Merci pour votre réflexion pertinente sur cette nouvelle météorite littéraire. Vous posez en effet avec pertinence la question du statut du texte. Tout lecteur, lorsqu’il se trouve confronté avec un texte, établit ce qu’on appelle en général un « pacte de lecture », à savoir qu’il se doit d’identifier la nature du texte et le point de vue de l’auteur/narrateur (selon le texte justement), ce qui lui apportera un deuxième éclairage à rebours justement sur ce qu’il va lire et ce qu’il a déjà lu. Or ici Yasmina Reza semble introduire une ambiguïté un peu gênante en se situant entre le journalisme et la fiction, de par le terme de roman qu’elle a choisi. Bien sur, il n’est pas interdit (au contraire) de faire des mélanges de genres, de se situer à la croisée des chemins, mais la grande question va être alors celle de la réception des lecteurs. Qu’attendent-ils du texte, et ces attentes seront-elles satisfaites ?
D’après ce que vous dîtes, on peu donc se demander si l’on est pas ici entre la biographie officielle, l’agiographie, ou le document. De même, on peut aussi se demander dans quelle mesure les découpes qu’elle a forcément opéré dans la matière accumulée au long de cette année ne vont pas former un nouveau récit, une nouvelle image du candidat/président. Dans tous les cas, c’est bien Sarkozy qui en sort vainqueur, car elle contribue à construire le mythe autour de sa personne (ce qui pose un autre problème d’un point de vue de déontologie politique).
Si le « coup éditorial » est fort probable, comme bien souvent avec ce type d’ouvrage (et considérant les pratiques des maisons d’édition), il est aussi certain que son omniprésence médiatique, à tous les niveaux (et même littéraire maintenant), tisse autour de sa personne une aura qui lui est forcément bénéfique. Il est en permanence sous les feux de la rampe : ami des stars, des auteurs, des victimes, des grands du monde, sur tous les fronts et sous tous les projecteurs... tant et si bien qu’il s’y brûlera peut-être un jour les ailes.