La relativité d’Einstein n’est pas la bonne théorie pour décrire le cosmos et la gravité

100 ans après la première formulation de la relativité générale par Einstein, une nouvelle cosmologie est sur le point d’être élaborée en décrivant une gravité différemment. La science se prépare sans doute à vivre un moment riche en intensité. La théorie d’Einstein risque d’être remplacée par une nouvelle théorie de la gravité. Evidemment, cette nouvelle ne conviendra pas aux nombreux physiciens qui utilisent la relativité générale d’Einstein pour faire leurs calculs et décrire une hypothétique histoire de l’univers commencée il y a 13 milliards d’années. Proposer à un physicien d’abandonner la cosmologie d’Einstein c’est comme suggérer à un théologien chrétien d’utiliser un nouvel Evangile. Mais si tel était le cas, le Dieu décrit dans cet Evangile ne serait plus vraiment le Dieu des chrétiens. Et donc, le cosmos décrit par la nouvelle théorie inclut une gravité qui n’est plus celle d’Einstein, laquelle n’était plus celle de Newton.
Cette nouvelle théorie n’a pas encore de nom définitif et n’est pour l’instant qu’une esquisse. Grâce à Agoravox, le grand public connaîtra, peut-être avant la plupart des physiciens, le séisme qui se prépare en cosmologie. Cette théorie a pour dénominatif en anglais « shape dynamics », traduit par dynamique des formes en français. Pour ma part, j’opterais pour une cosmologie des formes. La dynamique des formes est une théorie développée depuis les années 2010 par quelques jeunes physiciens sous la houlette de Julian Barbour, physicien vétéran alternatif qui n’a jamais adhéré à la relativité d’Einstein. Entre 20 et 30 articles ont été publiés depuis pour formaliser et développer la dynamique des formes. L’un des derniers est édifiant ; il est paru dans la Physical Review (Barbour, Koslowski, Mercati) et a été commenté dans quelques journaux car il ouvre des perspectives inédites. Au moment du big bang il y aurait eu une création de deux univers, l’un étant l’image miroir de l’autre avec une flèche du temps opposée et donc négative. Ces résultats laissent perplexes les physiciens et on le comprend car le dogme de la flèche du temps issu de la thermodynamique en prend un coup. Finalement, il se confirme que la gravité classique est incompatible avec la physique statistique autant qu’avec la théorie quantique et le champ de Maxwell. Et c’est une nouvelle gravité qui apparaît dans les conceptions de la cosmologie.
Dans un article paru en janvier 2015 sur le site de prépublication arXiv, Tim Koslowski fait le point sur la description de la gravité dans le cadre de la dynamique des formes. Son approche s’inscrit dans un cadre inspiré par le relationnisme de Leibniz. L’espace-temps n’a pas de substance. Il est une relation formelle accompagnée peut-être un « fluide » dont la nature physique reste à préciser. Koslowski décrit la dynamique des formes comme une description classique de la gravité faisant l’économie de l’espace-temps et de sa géométrie.
Du point de vue le plus général, la gravité décrit la dynamique du cosmos qui comprend les masses et l’étendue. Dans la relativité d’Einstein, la gravité prend la forme d’une égalité [géométrie] = [matière]. Le pôle géométrie est alors décrit avec des tenseurs et une métrique au choix. La description utilisée par Koslowski et ses confrères laisse tomber la géométrie classique en supposant et c’est audacieux que la gravité est décrite d’un point de vue fondamental par la dynamique des formes et non plus par la relativité générale. Pour bien saisir cette démarche, il faut préciser que si la géométrie spatiotemporelle d’Einstein est abandonnée, l’étendue n’en reste pas moins un élément du cosmos et c’est cette étendue qui est décrite classiquement.
La notion de description classique possède une signification précise en cosmologie contemporaine (après 1930). Le monde classique est distingué, pour ne pas dire opposé au monde quantique. Du point de vue phénoménologique, le monde classique est aussi celui qui nous permet d’être en relation avec le cosmos et entre nous. Pour être complet dans cette présentation rapide, il faut souligner que le monde quantique est « étranger » au monde étendu. Et que la relativité générale utilise une description classique non seulement pour la géométrie mais aussi pour la matière avec le tenseur impulsion énergie, T. Pour le dire sans détour, la physique connaît une crise de l’objectivité, à la fois dans l’univers quantique et dans la cosmologie où cette crise se situe au sein même de la description de l’étendue et de la gravité.
Je passe directement à la conclusion de Koslowski dont les investigations ont pour finalité d’étudier le rôle physique de la géométrie spatiotemporelle. Cette géométrie est une abstraction décrivant comment une matière fluctuante idéalisée se comporte dans un cosmos décrit par la dynamique des formes. Cette géométrie coïncide localement avec l’image spatiotemporelle utilisée en relativité générale. Ce résultat est déterminant car il suggère que la relativité d’Einstein pourrait être la description approchée issue d’une théorie plus fondamentale. La démarche de Koslowski consiste à introduire la matière quantique dans l’étendue des formes. Il y parvient non sans difficultés avec comme résultat intéressant l’émergence non triviale, à partir de fluctuations, d’un champ quantifié local vérifiant l’invariance de Poincaré, ce qui signifie un monde classique et quantique issu de la « nouvelle gravité ». La question qui maintenant doit être étudiée selon Koslowski est alors : « quelle est cette géométrie spatiotemporelle dont nous faisons l’expérience à travers la matière quantique ? ».
A cette question, une réponse possible est envisageable dans le cadre de la cosmonadologie quantique que j’ai esquissée en tant que nouvelle description, post-moderne et post-relativiste, de la matière et du cosmos (Après Newton et Einstein, la cosmonadologie quantique, soumis aux éditeurs). Cette géométrie n’est autre que l’étendue que nous percevons grâce à nos sens et dont nous avons conscience. C’est peut-être aussi un lieu dynamique permettant la propagation d’ondes informationnelles permettant aux masses de donner leur « position » (avec les neutrinos ?). La cosmonadologie quantique est une voie qui risque de conduire plus loin que la dynamique des formes avec laquelle elle partage l’abandon de la description d’Einstein. Dans l’équation [géométrie] = [matière] ni la géométrie ni la matière ne sont correctement décrites d’un point de vue fondamental. La relativité est valable en astronomie mais n’est pas adapté à la compréhension de la gravité. La géométrie n’influence pas la disposition des masses contrairement à l’explication classique tirée de la relativité générale. L’espace-temps d’Einstein est une illusion ontologique ! Mais aussi une réussite nomologique puisque la relativité permet de réaliser les bons calculs dans certaines situations astronomiques dans notre système local.
Ces quelques résultats ouvrent des voies inédites en physique. Quelques considérations déclinées en ouvertures conclusives méritent d’être mentionnées. (I) En premier lieu l’idée d’une nouvelle cosmologie prenant acte de l’abandon de la relativité générale qui n’est plus la bonne théorie pour décrire la gravité et qui devrait aboutir vers une description proche de ce que j’ai esquissé comme cosmonadologie quantique, description qui résulte des travaux sur la dynamique des formes que j’ai utilisés dans les chapitres 12 et 13 de mon essai. La gravité ne peut plus être traitée physiquement comme par le passé. Elle n’est pas une interaction fondamentale comme le sont les trois forces élémentaires du monde quantique. (II) Les physiciens en quête de théorie du Tout doivent réviser leur position. D’abord parce que la gravité n’est pas une interaction comme les autres, ensuite parce que la relativité générale n’est pas la bonne théorie qui décrit la gravité et c’est pour cette raison qu’elle n’est pas conciliable avec la théorie quantique. Si ma thèse est exacte, alors les deux voies standard visant à concilier la gravité classique avec le monde quantique doivent être abandonnées. D’ailleurs, ces deux voies sont en crise, que ce soit les cordes ou la gravitation à boucle, sans oublier la crise du trou noir illustrée par les dernières déclarations de Stephen Hawking. (III) La nouvelle gravité s’inscrit dans un paradigme de l’information et du computer gravito-quantique qui ordonne l’univers. Ce paradigme est aussi celui qui oriente les sciences biologiques. L’univers n’est pas une machine de Turing nous confie Seth Lloyd. Et j’ajoute, es systèmes vivants ne se réduisent pas à des ensembles régis par un computer classique !
Les recherches sur la nouvelle gravité sont incertaines. Elles peuvent nous conduire vers une compréhension des limites de la connaissance et au mieux n’apporter qu’un sens nouveau sans application dans l’existence humaine ou alors nous conduire très loin. Nous ne sommes peut-être pas des voyageurs sans destination sur cette terre, ni des créatures matérielles destinées à façonner les technologies pour trouver un improbable salut. Mais pour le savoir, il faut oser chercher. Etre curieux et savoir remettre en cause les certitudes les plus consensuelles qui ne sont pas forcément les plus solides. 2015 marque le début d’une grande révolution scientifique
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