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Tort & Travers

 

Sans discernement aucun !

 

Il s'appelait Tort, ce qui explique sans aucun doute qu'il voulait toujours avoir raison. Elle se nommait Travers ce qui ne l'empêchait alors nullement de marcher droit et la tête haute. Qu'ils se trouvent tous deux flanqués ainsi de patronymes si peu simples à porter ne leur suffisaient pas, il fallut en somme qu'ils complètent le tableau, en cherchant à se trouver l'un l'autre en harmonie.

Tort demanda la main de Travers qui d'un revers de celle-ci la lui accorda sans trop réfléchir. Tort était un beau ténébreux, Travers une charmante luronne à forte poitrine. Pardonnez-moi ce raccourci peu flatteur mais c'est ainsi que son époux l'avait jugé au premier coup d'œil. Il est des impressions trompeuses qui vous conduisent à bien des regrets, comment pouvait-il en être autrement pour celui qui trop souvent déraisonne.

Travers quant à elle avait longtemps marqué ses distances avec ce curieux soupirant qui ne lui disait rien qui vaille. Quand il la regardait, elle se sentait déshabillée du regard, rabaissée à un simple objet de désir. Elle prétendait à plus de considération qu'une simple et vulgaire attirance physique.

Tort et Travers de guerre lasse unirent leur destin. La vie n'est certes pas un long fleuve tranquille mais de là à en faire un torrent tumultueux, il fallait faire preuve de déraison pour se lancer dans pareille aventure. Tort en ce domaine était passé maître, une sorte d'expert, capable de se lancer tête baissée dans les plus mauvaises expériences, attiré par les coups tordus et les personnages infréquentables.

Travers résista le plus possible à ses avances, sentant qu'elle n'aurait rien à gagner dans cette aventure. Elle ne fut pas déçue et longtemps elle se maudit d'avoir cédé par lassitude, par crainte de laisser passer la dernière occasion qui s'offrait à elle. C'était encore un temps où coiffer Sainte Catherine était une condamnation sans appel à la vie de vieille fille.

Tort, une fois le contrat de mariage en poche cessa de perdre son temps en gracieux sourires, en gentilles déclarations, en propos plaisants. Il se montra tel qu'en lui-même, imbu de sa personne, hautain et méprisant. Sa pauvre épouse découvrait un tyran domestique, un bon à rien et un mauvais en tout, pourvu qu'il laisse un vilain goût à son passage.

L'enfer du quotidien, ils le découvrirent dès que la porte de leur appartement se refermait, laissant le monde en dehors de ce jeu de dupe. Tort ne faisait rien, exigeant que Travers se pliât en quatre pour lui simplifier l'existence. Elle était sa servante, sa domestique, son souffre-douleur et son esclave sexuelle. Et quand de temps à autre, celle-ci se rebellait, elle recevait une pluie de coups pour la remettre dans le droit chemin.

Tort, s'il avait la main leste, l'avait judicieuse. Jamais un coup ne laissait de trace. Il avait le souci de l'opinion des voisins. Jamais un bruit plus haut que l'autre également. Son emprise, sa tyrannie s'exerçait en douceur, tout en délicatesse si j'ose dire. En public, les salamalecs à son épouse faisaient bonne figure tandis que la pauvrette aurait été bien en peine de montrer ses ecchymoses et plaies.

Travers souffrait en silence, n'ayant personne qui puisse écouter une plainte sans preuve. Elle se desséchait, s'étiolait, s'enfermait petit à petit dans cette toile d'araignée que lui avait tissée son tourmenteur. Comment se plaindre quand elle disposait de tout le confort matériel que ses amies lui enviaient ? Comment faire entendre sa misère quand elle ne manquait jamais de rien ?

Tort avait gagné la bataille des apparences, Travers perdu celle de la compassion. Elle n'avait plus qu'à se perdre à elle-même pour s'évader d'une prison sans barreau, d'un maton sans matraque, d'un bourreau sans sévices visibles. Elle plongea dans le vide, celui d'une dépression qui vous laisse sur le carreau, absente à vous-même, vide de toute sensibilité. Elle ne compléta pas la longue liste des féminicides, mais son sort était-il si différent de celui de ces malheureuses ?

 

À contre-sens.

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21 réactions à cet article    


  • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:03

    Merci Nabum. Un ART icle qui vient à point à la veille de la Sein valse en mauvais teint. Belle du Saigneur face à Albert le cogneur ou Co haine. Vuos qui croyez à l’amour, n’oubliez pas que cupide don veille sur son commerce. Si vous m’aimez, surtout ne m’aimez-pas.... cela m’évitera les Christs en thème.


    • Francis, agnotologue Francis, agnotologue 13 février 2023 10:12

      @Mélusine ou la Robe de Saphir.
       
      j’ai toujours pensé que les Lacaniens étaient capables du meilleur comme du pire.
       
      J’ai entendu une personne énoncer très sérieusement que laconique venait de Lacan.
       
      ps. La Laconie était la région de Sparte dans la Grèce antique.


    • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:17

      @Francis, agnotologue entre freudiens on parlaient plutôt de lacannarie....


    • Sirius paparazzo 13 février 2023 10:28

      @Francis, agnotologue

      D’ailleurs, l’autre nom de Sparte était Lacédémone (Λακεδαίμων Lakedaímôn), et la cité avait deux rois, ce qui permettait d’en garder un sur place pendant que l’autre guerroyait, ou de minimiser les problèmes de vacance du pouvoir en cas de décès ou de régence d’un roi.


    • C'est Nabum C’est Nabum 13 février 2023 10:30

      @Mélusine ou la Robe de Saphir.

      De rien
      Merci pour votre fidélité


    • Sirius paparazzo 13 février 2023 10:31

      @Mélusine ou la Robe de Saphir.

      « on parlai(en)t plutôt de lacannarie »
      un raccourci entre ânerie et connerie ?


    • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:32

      @paparazzo Lacan De l’occitan, → voir calm, issu d’une racine oronimique prélatine cauma/calma désignant un plateau


    • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:35

      @paparazzo Tout n’est pas à jeter dans Lacan.... la langue des oiseaux vient de lui. Ainsi que le fameux « stade du miroir ». Mais c’était un paranoïaque. Cautaerts est plutôt un freudo-jungien...


    • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:10
      Solal est-il le plus grand pervers narcissique de la littérature ?
      Spécialiste de la folie dans le roman du XXe siècle, Anaëlle Touboul propose une déconstruction du cliché psychopathologique à travers le héros de « Belle du Seigneur » d’Albert Cohen, sorti il y a cinquante ans.

      Hier de lire Rudolph Steiner : L’apocalypse de Saint « Je » ou la guerre de tous contre tous... Très étonnée je comprends que l’ennemi du soleil et donc du Christ est SORAT (un diable fameux..). Tiens de faire lien avec l’antisémite, ami de Dieudonné : Soral. Solal, Sorat. On en apprends tous les jours... De chercher Sorat sur Google et de tomber sur sourate... Mieux vaut arrêter là. Le sujet devenant scabreux...... 


      • Sirius paparazzo 13 février 2023 10:11

        « Elle ne compléta pas la longue liste des féminicides, mais son sort était-il si différent de celui de ces malheureuses ? »

        On peut inverser les rôles, mais comme le mot « masculicide » n’existe pas (puisqu’autrefois, le mot « homicide » était neutre ou bisexuel ou agenre, comme vous voudrez), on ne met en exergue que la moitié de la turpitude humaine.

        C’est une des applications de la technique de discrimination positive mise en avant par les étasuniens pour faire croire aux « minorités opprimées » que maintenant, c’est fini, que la camp du bien au pouvoir va chasser définitivement le diable. C’est plus pratique de désigner les mâles comme « méchants » plutôt que de remettre en cause les fondement de ces inégalités et injustices.

        Mais pour ce qui est des victimes de pervers narcissiques dans les ménages et d’une soumission gérée par des techniques manipulatoires conscientes ou héritées d’une longue lignée, les deux sexes sont à égalité. Beaucoup donnent le change, mais une petite poupée à l’air innocent maquée à un beauf peut très bien se révéler le pire des dragons à la maison. Le doberman devient un toutou qui utilise les patins pour marcher sur le parquet ciré !


        • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:29

          @paparazzo Connaissant parfaitement le sujet ayant lu un livre fameux (introuvable car trop cher actuellement) : de Michel Cautaerts, un belge : je tu(e) il. Je peux vous dire que vous avez « en partie » raison.... A mère « perverse », fils pervers. Pierre Palmade n’a-t-il pas été "couvé par des femmes ? Son père étant décédé comme par hasard à ses huit an dans un accident de voiture... C’est le serpent qui se mord la queue. Les femmes déçues par les hommes reportent leur affection fusionnelle sur leur poupon mâle qui prend ainsi la place du père. Fondement de la future homosexualité et ou perversion narcissique. Le père ne faisant plus LOI. les coups volent sans pare-feu.... Lisez la sexualité féminine de Janine chasseguet-Smirgel. C’est ainsi, les fils étant la majorité du temps préféré de la mère (par rapport au père perçu comme frustrant ou décevant) sont plus enclins à la perversion et au sentiment d’omnipotence (HUBRIS) que les femmes. Le monde est mal foutu. Dans mon cas, ce fut l’inverse : ma mère voulait une fille et mon père un garçon pour transmettre le nom de la lignée..... 


        • C'est Nabum C’est Nabum 13 février 2023 10:31

          @paparazzo

          Bien sûr


        • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:16

          Solal est un prénom d’origine hébraïque, signifiant « celui qui fraie un chemin ». Et SO« RAT ». Pour Sorat : Rien, excepté sourate. Steiner (rappelez-vous l’affaire Françoise Nyssen et son école Blavatsky). Steiner (steiner est un nom alsacien-lorrain, dérivé de stein pierre, a désigne un tailleur de pierres, macon) étant décédé avant le nazisme on ne peut lui reprocher ses lien avec ceux-ci. D’autant plus qu’il arrive à la conclusion que Sorat est bien l’anti-christ en traduisant 666 en hébreux...... Allez savoir. 


          • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:37

            D’ailleurs Cautaerts n’a pas intitulé son livre : Je tu(e) elle...... Il dans le sens d’humain...


            • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:44

              Pour comprendre la perversion narcissique : Belle du Seigneur d’Albert Cohen : https://www.cairn.info/revue-l-information-psychiatrique-2012-1-page-21.htm. Pourtant considéré par certains comme un des plus grands romans d’amour. Lire Don-Juan et son double d’Otto Rank. Plus proche des liaisons dangereuse de Laclos. Mais les français aiment le piment. La fadeur de l’amour véritable les débecte. Lire : Eros et Anteros.


              • Mélusine ou la Robe de Saphir. Mélusine ou la Robe de Saphir. 13 février 2023 10:49

                Organisé sous un mode narcissique déficitaire, le Moi pervers lutte contre une menace d’effondrement via les procédés du déni et de l’expulsion projective de ses rejetons psychiques les plus toxiques. Ce montage défensif bloquant par-là même tout accès à l’intériorité, le sujet pervers demeura non seulement parfaitement ignorant de sa souffrance, mais il la fera porter à un autre. La structure perverse narcissique, apathique et paradépressive, ne l’est donc qu’à la condition d’un objet – récepteur – délégué à la réussite de l’exportation projective de sa conflictualité. La relation perverse se caractérise de fait d’un investissement d’objet visant à conquérir et contrôler ce dernier : à l’inféoder à son entier profit narcissique. Le pervers narcissique se reconnaît vite. Il n’a pas de vie intérieure. Un peu comme le vampire qui ne se voit pas dans une miroir. 



                  • juluch juluch 13 février 2023 13:07

                    On sait jamais se qui se passe derrière la porte des voisins....


                    • C'est Nabum C’est Nabum 13 février 2023 13:17

                      @juluch

                      Jamais en effet


                    • christophe nicolas christophe nicolas 14 février 2023 12:36

                      Prenez des cas concrets Nabum, vous serez moins confus ainsi que vos commentateurs psychologistes. La vie privée des gens ne vous concerne pas donc prenez par exemple, Olivier Veran qui a pris sciemment tous les Français pour des idiots ... 

                      https://www.youtube.com/watch?v=CE-DcyWPmLY&t=1081s

                      Ensuite psychanalysez les réactions des divers acteurs de la crise du Covid, du Fact-checkeur au professeur censuré sur twitter pour avoir dénoncé les effets secondaires du vaccin.

                      Là, les gens comprendront vos histoires qui se perdent dans les limbes.

                      Evidemment si vous êtes sur des cas concrets, vous serez critiquables, est-ce que ça vous fait peur ?

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