Docdory, je suis resté allusif car je ne voulais pas parasiter ton sujet et la discussion en écrivant le mot Eo qui provoque souvent des réactions virulentes. Mais c’est vrai que cette pression en faveur des anglicismes, et de la modernité qui irait avec, est liée à la question de la communication internationale, au besoin d’une langue internationale commune (nécessaire à mon avis, il suffit de voir les congrès et l’UE).
Je ne connais pas l’avenir, ni personne jusqu’à preuve du contraire. Une réponse ne peut provenir que de l’analyse du passé (un siècle) et du raisonnement, de l’analyse des structures de la langue. Par exemple, il est impératif que le mot « jsute, ou djust, ou djusto » porte la marque de l’adjectif, la finale en -a : « justa » (ou adverbe -e) ; Si certains un jour s’amusaient à l’italianiser, l’espagnoliser, l’angliciser, bref, le déformer, pourquoi pas, mais ça resterait une faute et un amusement oral ou à l’écrit un truc littéraire pour indiquer un parler bizarre (argot, parler « paysan », etc.), bref, ça resterait une faute et une bizarrerie, rien qui menace la langue.
Quant au passé, l’Eo a montré une remarquable stabilité de ses structures fondamentales, les seules en fait qui fassent l’objet de règles. Avec une diaspora éparpillée sur tous les continents, très minoritaire et donc communiquant difficilement avant Internet, tous ces handicaps auraient effectivement dû pousser la langue à une dialectisation rapide. Or, ce n’est pas le cas. La langue s’est quand même modifiée un peu, quelques tournures, quelques affixes spécialisés, de nombreux radicaux supplémentaires, mais le noyau dur est resté hyper-stable, j’aime bien la comparaison « le Linux des langues ». On est si peu habitués à la logique et la régularité dans le domaine linguistique ! Je m’étonne toujours que peu de scientifiques connaissent l’existence et les principes de l’Eo, eux qui devraient être les premiers à en comprendre le but : déduire plutôt que mémoriser sans fin, ou plutôt mémoriser sur une base logique. En révisant une racine, on révise entre un et dix mots, parfois davantage, tout simplement parce que les affixes sont déjà connus et d’usage régulier.
De tout manière, comme je l’écris souvent, le problème est en fait très simple : ce sera l’anglais, ou le plurilinguisme (qui à mon avis équivaut à l’anglais), ou encore un vrai plurilinguisme un peu utopique avec 5 ou 6 grandes langues, ce qui exigerait des efforts monstrueux, personnels et structurels, et promettrait une guéguerre angl-all-esp-chinois voire arabe-russe, etc, ou, dernière solution et pas la moins rationnelle : une langue auxiliaire simple et efficace.
Rendez-vous fin septembre si mon article passe.