Re bonjour,
Pour ceux qui auraient encore des illusions sur la « bonté » de l’homme
Qui de vous connait l’expérience de Stanley Milgram... ?
Torture et
obéissance, soumission à l’autorité - Stanley Milgram
http://www.psychoweb.fr/articles/psychologie-sociale/218-torture-et-obeissance-soumission-a-l-autorite-stanley-mi.html
Section : articles, Catégorie : psychologie sociale
Proposé par Stephane Desbrosses, le 21-12-2007
Stanley Milgram, l’un des auteurs les plus célèbres en
PsychologieAu cours des années 1960, des recherches sur la soumission en
l’autorité ont été menées par le sociopsychologue Milgram, de l’Université de
Yale. Dans une expérience ahurissante et non moins intéressante, il invitait
des sujets par groupe de deux et les faisait procéder à un tirage au sort. l’un
se voyait affublé du rôle de maître, et l’autre celui d’élève.
Expérience choc
Milgram annonçait alors à ses sujets « maître »
qu’il désirait étudier les effets de la punition sur l’apprentissage de
syllabes à mémoriser. Il attendait d’eux qu’ils jouent le rôle de « maître »,
chargé de punir « l’élève » de plus en plus sévèrement pour chaque erreur
commise. Il les plaçait alors devant une série de boutons, dont la manipulation
déclenchait l’émission de chocs allant de 15 à 450 volts (ce dernier voltage
étant capable d’occasionner de grandes souffrances et des dommages physiques
importants. A vrai dire, un simple choc de 24 volt peut entraîner la mort).
Quant à « l’élève », il était assis dans une pièce voisine, sur un
siège bardé de fils électriques.
Milgram avait insisté, auprès des sujets « maîtres » sur le
fait que l’usage des chocs constituait la partie essentielle de l’expérience,
et que celle-ci ne vaudrait rien si ses ordres n’étaient pas suivis.
A noter : Avant l’expérimentation, Milgram estima qu’un
tiers des sujets iraient jusqu’à 300 volts. Ces proches trouvaient déjà cette
estimation trop prétentieuse. Il n’était même pas question pour l’auteur de
songer à ce qu’un seul puisse aller jusqu’à 450 volts tellement cela semblait ridicule.
Parfois, dans notre belle discipline qu’est la psychologie
sociale, les résultats font mal... Les résultats de cette expérimentation sont
de ceux-là : les deux tiers des sujets « maîtres » allèrent jusqu’au bout, se
soumettant complètement à l’autorité de l’expérimentateur, qui n’avait pourtant
aucune possibilité de les punir ou de les récompenser.
Maîtres cobayes et élèves simulateurs
On vit ainsi d’honnêtes pères de famille et des gens
paisibles, envoyer à l’élève, malgré ses gémissements, des décharges de 75
volts, puis, malgré les supplications du sujet, des chocs allant de 150 à 300
volts, voir 450 volts, intensités qui entraînaient des hurlements de douleur de
la part de l’élève. Et cela, simplement parce que l’expérimentateur, placé à
côté du « maître », lui ordonnait de poursuivre l’administration de décharges
électriques. (En réalité, l’ « élève » ne recevait pas de décharge. il
s’agissait d’un compère qui fournissait volontairement des réponses inexactes,
et simulait la souffrance. Le tirage au sort était truqué : le compère était
toujours choisis comme « élève »... Belle discipline que la notre,
disais-je précédemment.).
Des chercheurs du Moyen-Orient refirent l’expérience à
l’université de Jordanie auprès de jeunes sujets de 6 à 16 ans ainsi que
d’universitaires et ils trouvèrent, malgré les différences culturelles, un
pourcentage de 65 %, identique à celui obtenu à Yale.
Il faut donc accepter l’évidence : près de deux personnes
sur trois, lorsqu’elles sont confrontées directement à l’autorité, sont prêtes,
semble-t-il, à obéir aveuglément.
Expertise et docilité
Mais qu’advient-il lorsque l’ordre de poursuivre est
communiqué non plus directement, mais à l’aide d’un interphone par exemple, ou
lorsque l’expérience doit se dérouler en l’absence momentanée de
l’expérimentateur ? il apparaît que dans de telles conditions, le pourcentage
de sujets « obéissants » tombe à un peu plus de 20 %. Il semble donc que les
conditions de soumission se modifient, dès le moment où le libre arbitre de
l’individu a la possibilité de se manifester.
Qu’en est-il alors des personnes appelées à fonctionner dans
des institutions régies par des règles strictes, et soumises au pouvoir quasi
absolu d’une minorité « d’experts » ? Des chercheurs (Hoffling et al., 1966)
tentèrent de l’observer auprès des infirmières, responsables chacune d’un des
22 services rattachés à deux hôpitaux, l’un public et l’autre privé. Les
résultats de cette expérience montrent un pourcentage réellement impressionnant
de soumission docile à un supérieur hiérarchique (ici, c’était un médecin, En
savoir plus sur cette expérience ?).
Milgram a montré, lui aussi, que lorsqu’un sujet sait qu’il
n’a qu’un rôle d’intermédiaire et qu’il ne peut donc être directement tenu pour
responsable de l’acte posé, le taux de docilité monte à 90 %. Alors, que
conclure ? Doit-on désespérer devant de telles constatations, en se disant que
la soumission à l’autorité est bel et bien inscrite dans la nature humaine ?
Assurément non. Des recherches ultérieures ont montré que lorsque les sujets
étaient en présence d’autres individus refusant d’obéir, ils refusaient à leur
tour de le faire, dans une proportion de 90 %.
Il semble donc que l’espoir repose et continue de reposer
sur la présence d’individus ou de groupes oeuvrant sans arrêt à dénoncer les
abus et l’injustice, afin de servir de contrepoids aux tendances à l’apathie et
à la soumission, qui caractérisent la majorité.
A méditer...
Stephane Desbrosses