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Commentaire de Vincent Jappi

sur L'Occident peine à réaliser ses buts de guerre en Bosnie…


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Vincent Jappi Vincent Jappi 5 novembre 2009 21:20

En tant que province autonome, puis en tant que royaume à partir de 1377, enfin en tant qu’ « elayet » de l’empire ottoman après sa conquête au XV° siècle, la Bosnie-Herzégovine a une continuité historique quasi-ininterrompue depuis le XII° siècle ; alors que la Serbie, née à la même époque, a entièrement disparu dans l’empire ottoman entre 1459 et 1718, puis de nouveau de 1737 à 1817. 

Jusqu’au massacre de Srebrenica de juillet 1995, l’OTAN a EMPECHE l’Etat de Bosnie-Herzégovine de s’armer en imposant, à l’instigation des gouvernement français et britanniques complices de Milošević l’embargo sur les armes voté le 25 septembre 1991 par le Conseil de Sécurité des Nations Unies. 

Dans un jugement de procédure, en l’espèce du 16 Juin 2004, la chambre de première instance du Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie a conclu qu’ 

 « il y a des preuves suffisantes qu’un génocide a été commis à Brčko, Prijedor, Sanski Most, Srebrenica, Bijeljina, Ključ et Bosanski Novi », 

poursuivant pour affirmer qu’elle 

« pourrait être convaincue au-delà de tout doute raisonnable que l’accusé [Milošević] a participé à l’entreprise criminelle commune » 

qui avait 

 « pour but et pour intention de détruire une partie des Musulmans de Bosnie en tant que groupe. » 

Le 12 Juillet 2007, la Cour Européenne des Droits de l’Homme a confirmé la condamnation pour « génocide » de Nikola Jorgić, chef paramilitaire serbe en Bosnie par les juridictions allemandes. 
C’est pour « génocide » dans la région de Doboj en 1992 que Jorgić avait été condamné en Allemagne. 

Et si, y a un an, la Cour Internationale de Justice a acquitté la Serbie de complicité dans le génocide en Bosnie, c’est parce qu’elle avait REFUSE de se procurer les preuves nécessaires, à savoir les procès-verbaux non expurgés des réunions du Conseil supérieur de défense (Vrhovni Savet Odbrane) de la République Fédérale de Yougoslavie. 

Que ces transcriptions PROUVENT l’intention de la République de Serbie de commettre un génocide contre la population non serbe de Bosnie-Herzégovine de 1992 à 1995 est apparu au procès de Milošević devant le TPIY : les juges avaient pu y disposer des procès-verbaux en question lorsqu’ils ont déterminé qu’il y avait assez de preuves pour condamner l’accusé, non seulement pour le génocide de Srebrenica en 1995, mais encore pour les autres génocides commis depuis 1992. 

Le TPIY a condamné Florence Hartmann pour « outrage à magistrat », parce qu’elle a attiré l’attention sur ces preuves et divulgué leur occultation lors du procès devant la Cour Internationale de Justice. 
Ces preuves, on ne saurait douter, maintenant que l’affaire est éventée, que le procès de Karadžić permette de les examiner de nouveau puisque le TPIY, à la différence de la CIJ, les a en sa possession. 

Il permettra de rappeler que la soi-disant « Republika Srpska », territoire disparate sur lequel il n’y avait que 51 % de Serbes en 1991, est née de l’extermination de ceux qui ne l’étaient pas. 
Il permettra aussi de prouver qu’elle est née de l’agression internationale, derrière le faux nez transparent d’une prétendue « insurrection locale ». 
Permettra-t-il enfin de mettre en cause l’existence de cette soi-disant « Republika Srpska » née de l’agression et du génocide ? Rien n’est moins sûr. Si les Occidentaux savaient ce qu’il faut faire, et surtout s’ils en avaient la volonté, Milorad Dodik aurait été démis depuis longtemps et a fortiori arrêtés les assassins génocidaires qui circulent toujours librement. 
Mais le problème de la Bosnie-Herzégovine, c’est qu’elle n’a eu jusqu’à présent aucun intérêt stratégique ; de sorte que la volonté n’y est pas. On verra si, poussée par ses peuples libérés de l’occupation soviétique l’Union Européenne se réveille face aux tentatives d’infiltration du régime de Putin dans les Balkans. 

Florence Hartmann est la meilleure spécialiste française de ces questions puisqu’elle était journaliste à Belgrade au moment où Milošević a déclenché ses multiples agressions et qu’elle a ensuite été porte-parole de Carla Del Ponte, « Procureure » du TPIY. Voici ce qu’elle écrivait en 1998 : 

« À l’automne 91, alors que la guerre faisait rage en Croatie (en dépit des promesses de Milošević), le chef du gouvernement yougoslave, Ante Marković, présenta aux Occidentaux les preuves de la préparation militaire du dépeçage de la Bosnie-Herzégovine. Des enregistrements téléphoniques révélaient l’existence de contacts entre la JNA, Slobodan Milošević et Radovan Karadžić visant, par l’armement des populations serbes et la planification d’une intervention directe de la JNA, à permettre la prise de pouvoir du SDS sur une grande partie de la Bosnie (plan RAM). Les grandes puissances savaient, par conséquent à l’avance, que Slobodan Milošević avait mis en oeuvre son projet grand-serbe, qu’il tenterait de légitimer avec la complicité de Franjo Tuđman qui aspirait à construire une grande Croatie. »Pourquoi les plans de Slobodan Milošević n’ont-ils pas été déjoués ? Pourquoi les chancelleries ont-elles feint de croire que Milošević voulait préserver la Yougoslavie ? Peut-on émettre l’hypothèse de complicités inavouées semblables à celles récemment dévoilées au Rwanda par le Figaro ? 
« Lorsqu’en 1992, le conflit déborde sur la Bosnie, Européens et Américains connaissaient jusque dans les moindres détails les objectifs de Slobodan Milošević... 
 »Pourquoi se soustraient-ils au devoir international de défendre l’intégrité territoriale d’une république qu’ils viennent de reconnaître et qu’ils savent victime d’une agression en règle ? 

« Pourquoi, malgré l’ampleur des massacres dont ils ont la preuve formelle dès les premiers mois de la guerre en Bosnie dans la Vallée de la Drina (photos et témoignages HCR dès avril), à Brčko (photos dès mai), et la région de Prijedor (alertés fin juin) ne parviennent-ils pas à définir une politique commune afin d’empêcher la violence de se perpétuer ? Pourquoi étouffent-ils le scandale du génocide aujourd’hui confirmé par les actes d’accusation du TPI contre Radovan Karadžić et Ratko Mladić ? 

 »... Parmi les avocats obstinés de la cause grand-serbe, on compte des députés, des écrivains, des hommes d’affaires, des militaires... Tous ont effectué des voyages à Belgrade ou à Pale pour rompre l’isolement international des chefs de guerre serbes et les soutenir dans leur combat contre l’expansionnisme islamique« (d’où la fréquente superposition des lobbies irakiens et serbes). La plupart n’ont pas hésité à vanter leurs liens privilégiés noués avec des dirigeants inculpés depuis pour génocide. 
 »Notamment le Général Gallois qui, dans une lettre adressée au « magnanime » Ratko Mladić, assurait qu’il se serait battu à ses côtés si l’âge ne l’en avait pas empêché. À la retraite, il a néanmoins dispensé ses conseils tout au long de la guerre aux militaires français engagés dans les forces de l’ONU en ex-Yougoslavie. 
Un haut fonctionnaire de la Mairie de Paris se targuant de pouvoir faire libérer des otages français (de l’association humanitaire Première Urgence) s’adressait quant à lui à Radovan Karadžić par un « Monsieur le Président et Cher Ami ». 
Dans son message daté du 14 avril 1994 et remis à la presse, il ajoutait : 

« leur détention n’améliorant en rien la situation déjà suffisamment pénible qui prévaut entre nos deux pays et que je regrette profondément » 

(de quel pays parlait-il ?!). 

« ... On peut s’interroger sur le rôle qu’a éventuellement joué Yves Bonnet, ancien chef de la DST (82-85), qui cumulait pendant le conflit le poste de président de l’association Serbie-Monténégro Terres d’Europe et celui de président de la Commission des Affaires Etrangères à l’Assemblée Nationale. 

 »... Autant d’interrogations qui méritent des réponses si l’on souhaite lever le doute sur les véritables raisons des atermoiements des grandes puissances pendant la guerre en ex-Yougoslavie." http://docs.google.com/Doc?id=dc2m8p62_145fnw9gffc&nbsp ;

Des spécialistes de la région, qui sont prêts à répondre à tous les mensonges des impérialistes serbes qui n’ont pas désarmé, les exploits du camarade Milošević et de sa bande en ont fait naître bien d’autres, et ils n’ont rien oublié. 


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