Mon ami JF Chalot a bien lu mon livre (illustré) concernant mon passage à l’École normale d’Instituteurs de Rouen de 1951 à 1955.
A cette époque, nous ne portions plus l’uniforme mais la blouse grise que nous pouvions retirer au cours de nos sorties (le temps était passé des sorties en rangs !).
Les EN avaient cependant encore un côté « séminaire laïque ». Et nous avons plutôt mal vécu notre enfermement, et pour les plus intellos d’entre nous, notre formation à l’écart des autres jeunes gens de notre âge.
Nous avons tous regretté l’inadéquation de notre formation théorique à la réalité des classes dont nous aurions à nous occuper. Les classes d’application(ou nous assistions à des « leçons-modèles » et où nous allions en stage) étaient souvent bien artificielles, formées d’élèves triés sur le volet, alors que les autres étaient affectés à des classes « faibles ».
Mais au moins, à cette époque, un enfant du peuple pouvait devenir instituteur et même quelquefois professeur, en passant par les ENS de St Cloud ou de Fontenay-aux-roses.
L’un de nos profs, ancien élève de notre EN, André Vigarrié, est devenu est éminent géographe universitaire. L’un de nos pions, ancien élève de notre EN lui aussi, Marcel-Vincent Postic, a fait une brillante carrière universitaire avant de devenir expert au Ministère. On se souvient aussi qu’auparavant, l’écrivain Pierre-Mac Orlan avait été élève dans notre EN et Jean Anglade est passé lui, juste avant la guerre, à l’EN de Clermont-Ferrand...
Nous étions boursiers complets et fonctionnaires stagiaires rétribués pendant notre formation professionnelle...
Évidemment, depuis la relative démocratisation de l’enseignement secondaire ouvert à tous dans les CES, tout au moins, la préparation spécifique des futurs instits au bac dans les EN ne s’imposait plus. D’où la suppression des classes pré-bac (cependant, ma fille a passé le concours d’entrée à la fin de la 3ème vers 1975 et a intégré l’EN après son bac, préparé dans le lycée de secteur).
La transformation des EN en IUFM aurait pu être une bonne chose si l’on n’avait pas cru que l’important était une formation universitaire de haut niveau pour tous (revendication catégorielle du Syndicat des Instituteurs pour permettre l’accès des enseignants de primaire à la catégorie A, celle des profs). Et si un certain scientisme n’avait pas gagné la formation professionnelle, donnant une image caricaturale des « sciences de l’éducation » avec un jargon ridicule dont on a trop facilement moqué les excès, si bien que le discrédit a gagné toute la formation pédagogique. Pour trop de nos contemporains, il suffit de bien maîtriser les « humanités » pour savoir les enseigner... On aurait pu réformer les IUFM. Leur suppression ne va certainement pas faciliter la pratique professionnelle des futurs professeurs d’école !
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