Je ne dis pas que le billet les exonère, je dis que rien ne pourra les exonérer de leur responsabilité dans le crash, même pas une défaillance de l’ordinateur de bord ou du système d’injection, ou encore du défaut d’alarme (les avocats pourront s’amuser à attaquer Boeing là dessus mais ça ne tient pas la route).
Ce que je reproche au billet c’est de partir dans une dissertation sur la possibilité d’une « responsabilité technique » alors que le simple fait que la vitesse n’a pas été surveillée de près engage directement la responsabilité humaine des pilotes (y compris le 3ème, à un moindre degré, qui ose raconter qu’il ne voyait pas la piste pour justifier sa passivité). Facteur culturel ou pas, il y a un gros problème de « cockpit ressource management ».
Bcp de blabla pour rien. Quand on sait de manière certaine d’après les premiers éléments de l’enquête (boite noire des données de navigation) que l’avion était bcp trop lent, trop près de la vitesse de décrochage (alors qu’on doit maintenir une marge de 30%), il n’y a aucun cas de figure qui exonère complètement les pilotes : ils ont constaté le manque de vitesse bcp trop tard.
Le point essentiel ici c’est que dans une phase critique (ici dernière phase de l’atterrissage), qu’ils aient ou pas des aides de l’ordinateur de bord, les pilotes doivent surveiller la vitesse comme le lait sur le feu. Sinon ce serait un peu comme mettre le ’cruise control’ sur l’autoroute et en profiter pour pouvoir fouiller dans la boite à gants.
Les derniers éléments de l’enquête évoquent la possibilité d’un pb technique sur l’auto-throttle que les pilotes avaient engagé (a priori), mais panne ou juste confiance quasi aveugle ça n’exonère pas les pilotes d’une imprudence face à la chute de la vitesse. Au contraire, le (co)pilote en tant que formateur avait une responsabilité accrue dans la surveillance de ce paramètre essentiel. Sa ligne de défense est pitoyable : il aurait dû gérer un mauvais alignement avec la piste (et donc n’aurait pas été concentré sur les autres critères). A ce niveau de difficulté à multi-tasker c’est carrément criminel.
Donc vos analogies avec des défauts, corrigés depuis, ça défoule peut-être face à Boeing (les avocats des victimes travaillent plutôt sur une alarme de vitesse trop faible non mise en place malgré une recommandation d’il y a 10 ans) mais c’est très approximatif. Mais pas autant que les journaux qui ont titré aujourd’hui sur le « pilote qui ne voyait pas la piste »... alors qu’il s’agit du 3ème pilote qui n’a fait pas là que chercher à s’exonérer de sa responsabilité à intervenir s’il sentait un paramètre mal géré (ce qui renforce l’argument culturel que les pilotes asiatiques, en plus de trop faire confiance aux systèmes automatisés, sont trop respectueux de la hiérarchie pour lancer un contre-ordre si besoin).