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Commentaire de Luc-Laurent Salvador

sur La vie serait une propriété émergente de la physique (et non de la chimie)


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Luc-Laurent Salvador Luc-Laurent Salvador 9 décembre 2010 22:26

A l’évidence, l’auteur est sensible à l’hypothèse d’un primat du physique.
Ce qui l’aveugle sensiblement sur la complète immaturité et incohérence de ladite hypothèse.
Il peut ainsi écrire sans sourciller :

"Or l’on pourrait imaginer que les lois physiques relevant de l’aléatoire quantique puissent faire « émerger » des formes prévitales (prébiotiques) qui seraient d’abord de nature physique, puis ensuite biologiques« 

sans voir la dose de pensée magique qu’il faut pour imaginer cela. Sans voir la sophistique oiseuse qui consiste à dire c’est du (pré)bio (pour de vrai, si, si) mais c’est pas du bio.
Les seules questions qui ici importaient ont été éludées par les auteurs de l’article princeps et par M. Basquiat. Ce sont les suivantes :

  • quelle défintion de la vie ?
  • Quelle limite entre le vivant et le non-vivant ?
  • Quelle limite entre la chimie et la physique ?

Aucune de ces questions n’est réglée et certaines ne le seront peut-être jamais (comme la frontière entre l’animal et l’homme). Dès lors la pensée magique façon »émergence par effet quantique« a de beaux jours devant elle.

Et s’émerveiller devant le fait que »la matière condensée n’a pas encore livré tous ces mystères« n’est encore qu’un écran de fumée pour masquer le fait qu’on a pas eu droit à la moindre hypothèse sérieuse, concrète, d’émergence par effet quantique d’un machin qui pourrait être (pré)biotique en quoi que ce soit.

La cerise sur le gateau, c’est la prétention à (dé)montrer que le darwinisme serait trop limité. La tirade sur les »minimum locaux« traduit une naïveté certaine, comme la mise en avant de l’enzyme comme condition sine qua non du vivant.

Le darwinisme n’est pas limité pour une très bonne raison : c’est une tautologie. Et une tautologie est toujours vraie. C’est donc le cas du principe darwinien qui, selon Gregory Bateson, peut s’exprimer comme le fait que »ce qui est vrai plus longtemps reste en effet vrai plus longtemps que ce qui reste vrai moins longtemps« . En plus clair si vous voulez : »ce qui dure plus longtemps, dure en effet plus longtemps que ce qui dure moins longtemps". C’est le principe source de la reproduction différentielle qui n’est autre que le mécanisme darwinien lui-même.

Et vous l’aurez noté, cette tautologie se fout de savoir de quoi elle traite. Elle est vraie pour tous les niveaux, du physique au biologique. En l’’essence, la vie n’est que cela : une reproduction différentielle. Elle peut parfaitement commencer à un niveau physique. Mais elle n’ira jamais bien loin s’il n’y a pas l’invention d’un système d’écriture, ARN ou ADN, bref, elle n’ira loin (ce qui dure) que si chimie et biochimie entrent en jeu. CQFD

Pour conclure je dirais que je n’ai pas connaissance d’un physicien ou d’un mathématicien qui ait apporté quoi que ce soit de déterminant à la théorie de l’évolution. Même si la contribution de Fisher est très respectable, elle n’a rien d’indispensable pour la biologie (aussi utile qu’elle ait été à cet affreux réductionnisme que fut la biologie moléculaire).

C’est très facilement qu’un mathématicien pourrait croire en toute sincérité avoir mis sa mère en équation. Il restera toujours la preuve vivante qu’il se trompe.


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