Et si demain les portables devenaient des caméras de surveillance !
Après « Interdiction de sourire », le premier épisode de la série « Demain, Big Brother est parmi nous » qui laissait supposer que nous pourrions un jour être interdit de sourire, le deuxième explique que dans le domaine de la surveillance l’enfer pourra véritablement venir des autres. Avec leurs anodins portables, ils violeront notre intimité.
La rugissante technologie nous a permis d’acquérir des téléphones à tout faire qui font entre autres office d’appareil photo et de caméra.
Des bombes dans les poches de nos enfants
Cette profusion d’appareils à enregistrer des images a généré des usages étranges comme le « happy slapping » ou joyeuses baffes qui consiste à filmer des bagarres avec son téléphone portable et à les diffuser sur des sites internet. Cette pratique a une dimension essentiellement ludique. Les jeunes n’ont souvent aucune conscience de l’impact de la violence, car ils agissent ainsi pour se faire reconnaître dans leur groupe de pairs. Le problème est que, une fois encore, on a introduit une technologie sans prendre le temps d’éduquer les utilisateurs. Eh oui, lorsqu’on livre en pâture une bombe à des enfants, il ne faut pas s’étonner qu’ils testent toutes ses possibilités et trouvent un moyen de la faire exploser.
Avec ces caméras, plus personne n’est à l’abri d’être exhibé sur le net. Dans certains pays, les dégâts sont tels que l’on a donc interdit l’utilisation des téléphones portables dans des lieux publics comme les piscines, les salles de sport, les saunas. Des gens y étaient photographiés à leur insu. Le terme employé pour ce type d’usage est underskirting, littéralement, regarder sous les jupes des femmes.
De la réalité augmentée...
Si cette surveillance permanente est inquiétante, cela peut être encore pire avec les progrès de la nouvelle technologie et en particulier la diffusion de la réalité augmentée.
La réalité augmentée, c’est une tranche de réalité sur laquelle on ajoute une couche de virtualité. Le principe de cette cuisine « new technologie » est d’ajouter des informations sur ce que vous voyez. Par exemple, vous êtes au pied de la tour Eiffel. Pointant le capteur photo de votre téléphone portable sur la structure, vous recevez directement sur votre écran une multitude d’informations pratiques : nombre d’étages, poids de la vieille dame, carrière de son géniteur, lien vers le site internet officiel du lieu, horaires d’ouverture, etc.
Ce prototype de téléphone multifonctions a été imaginé par le centre de recherche du groupe finlandais Nokia. L’équipe de Markus Kähäri a mis au point en octobre 2006 un logiciel, Mobile Augmented Reality Applications (MARA), capable d’identifier objets ou lieux photographiés par un mobile. Le MARA utilise différents capteurs pour donner plus d’informations au téléphone sur l’environnement : une boussole pour qu’il puisse se repérer, des accéléromètres et un récepteur GPS pour affiner la localisation, et l’appareil photo pour l’acquisition des images.
Dès que le portable commence à filmer, le logiciel reçoit les informations des trois capteurs et les envoie à une base de données. Celle-ci analyse les objets qui se trouvent devant l’objectif. L’écran affiche alors les informations en temps réel en les incrustant dans l’image. Lors d’un match de football, par exemple, il suffira de filmer un des joueurs pour avoir accès à divers liens sur sa carrière, à son site ou à un clip vidéo de son plus beau but.
A la surveillance augmentée
Jusque-là tout va bien, la technologie nous fournit des informations qui peuvent servir à enrichir nos connaissances, mais imaginons la suite.
Rien n’interdit à ce que demain, notre portable ne nous donne pas des informations sur les personnes que nous rencontrons. Nous serons dans le métro, chez des amis ou au travail, notre interlocuteur dégainera son portable. Comme votre visage étant enregistré par les webcams et les caméras de surveillance, un clic déclenchera une avalanche d’informations sur vous. Un étranger pourra connaître vos sujets de recherches favoris sur Google, les derniers sites que vous avez visité et pourquoi pas le type de déplacement que vous effectuez chaque jour, et pire encore les médicaments que vous prenez.
Inquiétant ? Oui, il n’y a pire que le viol de l’intimité et d’autant, comme l’expliquait hier le philosophe Michel Foucault, cette visibilité permanente entraîne une normalisation sociale plus efficace que tous les systèmes de privation de liberté.
NB : Et si vous voulez continuer à vous faire peur, je vous invite à découvrir le célèbre texte sur nos futures commandes de pizza. Il parle clairement et avec humour des méfaits de la surveillance technologique.
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