Chantecler, vous méconnaissez la pratique quotidienne. Nous sommes en première ligne, angines, otites, plaies, bronchites ou autres plus graves (exemple phlébites), le dépistage et le courrier fait au spécialiste lorsque nécessaire ne sont nullement déshonorants, c’est un partage des tâches. Effectivement, se pose la question du temps, surtout pour les généralistes des zones sous-médicalisées, mais ce n’est pas le seul point. Vous semblez considérer exclusivement une souffrance profonde, et demander une écoute longue similaire à une consultation ou séance psy-quelque chose (psycho, psycha, psychia) - encore faudrait-il que nous soyons rémunérés de même pour cette séance, ce qui nous est interdit.
Mais surtout, la souffrance morale semble inhérente à la condition humaine, de même que la frustration, car le monde n’est pas conçu pour satisfaire ni nos besoins, ni nos rêves, il y a donc un travail au quotidien, sur le suivi des patients, qui ont par moments des coups de déprime comme on dit, liés à la maladie ou pas, et sur lesquels nous pouvons influer par l’écoute, les conseils ou les médicaments ; il y a aussi le suivi et le dépistage de certains problèmes, surtout chez les enfants. Quelques mots glissés à l’enfant sur sa non-responsablilité dans le divorce de ses parents, par exemple, prend une minute, et peut prévenir des souffrances morales futures, quand on sait que le sentiment de culpabilité est très fréquent dans toutes sortes de circonstances.
Les grandes et longues séances ritualisées, utiles pour certains qui veulent creuser, approfondir, intellectualiser, n’excluent pas l’utilité de la médecine générale. On ne va pas tomber dans la psychiatrisation de tous les coups durs de la vie, ou des cellules psychologiques à envoyer pour tout deuil, divorce, chômage, ou les nombreuses situations de souffrance psychologique.