Travailler le dimanche ou ne pas travailler ?
Un sondage CSA-Le Parisien-Aujourd’hui en France en date du 17 décembre 2006 révèle qu’un Français sur deux préfère que les magasins soient fermés le dimanche. Les moins de trente ans sont les plus nombreux (72%) à plébisciter l’ouverture le dimanche, alors que passé cet âge, les Français se prononcent majoritairement contre. De même, les femmes sont majoritairement (54%) favorables, contre 44% chez les hommes.
Le ministre de l’Intérieur et candidat à l’élection présidentielle Nicolas Sarkozy, qui semble souffrir d’un déficit de confiance dans les deux catégories qui pébliscitent le travail dominical, prône « une société du libre choix » en matière de temps de travail. Lors d’un déplacement à Chalon-sur-Saône (Saône-et-Loire), le candidat de l’UMP à l’élection présidentielle déclare que « ceux qui veulent être payés le double et travailler le dimanche 24 [décembre], pourquoi les empêcher de le faire ? » « Le premier problème économique de la France, c’est le pouvoir d’achat et les salaires (...) Je propose une nouvelle révolution économique : récompenser ceux qui veulent travailler davantage (...) On va garder les trente-cinq heures, mais ceux d’entre vous qui voudront mettre du beurre dans les épinards » pourront travailler plus... Le Monde, 4 décembre 2006.
Pierre Lelouche est à l’origine d’une proposition de loi n° 3262 visant à modifier l’article L. 221-5 du code du travail afin de permettre l’ouverture des commerces le dimanche. Dans l’exposé des motifs, le député Lelouche estime que « d’origine religieuse dans une loi de 1906, puis entrée dans l’usage, l’interdiction de travailler le dimanche posée par le code du travail est aujourd’hui en décalage flagrant avec les besoins de l’économie ainsi qu’avec l’évolution de la société ». « Une loi vieille de cent ans, et que quasiment plus personne ne respecte, reste quand même une loi ! », a déclaré le juge des référés du Tribunal de Pontoise, saisi par l’union départementale de la CFTC. (Ordonnance de référé en date du 21 décembre 2006). L’arrêt de la Cour d’appel de Versailles du 14 juin 2006 relatif à l’affaire du centre commercial d’Usines Center avait déjà rappelé une position de principe : « Il n’appartient pas au juge de se substituer au législateur en adaptant sa jurisprudence à l’évolution inexorable qui serait apparue en matière commerciale en ce qui concerne l’ouverture dominicale. »
Force est de constater qu’en règle générale, les jugements ne sauraient être favorables à l’employeur car ceux-ci sont bien en peine à développer des arguments recevables sur le plan juridique. Comme le souligne un inspecteur du travail, l’entreprise se borne généralement « à faire état de l’importance du chiffre d’affaires réalisé le dimanche (normal, puisque la concurrence est fermée) et de l’accord des salariés pour travailler ce jour-là. S’y ajoute, pour conclure, la menace classique de cessation d’activité s’il fallait, par une cruelle injustice, enfin appliquer la loi ». Cette forme de chantage peut être combattue par la condamnation à une astreinte d’un montant proportionnel au chiffre d’affaires réalisé. Le juge des référés de Pontoise semble l’avoir bien compris en condamnant la société à une astreinte de 300 000 euros par magasin et infraction journalière constatée par magasin. L’affaire Conforama nous révèle enfin le mépris d’un grand nombre d’entreprises à l’égard de la législation actuelle. En effet, l’avocat de la CFTC a, lors de l’audience, souligné que Conforama n’avait pas adressé de demande de dérogation au préfet pour obtenir l’autorisation d’ouvrir, au motif "on ne ne nous l’aurait pas refusée donc on ne l’a pas demandée". Affaire à suivre...
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