Un irrésistible penchant philosophique me fait couper les cheveux en quatre, un indécrottable mauvais esprit me rend souvent taquin : j'en demande pardon aux lecteurs.
J'attends avec impatience vos remarques, contradictions et, pourquoi pas, approbations.
Je suis prêt à m’asseoir et à regarder. Mais ce faisant, je m’autoriserai à continuer à penser, si vous le voulez bien.
Que voulez vous dire par les exemples que vous proposez ?
Qu’ils révèlent l’injustice de certaines législations sur le mariage ? Dans ce cas, je ne peux qu’être d’accord avec vous.
Il me paraît que le mariage entre un homme et une femme, quels que soient leurs différences - de race ou autre - ne devrait pas avoir besoin de l’autorisation de quiconque. Là d’ailleurs gît toute la puissance libératrice de la révolution du mariage monogame, égalitaire et par consentement mutuel, promu essentiellement (mais pas seulement) par le christianisme
L’union des différences, dans la liberté, c’est justement cela le mariage, me semble t-il.
D’abord permettez moi de vous féliciter pour votre pseudo, qui rend hommage à un grand moraliste.
Quant à votre remarque, je vous réponds ceci :
En écrivant que les personnes homosexuelles ont le droit de « convoler avec qui bon leur semble », je n’indiquais pas une liberté sans limite, laquelle n’est accordée à personne. La suite de la phrase ( « ne sont soumises qu’à la contrainte commune à tous les citoyens : épouser une personne de l’autre sexe ») situait précisément cette liberté dans un cadre.
J’entends bien, cher Épicure, que la plupart des personnes homosexuelles, sans doute, ne trouvent pas dans le cadre de la loi actuelle, l’objet de leurs voeux. (Je suis également conscient de l’ampleur de la tâche qui fut celle d’ Épicure, votre homonyme, de déployer une sagesse du bonheur dans la limitation volontaire des plaisirs.)
Mais fait que leur inclination s’y satisfasse difficilement n’ invalide pas pour autant cette loi.
Mon propos, sans doute maladroitement exprimé (mais non mensonger), était précisément de pointer que la loi n’a pas vocation à faire plaisir à tout le monde, mais à poser les bornes d’un monde commun, viable.
Dans l’expression « raison égalitaire », je ne me positionnais nullement du côté des libéraux et contre les « égalitaires » socialistes ou socialisants. (Pour ne rien vous cacher, je suis favorable à un revenu maximum légal, parmi d’autres mesures implacables contre la ploutocratie.) « Égalitaire », sous ma plume, est à comprendre comme ceci : ce qui abrase toutes les différences et les hiérarchies, même les plus légitimes, et renonce à les penser. Dans le monde libéral, tout se vaut, puisque tout est mesuré par un critère unique : l’argent (ou, ce qui revient au même, l’efficacité). Il y a certes du plus et du moins (une Porsche vaut plus qu’une Lada), mais jamais qualitativement, encore moins ontologiquement, seulement quantitativement.
Cette « pensée pour ne pas penser », ce « sommeil de la raison », selon vos excellentes formules, s’accompagne d’un fantasme de toute puissance. La volonté prend toute la place que laisse la raison. Et elle devient ivre. Yes we can !
C’est en cela, je le suggérais, que le libéralisme reprend l’ambition, revendiquée au départ par une praxis classée à gauche, de l’auto-construction de l’homme, dans une indépendance envers tout donné. Castoriadis (cela me donne l’envie d’aller le lire, merci !) l’avait bien vu : c’est toute la démence du libéralisme contemporain. Horreur merveilleusement formulée par la saillie aussi bête que méchante de monsieur Bush.