La duperie.
Travailleurs, travailleuses, avez-vous remarqué que la plus belle victoire des patrons requins sur vous est de vous avoir divisés au point où l’ambiance au travail n’est plus que tracasseries et intrigues ? On vous presse, on vous pressurise, on vous insécurise, on vous angoisse jusqu’à vous emmener au bord de la dépression, voire dans certain cas au suicide. Ce n’est plus diviser pour régner mais atomiser pour contenir les esclaves rémunérés que l’on nomme : salariés ». Travailleurs, travailleuses, on a inventé l’ANPE pour employer du monde à l’intérieur d’un monde sans travail et minimiser ainsi le chiffre officiel du chômage. Un bon esclavagiste emploie toujours un séide, homme de confiance pris dans le nombre de ses esclaves pour exercer sur les autres une pression qui soit en rapport avec l’assurance de ses privilèges. Diviser pour régner, la formule n’a jamais été aussi évidente et cependant paradoxale dans une démocratie. Ave Marianne, ceux qui vont mourir te saluent. Le plein emploi est un rêve du passé ; c’était du temps où le savoir faire était dans les mains des travailleurs, travailleuses. Le savoir faire aujourd’hui est de la machine et la machine, le patron est parti avec ; il a délocalisé. Bien eus les ouvriers, les employés et même certains cadres ! Voilà que les syndicats réclament des augmentations de salaires en manifestant dans les rues alors que le travail est aux Chinois ou aux Roumains. Peut-on réclamer un salaire pour un travail qui ne nous appartient plus ? Le syndicalisme porte de vieilles œillères, il se bat sur un champ de bataille que l’ennemi a déserté depuis longtemps. En effet, le patron requin actionnaire majoritaire est sur un autre continent, il est parti avec la caisse dans un paradis fiscal. Il a pompé jusqu’à trente pour cent du bénéfice des entreprises, c’est à vous dégouter d’entreprendre quand la spéculation rapporte autant. Amis syndicalistes, c’est là qu’a été aspiré votre salaire. Travailleurs, travailleuses, apprenez la finance ! De votre soif de justice, donnez-lui des règles, une déontologie nouvelle. Entrez dans le monde de l’argent car c’est là que la bataille fait rage et qu’elle est désordonnée. Elle n’est pas aux mains de stratèges qui ont une vue à long terme pour le bien de l’humanité mais de requins patrons dont la vue à court terme, individualiste et vénale, mène irrémédiablement à la crise. Travailleurs, travailleuses et syndicalistes, ne restez plus dans une plainte adressée à l’Etat patron, il y a belle lurette que les politiques ne mènent plus le jeu. De plus, vous avez élu un suppôt du patronnât, un dévoué, un homme à sa botte ; voilà ce qui s’appelle tendre la perche pour se faire battre et ce qui rappelle la fable des grenouilles qui demandent un roi et élisent un héron. Faut-il donc que notre monde soit compliqué à plaisir et à dessein, travailleurs, travailleuses, pour que vos réactions répondent si peu à la véritable cause de vos ennuis ! Atomisés, distraits, « consommatisés », jamais anesthésistes ne surent mieux leur métiers que de notre temps. Il faut vous ébrouer de ces complications dans lesquelles on essaie de vous noyer et tous ensemble marcher vers la bourse où votre salaire a été confisqué, votre travail dévalorisé. Le temps n’est plus de s’occuper de l’arbre de Noël pour les enfants des employés de l’entreprise, le temps est de réclamer ce que la machine infernale vous vole subrepticement chaque jour. Mettez des bâtons dans les roues de cette machine ; soyez les chevaliers purificateurs du système, lui réclamant une part des actions, lui imposant des règles. Hommes inconséquents et pusillanimes, sortez de votre torpeur ! Les pseudo-réformes vont contre vous et n’ont rien à voir avec une véritable révolution qui apporterait réparation à la gabegie actuelle. Travailleurs, travailleuses, le temps est venu de vous impliquer dans l’argent, de mettre votre nez dans les entreprises et les banques pour y jouer les régulateurs incorruptibles. La rédemption de ce monde est entre vos mains ; réveillez-vous ! Le temps presse. Rétablissons le partage équitable ! Maintenant, si ce monde vous convient, si vous êtes au spectacle : bonne nuit les petits ! Bonjour les grands méchants loups ! Je plaisante, travailleurs, travailleuses, mais l’histoire n’est pas si drôle que ça.
A.C