, c’est l’intolérance : elle rentre dans les cultes que nous avons exclus.

[Au sein d'une société, les autres croyances ne devraient pas être « intolérantes » vis à vis des autres croyances.]

Ceux qui distinguent l’intolérance civile et l’intolérance théologique se trompent, à mon avis. Ces deux intolérances sont inséparables. Il est impossible de vivre en paix avec des gens qu’on croit damnés ; les aimer serait haïr Dieu qui les punit : il faut absolument qu’on les ramène ou qu’on les tourmente. Partout où l’intolérance théologique est admise, il est impossible qu’elle n’ait pas quelque effet civil ; et sitôt qu’elle en a, le souverain n’est plus souverain, même au temporel : dès lors les prêtres sont les vrais maîtres, les rois ne sont que leurs officiers.

Maintenant qu’il n’y a plus et qu’il ne peut plus y avoir de religion nationale exclusive, on doit tolérer toutes celles qui tolèrent les autres, autant que leurs dogmes n’ont rien de contraire aux devoirs du citoyen. Mais quiconque ose dire : hors de l’Église point de salut, doit être chassé de l’État, à moins que l’État ne soit l’Église, et que le prince ne soit le pontife. Un tel dogme n’est bon que dans un gouvernement théocratique ; dans tout autre il est pernicieux. La raison sur laquelle on dit qu’Henri IV embrassa la religion romaine la devrait faire quitter à tout honnête homme, et surtout à tout prince qui saurait raisonner.


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11 réactions à cet article    


  • al.terre.natif 15 décembre 2011 11:49

    @ l’auteur

    Dommage qu’il n’y ait pas un peu (plus) d’analyse personnelle par rapport à ce grand copié / collé.

    Le sujet est intéressant, mais je ne vois pas très bien où vous voulez en venir.


    • samuel_ 15 décembre 2011 12:41


       Mais le texte de Rousseau vaut en lui même son pesant d’or !

       J’ai juste mis une petite piste personnelle d’interprétation du texte au début...
       
       Je pense qu’il ne fallait pas en faire trop, car les analyses personnelles il y en a plein de possibles, beaucoup d’erreurs possibles aussi. Autant ne pas entourer le texte de Rousseau de trop d’erreurs et de trop de manières particulières parmi d’autres de l’interpréter.

       Mais c’est vrai qu’il peut nous inspirer beaucoup de choses !


    • franc 15 décembre 2011 17:04

      texte puissant de Rousseau qui révèle son génie ,il ne faut pas s’étonner de l’énorme émotion des révolutionnaires et du peuple lors de la cérémonie qui a conduit le corps de Rousseau au Panthéon

      j’ai quelques différences ou nuances avec l’interprétation de l’auteur de ce texte quant à la tolérance des croyances les unes envers les autres ainsi que la nature du compromis entre les croyances

      Rousseau dit qu’on peut tolérer certaines croyances autres que la religion commune à une nuance près ,mais cette nuance est de taille ,à la condition que ces croyances ne doivent être en aucun cas être intolérantes ,intolérance qu’ il range comme un dogme négatif et même le seul, dogme négatif qui contrevient aux dogmes premiers de la religion civile et qui impose donc la condamnation à l’exclusion du territoire de la République .C’est extrèmement fort .

      d’autre part la condamnation du multiculturalisme à travers multicroyance ou multicultualisme et multirualisme des croyances contradictoires est sans appel ,puisqu’il dit que
       
      « la 3è sorte de religion plus bizarre, qui, donnant aux hommes deux législations, deux chefs, deux patries, les soumet à des devoirs contradictoires, et les empêche de pouvoir être à la fois dévots et citoyens. .......................elle est si évidemment mauvaise, que c’est perdre le temps de s’amuser à le démontrer. Tout ce qui rompt l’unité sociale ne vaut rien ; toutes les institutions qui mettent l’homme en contradiction avec lui-même ne valent rien. »


      Concernant la synthèse entre les religions ,il ne s’agit pas pour Rousseau d’un simple compromis médiocre entre les croyances,une sorte de syncrétisme batard ,mais d’une synthèse transcendante en la formation d’une religion supérieure,la Religion Civile , qui transcende toutes les croyances et qui excluraient toutes les croyances qui entrent en contradiction ou qui s’opposeraient aux dogmes premiers de la Religion civile ,Rousseau parle même de condamnation à mort pour toute personne qui trahirait le pacte social qui découle des valeurs absolues et sacrées de la religion Civile en ses dogmes axiomatiques premiers fondamentaux .C’est absolument vertigineux.
       

      Ainsi dans la République de Rousseau avec comme religion d’Etat ,la Religion Civile ,l’Islam tel qu’il est aujourd’huis ,l’islam hanbalite coraniste omarien ,serait totalement interdit et exclu duterritoire de la République ,et que les dirigeants ou même les simples adeptes qui proclameraient que le Coran est la Constitution de l’islam et supérieure à la constitution de la République seraient condamnés à mort . 


      • samuel_ 15 décembre 2011 21:57

         Pas tout a fait d’accord avec vous sur deux choses.

         La 3eme sorte de religion (« bizare »), c’est encore autre chose que le multiculturalisme.
         Le multiculturalisme est un mot extremement ambigu : c’est quand plusieurs cultures coexistent, mais d’une maniere bien particuliere sur laquelle personne n’est d’accord : quand ils disent multiculturalisme certains veulent dire de telle maniere et d’autres de telle autre maniere tout a fait differente...
         Mais en tout cas dans le multiculturalisme chacun dans la societe peut avoir une et une seule des cultures coexistantes.
         Alors que la 3eme sorte de religion dont parle Rousseau, c’est quand il est possible qu’un meme individu ait plusieurs cultures differentes qui sont contradictoires. Par exemple il doit a la fois croire en les dieux de rome et au culte romain, tout en croyant en meme temps au christianisme.
         
         Ce que je trouve interessant avec Rousseau, c’est qu’il est a la fois contre certaines versions extremes de multiculturalisme, mais pour certaines versions moderees.
         Il faut a ses yeux que les gens partagent tous une meme culture commune, la religion civile, qui est la devotion pour la societe dans laquelle on vit.
         Mais en meme temps cela ne leur interdit pas d’avoir par ailleurs d’autres cultures, pourvu qu’elles ne soient pas intolerantes vis a vis de la culture commune ou vis a vis des autres, et qu’elles ne se prennent pas pour la culture commune.
         Tolerons d’avoir des differences, mais ne tolerons pas de ne rien avoir en commun, et respectons les morts qui reposent dans le sol que nous foulons.
         Personellement je trouve que c’est le meilleur compromis.

         Il est clair aussi que lorsqu’il aborde le theme de la tolerance on sent les bases d’une notion de laicite.
         Un Islam qui expliquerait aux gens que les français non musulmans sont des infideles voues a l’enfer et qu’il ne faut pas respecter les lois de la France, n’aurait surement rien a faire en France aux yeux de Rousseau.
         Je pense que la plupart des français musulmans n’ont pas dans leur coeur l’envie de se comporter comme ça, et qu’ils aspirent a adherer a des formes plus tolerantes de religion.
         Pour la violence de la repression voulue par Rousseau, la peine de mort, il faut garder en tete le contexte dans lequel parle Rousseau, a son epoque la peine de mort n’est pas du tout abolie, et il est meme ecrit dans la loi que ceux qui tentent de tuer le roi doivent etre punis par l’ecartellement... Rousseau ne fait a mon avis que prendre une peine dans les standards de son epoque, plutot douce meme...


      • Ruut Ruut 15 décembre 2011 17:43

        Rousseau rêvais d’une théocratie.
        Ce n’est surement pas une bonne idée au vue de la nature humaine.


        • franc 15 décembre 2011 21:22

          « Rousseau rêvait d’une théocratie »-------------------------------------------,pas tout à fait du moins sil’on considère la théocratie comme la dictature d’une croyance dogmatique qui n’est pas conforme à la raison et à la nature humaine ,puisque que pour lui la Religion Civile est justement la religion naturelle sans dogme et ritualisme et qui est conforme avec la nature profonde de l’être humain ainsi que bien sûr avec la raison humaine aussi bien transcendantale que immanente ou pratique .Rousseau condamne les trois formes de religion qui ne sont pas conformes avec la nature profonde humaine ,y compris la religion chrétienne qu’il trouve supérieure aux deux autres mais qui néanmoins ayant des exigences de perfection absolue trop idéalistes et trop éthérées dans une soumission totale à la cité céleste et délaissant avec mépris la cité terrestre ne peut être compatible avec la nature humaine relativement imparfaite par essence .

          Pour lui la théocratie se résume à la souveraineté de la Religion Civile dont les dogmes axiomatiques premiers sont les valeurs universelles et sacrées découlant de la raison naturelle humaine érigée en absolu et qui sont nécessaires au bonheur individuel et à l’harmonie de la société.Ainsi comme il le dit :
           
          « Les dogmes de la Religion Civile doivent être simples, en petit nombre, énoncés avec précision, sans explications ni commentaires. L’existence de la Divinité, puissante, intelligente, bienfaisante, prévoyante et pourvoyante, la vie à venir, le bonheur des justes, le châtiment des méchants, la sainteté du contrat social et des lois : voilà les dogmes positifs. Quant aux dogmes négatifs, je les borne à un seul, c’est l’intolérance : elle rentre dans les cultes que nous avons exclus. »

          Il est à remarquer que Rousseau ne parle pas de Dieu au sens d u Dieu personnel du monothéisme abrahamique ,mais d’une Divinité impersonnelle ,c’est à dire d’un principe divin ou d’un esprit transcendant qui pose et fonde le principe de l’absoluité et de la sacralité des valeurs universelle qui en émanent 


          • Rensk Rensk 15 décembre 2011 23:31

            Drôle que vous vous l’attribuez toujours comme étant français...

            Jean-Jacques Rousseau est le fils d’Isaac Rousseau (Genève, 1672 - Nyon, 1747), horloger comme son père et son grand-père, et de Suzanne Bernard (Genève, 1673 - Genève, 1712), décédée le 7 juillet 1712, neuf jours après la naissance de Jean-Jacques.

            Et l’île du lac de Bienne où il s’était réfugié ???

            Lors de la Réformation, les biens de la fondation furent attribués à l’Hôpital des Bourgeois, en possession duquel ils sont restés depuis. Le plus célèbre des habitants de l’île Saint-Pierre fut Jean-Jacques Rousseau, qui trouva dans l’isolement d’un tel asile une atmosphère propice aux promenades solitaires qui, le rapprochant de l’état de nature, favorisaient ses méditations sur le sentiment de l’existence.

            Je pense... et découvre toujours un sacré plaisir de retrouver autant d’anarchistes dans mon pays... smiley (La Chaux-de-Fonds en est un exemple comme Zürich)


            • samuel_ 16 décembre 2011 00:23


               Rousseau est né en suisse francophone et non en suisse allemande, regions suisses qui touchent la France, sont en forte interaction et proximité culturelle avec elle.
               Il a beaucoup vécu en France : 19 annees en Suisse dont ses 16 premieres / 43 annees en France dont ses 9 dernieres)

               1712-1728 : jeunesse a Geneve
               1728 : passage a Chambery
               1728-1729 : sejour a Turin
               1729-1730 : sejour a Chambery
               1730 : passage a Neuchatel
               1730-1742 : long sejour a Chambery
               1742-1743 : sejour a Paris
               1743-1744 : sejour a Venise
               1744-1756 : long sejour a Paris
               1756-1762 : sejour en region parisienne
               1762-1765 : sejour dans la region de Neuchatel et Berne
               1765-1769 : sejour en Angleterre
               1769-1772 : sejour a Paris
               1772-1778 : sejour et mort en region parisienne

               



              • franc 16 décembre 2011 15:41

                il est vrai que le mot multiculturalisme a un sens très large et donc peut être ambigü,mais j’ai bien précisé et limité le domaine du sens où s’applique ce mot dans l’ emploi qui fait que Rousseau condamne le multiculturalisme ,à savoir le multiculturalisme se fondant et découlant des différences des systèmes religieux qui établissent des systèmes de valeurs et des législations différentes .J’ai employé pour cela dans mon commentaire ce barbarisme de «  multiculturalisme à travers les multicroyances ou multicultualisme et multiritualisme »,c’est clair, multicroyance ,multicultualisme (,non je n’ai pas fait de faute de frappe ,à ne pas confondre avec multiculturalisme )et multiritualisme sont des mots qui se réfèrent à des systèmes religieux . Il ne s’agit donc évidemment pas de multiculturalisme fondé sur les différences de modes profanes avec les différences de goûts en matière d’habillement ou d’alimentation ou des différences de language .

                Rousseau aussi est bien clair quand il parle de la 3è religion qui «  donnant aux hommes deux législations, deux chefs, deux patries, les soumet à des devoirs contradictoires, et les empêche de pouvoir être à la fois dévots et citoyens. .......................elle est si évidemment mauvaise, que c’est perdre le temps de s’amuser à le démontrer. Tout ce qui rompt l’unité sociale ne vaut rien ; toutes les institutions qui mettent l’homme en contradiction avec lui-même ne valent rien. »------------------------------------------------------------------Quand il dit : deux législations qui « empêchent d’être à la fois DEVOT et CITOYEN » c’est bien du multiculturalisme croyancier qui se fonde sur des systèmes religieux différents qui établissent des législations différentes qui mettent l’homme en contradiction avec lui-même .Et il ajoute .......................« elle est si évidemment mauvaise, que c’est perdre le temps de s’amuser à le démontrer. Tout ce qui rompt l’unité sociale ne vaut rien ; toutes les institutions qui mettent l’homme en contradiction avec lui-même ne valent rien. »------------------------------------------------------la condamnation de Rousseau du multiculturalisme fondé sur des systèmes religieux différents est sans appel .


                Plus encore tout système religieux ou de croyance qui s’opposerait aux dogmes de la Religion Civile serait banni et même ses adeptes qui par ruse et mensonge après avoir professé l’allégeange en la foi de la Religion Civile la trahirait en se conduisant comme s’il n’ y croit pas,en fait pratique le mensonge sacrilège , serait condamné à la peine de mort,c’est tout à fait clair dans le passage suivant :

                «  Il y a donc une profession de foi purement civile dont il appartient au souverain de fixer les articles, non pas précisément comme dogmes de religion, mais comme sentiments de sociabilité sans lesquels il est impossible d’être bon citoyen ni sujet fidèle. Sans pouvoir obliger personne à les croire, il peut bannir de l’État quiconque ne les croit pas ; il peut le bannir, non comme impie, mais comme insociable, comme incapable d’aimer sincèrement les lois, la justice, et d’immoler au besoin sa vie à son devoir. Que si quelqu’un, après avoir reconnu publiquement ces mêmes dogmes, se conduit comme ne les croyant pas, qu’il soit puni de mort ; il a commis le plus grand des crimes, il a menti devant les lois. »




                • franc 16 décembre 2011 16:41

                  Il en résulte que tout individu ou communauté qui pratique le « TAQIYA »,c’est à dire ce mensonge sacrilège qui consiste à faire semblant de faire allégeance à une foi ,en l’occurrence ici à la Religion Civile de la République , mais qui travaille en sourdine à la combattre en sapant ses fondements et trahissant ses dogmes premiers ,que ce soit la taqiya des adeptes de l’islam ou de toute autre croyance ou secte ,cet individu ou communauté devrait être banni voire même condamné à mort pour Rousseau

                  c’est pourquoi j’ai dit que dans la République de Rousseau avec comme religion d’Etat la Religion Civile l’Islam hanbalite coraniste omarien qui a pour premier dogme que le Coran est incréé et donc contient la parole immuable et intangible de la parole divine (et non pas par exemple l’islam rationaliste moutazilite dusiècle d’or de Bagdad au 8è siècle qui reconnait que le coran est un livre créé par des hommes),cet islam hanbalite qui proclame
                  que le coran est le texte de la Constitution de la communauté musulmane ,que l a loi coranique qui est la loi divine est au dessus de toute autre loi humaine et donc au dessus de la loi de la République ou de l aReligion Civile ,serait banni du territoire de la République et ses adeptes pourraient être condamnés à mort pour leur comportement trahissant les valeurs absolues de la Religion Civile fondée sur la raison humaine .

                  Or les cinq écoles islamiques principales contemporaines,extrémistes ou modérées , se rallient au dogme hanbalite coraniste omarien (l’école rationaliste moutazilite a complètement disparu du monde islamique depuis la fin du 9 è siècle où a été proclamé la fin de l’Ijtihad ,la fin de l’ère de l’Interprétation rationnelle du coran).C’est pourquoi on peut se poser des questions sur les contradictions éventuelles qui séviraient dans l’esprit des musulmans qui veulent à la fois respecter pleinement et absolument la loi coranique et la loi de la religion civile telle que l’entend Rousseau.Pour celui-ci l’islam hanbalite coraniste omarien romprerait l’unité sociale et mettrait la contradiction dans l’homme,donc à bannir complètement----------«  Tout ce qui rompt l’unité sociale ne vaut rien ; toutes les institutions qui mettent l’homme en contradiction avec lui-même ne valent rien. »



                  Il faut rappeler cette différence fondamentale entre les actes religieux et les actes profanes

                  L’acte profane est particulier , relatif et purement individuelle tandis que l’acte religieux est par essence et par nature universel ,absolu et d’origine divine et donc s’impose ou devrait s’imposer à tous les hommes .Or l’Islam ne fait pas de différence entre l’acte profane et l’acte religieux .D’où la contradiction et l’opposition possible et probable avec les autres religions ou philosophies profanes 
                   

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