Viols de femmes ou d’hommes : il faut tuer le silence et faire changer de camp la honte !
"Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui, par violence, contrainte, menace ou surprise, est un viol." Article 222.23 du Code pénal.
Chaque terme a son importance :
- pénétration sexuelle : c’est ce qui distingue le viol des autres agressions sexuelles ;
- de quelque nature qu’il soit : ceci désigne toute pénétration sexuelle, qu’elle soit vaginale, anale (sodomie) ou orale (fellation), ou pénétration sexuelle par la main ou des objets ;
- commis sur la personne d’autrui : ceci désigne soit une femme, soit un homme, soit un enfant, fille ou garçon, que la victime soit connue ou inconnue de l’agresseur ; ce dernier peut être extérieur à la famille ou lui appartenir (viol incestueux, viol conjugal) ;
- par violence, contrainte, menace ou surprise : ceci désigne les moyens employés par l’agresseur pour imposer sa volonté, au mépris du refus ou de l’âge de la victime ; c’est le non-consentement ou l’abus de minorité qui caractérisent le viol.
Chaque heure, près de 9 personnes sont violées, soit 205 viols par jour. Le nombre de viols seraient de 75.000 par an en France, dont seulement 8458 déclarés. Les tentatives de viols seraient 198 000 par an.
Le silence, la honte, le poids du secret.
A la violence de l'agression sexuelle, se rajoute un forte tendance à l'auto-culpabilisation. En effet la victime se reproche souvent de ne pas s'être débattue ou de n'avoir pas crié assez fort, d'avoir prise trop de risques, de s'être mise elle même en danger, d'avoir été provocante, etc...
Cette propension à s'attribuer la responsabilité du crime contribue d'ailleurs à la défense du violeur, qui pioche dans ce type de discours pour tenter de convaincre que l'autre l'a aguiché, l'a cherché et qu'il n'a fait que répondre à ses désirs. En outre, certaines réactions physiologiques réflexes, vécues comme une trahison de la part du corps et utilisées par le violeur pour faire croire à la victime qu'elle est consentant, accentuent le sentiment de culpabilité.
Pourtant, rien ne peut atténuer ou amoindrir la faute du violeur. Peu importe la situation, le moment, l'endroit, la tenue, le comportement de la personne, si elle dit "non" l'autre doit immédiatement s'interrompre.
Malgré cela de nombreuse victimes, trop honteuses, restent silencieuses, gardent le secret et assurent ainsi l'impunité de leur violeur. D'une certaine façon, le secret rend complice. Le sercret alimente la honte. Le secret entretient le déni et avec lui un clivage au sein de la personne. ( Vidéo que faire après un viol)
Le viol des hommes "un tabou"
Il faut noter que 96% des auteurs de viols sont des hommes et 91% des victimes sont des femmes. On ne connaît pas le nombre exact d'hommes victimes de viols, mais on estime de 7 à 10% le nombre d'hommes qui ont subi des violences sexuelles, en France, au cours de leur vie. La plupart de ces agressions sont commises par d'autres hommes. Les cas les plus fréquents se retrouvent dans la pédophilie ou le viol en prison.
Car les hommes abusés sexuellement ne le sont presque jamais par des femmes, mais bien par des hommes, hétérosexuels dans leur grande majorité. Daniel Welzer-Lang, seul chercheur français à s’être intéressé au sujet, rapporte dans nombre de ses travaux que le violeur qui agresse un homme se définit comme hétérosexuel. Poussant plus loin la recherche, il apparaît que c’est la question des rôles, et donc de la pénétration active, qui définirait l’hétérosexualité et, dans la tête des agresseurs, il ne fait aucun doute qu’ils sont hétérosexuels puisqu’ils sont actifs. Sont incluses toutes les pratiques, et pas exclusivement la pénétration, dans cette définition normative de l’hétérosexualité vue comme "active". Celui qui se fait sucer, même de force, n’est pas homosexuel !
Parler du viol des hommes reste "tabou" en France. Pourquoi ? Et bien parce que le sujet fait appel à l'homosexualité, à la vulnérabilité. Et il n'existe aucune association pour leur venir en aide spécifiquement. En Grande Bretagne, on dénombre cinq associations qui prennent en charge les hommes ayant été victimes d’abus sexuels.
En février 2012, à l'occasion du tournoi de rugby des six nations, une association britannique "Survivors UK" a brisé le tabou en lançant une campagne publicitaire frappante et sans détour, placardée grand format dans les rues de Londres. L’image qui devait particulièrement retenir l'attention représente un ballon de rugby percé d’un clou, au dessus duquel on peut lire : " Les vrais hommes se font violer… et en parler demande une vraie force."
Le manifeste des 313
En 1971, Le Nouvel Observateur avait déjà lancé un précédent manifeste. Celui des 343 qui regroupait des femmes qui déclaraient avoir avorté alors que la loi légalisant l’avortement n’existait pas encore.
L'hebdomadaire récidive en publiant "le manifeste des 313" qui regroupe les signatures de 313 femmes âgées de 18 à 87 ans qui ont un jour été victimes de viol. Parmi les femmes qui ont signé ce manifeste, on retrouve Clémentine Autain, l’écrivaine Frédérique Hébrard, l’ex-tenniswoman Isabelle Demongeot ou encore l’ex-épouse de Dominique de Villepin, Marie-Laure de Villepin. Toutes ont voulu s’engager pour que la "honte change de camp"
"Les voix du silence" : la parole aux victimes
Le 19 novembre "France Télévisions" a lancé, en partenariat avec " le Nouvel Observateur" une plateforme de témoignages interactive, pour briser le tabou du viol. Il s’agit pas pour la télévision publique de mettre en place, grâce à Internet, un dispositif au long cours pour contribuer à faire reculer les violences faites aux femmes.
France Télévisions, à l’aide du genre documentaire qui porte haut l’offre alternative que doit affirmer le service public face aux chaînes privées, exerce ainsi ses missions autour de cette question majeure posée à notre société. Sur France 5 on a pu voir, le 20 novembre, le documentaire Viol, double peine. Enfin, sur France 2 est programmé, le 25 novembre, le documentaire Viol : elles se manifestent.
En France le viol est tabou. Comme le dit Clémentine Autain, femme politique, violée à 22 ans : " On peut raconter dans un dîner entre amis ou à ses collègues de bureau que l’on a été victime d’un attentat, que l’on a perdu un proche ou subi un cambriolage. Avec le viol, silence radio. Cet acte touche à la sexualité et la suspicion n’est jamais loin. Le viol est un crime dans lequel la victime se sent coupable, honteuse. Ne pas pouvoir dire ce que l’on a vécu rajoute à la violence subie et contribue à l’impunité des violeurs." ( Vidéo : Viol : très peu de victimes osent porter plainte)
Il faut dire le viol, en parler, faire reculer la chape de plomb et l'outrageante suspicion pesant sur les victimes, toutes les victimes femmes ou hommes. En ce qui concerne les hommes les associations françaises devraient s'impliquer dans leur défense, comme le font les britanniques.
Sources : lesinrocks.com, The Guardian, Le Nouvel Obs, Francetv.fr,
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