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Commentaire de mike57

sur La discrimination positive pour mes petits enfants, je n'y avais pas pensé


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mike57 21 décembre 2008 18:28

"L’assassinat de la France expliqué à ma petite-fille"

Un

Un jour tu es revenue du collège, l’air maussade et préoccupé. Je t’ai demandé :

- Qu’est-ce qui ne va pas ? Tu t’es fait saquer par tes professeurs ?
Tu m’as répondu :

- Ce n’est pas avec les professeurs que j’ai des problèmes, mais avec les élèves.

- Ah bon ? Et lesquels ?
Tu m’as fait une réponse un peu biaisée :

- Tu comprends, j’en ai marre d’entendre certains dire que nous, les Français, on leur doit le respect.
J’ai réfléchi réfléchi et t’ai demandé :

- Mais qui dit ça ?
Tu me réponds sur le ton de l’évidence :

- Qui ? Des Arabes.

- Ah, bon ? Et comment tu sais qu’ils sont « arabes » ?
Là tu m’as fixé, un court moment interloquée, comme si je me moquais de toi.

- Parce que je le sais ! Tout le monde le sait ! Et d’abord c’est eux qui s’en vantent tout le temps.

- Bon. Admettons. Mais, suppose que tu n’aies jamais entendu parler d’eux, est-ce que, de toi-même, toute seule, tu les aurais reconnu comme un groupe différent des autres élèves, de Corinne, de Boris, de José et de toi par exemple ?
Tu as pris ton temps avant de répondre :

- Au début, je n’ai rien remarqué, mais, petit à petit sans m’en rendre compte, avant même que j’entende le mot « arabes », que j’y fasse attention, j’ai commencé à les repérer comme différents de nous et des autres.

- Qui « nous » ?

- Je ne sais pas…Hélène, Boris, José, Michel, Alain, moi… et même Tchang … et même Indira.

- Différents comment ?

- Euh …ben … D’abord, petit à petit, j’avais remarqué que d’une classe à l’autre, d’une année à l’autre, d’une école à l’autre, on retrouvait chez certains élèves les mêmes prénoms : Ali, Djamel, Moussa, Kamel, Mourad, Selim, Mustapha, Aladin, Mohamed, Ahmed ou Mehdi - ou d’autres qui sonnaient un peu comme ceux-là- que leurs noms de famille commençaient assez souvent par Ben, que ceux qui les avaient étaient, en général, plus bronzés, plus bruns de cheveux que ceux, comme nous, qui portaient d’autres noms et prénoms bien plus vairés que les leurs, et qu’ils se regroupaient entre eux. Et puis j’ai découvert que ceux qui se nommaient ainsi ne mangeaient pas de porc, alors que les autres et moi nous en mangions ; qu’ils faisaient le ramadan alors que les autres et moi ne le faisions pas, qu’ils détestaient ouvertement les juifs, etc. etc.
Tu as abrégé avec un geste vague.

- Et puis…
Tu t’es soudain arrêtée comme embarrassée.

- Et puis quoi ?
Tu as hésité et fini par lâcher tout à trac :

- Et puis, à partir d’un certain âge, ce sont eux les plus frimeurs et ceux qui nous embêtent ou, en tous cas, qui nous embêtent le plus méchamment et nous débitent des insultes et des cochonneries.
Je remarquais que tu étais passée au présent et je sentais que, pour parler familièrement, tu en avais gros sur la patate. Je t’ai encouragée :

- Allez, vas-y ! vide ton sac, c’est le moment. C’est bien tout ?

- Oui… enfin, non : j’ai aussi remarqué que dès qu’un autre qu’eux leur déplaît, ils se vengent en se mettant à le frapper à dix contre un et qu’en général ils prennent plaisir à persécuter les plus faibles. Ah, et puis quand il y en un pris la main dans le sac, même jusqu’à l’épaule, il se rebiffe toujours en disant ; c’est pas moi m’sieur !

- Ils font tous pareil ?
Tu as hésité :

- Non, pas tous. J’en connais qui sont sympas.

- Ah, tu vois bien. Tu ne peux pas ne pas en tenir compte.

- J’essaie d’en tenir compte, figure-toi.

- Et les José, les Paul, les Alain, les Boris, ils n’en font pas autant ? Ils ne les embêtent pas, les Arabes ?
Tu protestes avec véhémence :

- Non, jamais ! On n’est pas des skinheads. Et puis même, on n’est pas assez nombreux.

- Bon, bon, ça va ! Je te crois. Ta mère et moi qui avons été professeurs dans des établissements différents à une époque où les « Arabes » comme tu dis, étaient encore minoritaires dans les classes, nous n’avons jamais vu des non arabes, nombreux ou pas, les embêter. Les professeurs de notre entourage non plus. Et pourtant nous étions tous très vigilants. D’ailleurs, déjà, de mon temps, presque tous les délégués de classe étaient des « Arabes ». Je suis sûre que si tu pouvais vérifier dans les archives de ton école, tu pourrais faire la même constatation. Preuve que, à l’époque, contrairement à ce que l’on voudrait faire croire, les petits français comme toi, loin d’être racistes, les avaient à la bonne.*Ne parlons pas des professeurs qui se sont toujours défoncés pour eux bien plus que pour n’importe quels autres élèves, histoire de bien montrer à quel point ils n’étaient pas racistes, ainsi que tous les acteurs sociaux. Difficile de soutenir qu’ils baignaient dans le racisme. D’ailleurs il y en avait si peu à se mettre sous la dent, de racisme, que les antiracistes de profession ont été obligés pour justifier leur croisade - et leur salaire – de diaboliser une banale mesure de prévention policière : le contrôle d’identité en le rebaptisant, quand elle concernait les jeunes arabes : « contrôle au faciès » et en le montant démesurément en épingle.* Quant aux skinheads Quant aux skinheads, à entendre les journalistes, on avait l’impression qu’ils étaient des dizaines de milliers à terroriser les Arabes à travers toute la France. En réalité ils n’étaient pas deux milles et leurs méfaits, plutôt rares, ont été grossis à plaisir.

- De toutes façons, maintenant même si on avait envie de les embêter, on n’oserait pas : ils nous font trop peur.

- Mais pourquoi tu ne nous as jamais parlé de tout ça ?

- Parce qu’il aurait fallu parler d’eux et que personne n’en parle jamais - vous pas plus que les autres – comme s’il s’agissait d’un sujet défendu.
C’était vrai, nous nous étions fixés la règle de ne jamais parler de qui que ce fût devant toi en faisant référence à sa race.
Tu as poursuivi :

- On dirait, d’ailleurs, qu’ils font peur à tout le monde, y compris aux professeurs, y compris à eux-mêmes. J’en ai vu se cacher pour manger pendant le ramadan, de peur d’être maltraités par les autres. En tous cas, question de savoir qui ils sont, le problème ne se pose pas ou plus puisque, comme je t’ai dit, je les entends se vanter d’être arabes ou musulmans (c’est pareil) et dire que nous, les Français, nous leur devons le respect.
J’ai choisi de ne pas relever sur le moment cette dernière proposition.

- Non, ce n’est pas pareil : il y a des Arabes qui ne sont pas musulmans, mais chrétiens.

- Ah, bon. Je croyais que c’était pareil.

- Non. Musulman veut dire que tu adhères à la religion qui est l’islam. Arabe, veut dire que tu appartiens à la race du même nom. En fait c’est un peu pareil quand même parce que quatre vingt quinze pour cent des Arabes sont, effectivement, musulmans. Alors on peut confondre.
Tu as levé les yeux au ciel :

- Là, je ne comprends plus. Tu dis que « Arabe » c’est une race, mais le professeur d’histoire -géo et celui de biologie nous ont dit que les races n’existent pas.
A ce moment, j’ai senti que je ne pouvais plus te répondre du tac au tac. La discussion prenait une tournure trop sérieuse et trop délicate. Je t’ai dit que je m’en tiendrais là pour aujourd’hui, qu’il me fallait un peu de temps pour réfléchir et que nous reprendrions tout ça demain.


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