Jeux de l’argent et du hasard
Si le libéralisme économique n’a connu ni la terreur ni la révolution, c’est que le régicide est devenu d’autant plus problématique qu’il a multitude de têtes à faire sauter. Le système, on le sait, favorise les parasites de la finance, ceux qui font essentiellement profit de l’argent avec l’argent étouffant le travail et l’entreprise. L’actionnariat a quelque chose de diabolique en ce sens qu’il promet en hypothéquant l’avenir. L’épée de Damoclès ne reste pas suspendue, elle tombe, c’est fatal. Jusqu’à présent, nous avons vécu heureux sous cette épée en priant qu’elle tombe le plus tard possible mais nous n’avons pas envisagé la régulation qui aurait fait qu’elle ne pût tomber. L’homme prévoyant n’a pas encore été inventé. Le « chacun pour soi Dieu pour tous » ne permet pas de s’attarder à l’idée de sauver l’ensemble de l’humanité. La conscience planétaire est encore embryonnaire. Que fait-on ? On descend dans la rue pour « manifester », pour défendre un salaire, les privilèges d’une corporation. On ne descend pas dans la rue pour demander la formation d’une institution qui exercerait un droit de contrôle sur la richesse abusive et outrancière de certains sujets par rapport à d’autres dans le dénuement. Nous n’avons donc pas la manifestation généreuse et large d’esprit. Nous n’avons pas la manifestation constructive à long terme. L’individualisme, suivant une voix perverse, ne fait pas prendre conscience du devoir de régulation, autrement dit de la nécessité d’une déontologie à imposer dans la recherche débridée du profit à court terme. Si la base ne prend pas sa responsabilité pour imposer cette régulation, personne ne le fera. Quand le travail et l’entreprise sont assujettis à la spéculation dans des proportions telles que les deux sont dévalorisés, on peut se poser la question de réagir à de tels dysfonctionnements qui occultent les plus nobles valeurs. On sait ce que la crise de 29 avait engendré ; est-il trop tard pour éviter la venue d’un pseudo-sauveur à la paranoïa contagieuse ? Peut-on encore sortir du laxisme engourdissant d’un consumérisme sans réflexion ? Et si l’histoire ne se répétait pas cette fois ! La chance est mince de sortir du marasme quand on ne voit pas bien les priorités qui apporteraient une solution à la crise. Si solution il y a, elle ne sera qu’à l’échelon international, ce qui veut dire que ce n’est pas gagné, que la mobilisation pour le bon sens doit être inflexible. Les associations ne manquent pas en France. Il y manque juste une super-association du contrôle du partage des richesses pour la survie, et des riches et des pauvres. La troisième guerre mondiale n’aura peut-être pas lieu si on arrête de scier la branche sur laquelle nous sommes tous assis. Allez ! On peut rêver, non ?
A.C