A l’auteur,
Bonjour,
Quelques remarques à propos de votre article, contenant à mon sens des arguments pour le moins spécieux, en reprenant quelques uns de vos sous-titres.
« UN PRÉTEXTE »
- Vous déduisez de la clandestinité de l’opération dite « Arche de Zoé » une finalité inavouable de celle-ci, en affirmant que les familles d’accueil ne constituaient qu’un « prétexte ». C’est prendre le problème à l’envers, lorsque l’on sait que l’évacuation des enfants était illégale en l’espèce à partir du Tchad, tout comme leur hypothétique adoption l’aurait été à leur arrivée sur le territoire français.
Par ailleurs, ce qu’il faut bien appeler la « collecte » des enfants s’est fait au grand jour, mais sous le prétexte fallacieux d’un projet d’école au TCHAD. C’est donc la nature même de l’opération qui a été cachée, en bénéficiant ainsi de l’aval des autorités tchadiennes ainsi que du concours ponctuel de l’armée française sur place. De fait, je crois que vous dramatiser à l’excès, par votre suspicion, une histoire dont le caractère sordide se suffit déjà à lui-même.
Cependant, je vous rejoins sur l’utilisation du terme prétexte, s’il s’agit de préciser que l’aspect « humanitaire » de l’opération n’a été que l’alibi moral d’un égoïsme forcené, celui du « désir d’enfant » de certaines familles, mêlé de ce racisme de complaisance selon lequel le bonheur des gens doit se faire contre leur gré dès lors qu’ils sont d’une culture implicitement considéré comme irréductiblement rétrograde.
« UNE JUSTICE DIGNE »
Vous donnez au jugement rendu au Tchad des vertus pour le moins disproportionnées, en déduisant de celui-ci un verdict rendu contre l’Occident par l’Afrique. Je vous concède que les élans narcissiques de M. Sarkozy accrédite en partie votre propos sur la vision péjorative de la justice tchadienne. Mais en interprétant la sentence rendue au Tchad comme ayant « traduit la capacité désormais de l’Afrique à juger l’Occident en cas de nécessité », vous participez vous-même de cette présentation négative du droit tchadien, en laissant entendre que celui-ci a moins condamné les faits commis que ce que représentaient leurs auteurs de par leur « qualité » d’occidental.
Je comprends bien que ce symbole ait une certaine consistance, mais mettre celui-ci me semble une erreur majeure lorsqu’il s’agit d’argumenter sur la « dignité » de la justice tchadienne.
DE L’EXECUTION DE LA PEINE
Curieuse démarche que celle qui consiste à mettre sur le même plan le procès dit des « infirmières bulgares », dont on sait qu’il ne reposait sur aucun élément concret, à celui de l’Arche de Zoé, où les preuves de culpabilité de M.Breteau et Mlle Lellouch, pour ne citer qu’eux, sont accablantes. Aurait-il fallu que des innocents payent de leur liberté pour satisfaire votre désir de voire respecter envers et contre tout la souveraineté des Etats africains ?
La seule similitude avérée entre les deux affaires reste l’instumenalisation politique des inculpés.
D’UN SCANDALE A L’AUTRE
Vous dites : « Par ailleurs, le procès de l’Arche de Zoé a permis de réaliser combien le souci du rapatriement des accusés ou coupables est cher et urgent aux Occidentaux.
Autant Mme Sarkozy et d’autres personnalités occidentales se sont mobilisées pour le rapatriement des infirmières bulgares et du médecin palestinien de Libye, autant Monsieur l’a fait au Tchad récemment pour quelques membres de l’association Arche de Zoé. On sait que ce dernier avait manifesté même l’idée d’un deuxième voyage de rapatriement, qu’il n’a ensuite pas eu l’occasion d’effectuer.
Cette idée d’extradition, de transfert ou de rapatriement déjà si fortement ancrée chez les Occidentaux révèle bien comment la pensée occidentale actuelle (par mépris, par orgueil ou par paternalisme) conçoit mal encore l’emprisonnement d’un de leurs concitoyens en terre africaine. Est-ce là une bonne adaptation à l’ère si bien prônée de la mondialisation ?
»
Pour information, la CEDH s’oppose à l’extradition des individus condamnés à mort aux Etats-Unis, sans pour cela faire preuve de paternalisme envers les américains, mais parce qu’elle considère que le « couloir de la mort » constitue un traitement « inhumain et dégradant »(1), tout comme les travaux forcés...
(1) http://www.fiacat.org/fr/IMG/pdf/PdMTraitementcruelSBP010207.pdf.