Christopher Lash : « La culture du narcissisme » (Wikipédia) :
Lasch assoit son analyse sur des études cliniques de cas psychiatriques (p. 68-69).
Il note une évolution dans les diagnostics. Les psychiatres ne sont
plus confrontés aux symptômes classiques décrits par Freud (hystéries,
névroses obsessionnelles) qui résultaient du contexte des premiers
stades de développement du capitalisme marqués par une forte répression sexuelle, le culte de l’effort et du profit. Aujourd’hui les psychiatres ont de plus en plus affaire à des cas limites ou pré-schizophrènes, mêlant psychose, névrose et désordre narcissique. (p. 73) Lasch cite un psychiatre américain (Joel Kovel) qui analyse ainsi ces cas limites : alors qu’autrefois la pulsion infantile était réprimée par l’autorité patriarcale,
la pulsion est désormais stimulée et pervertie mais aucun objet
convenable n’est donné pour la satisfaire, ni des moyens cohérents de
contrôle. Le complexe, se manifestant dans un environnement aliéné mais non répressif, perd la forme classique du symptôme et donc l’occasion d’appliquer la thérapie qui consiste à rétablir la conscience d’une pulsion (p. 75). Les cas limites se caractérisent par un sentiment d’insatisfaction et de vide dépressif, une difficulté à s’entendre avec autrui, une dépréciation des autres, une crainte de la dépendance, de violentes oscillations dans l’estime de soi, « ils
évitent les engagements intimes qui pourraient les libérer de leurs
intenses sentiments de rage. Leur personnalité n’est guère qu’un
ensemble de défenses contre cette rage […] » (p. 69).