Alors si je lis entre les lignes, en gros vous reprochez à tous les parents adoptants que vous connaissez de ne pas être parfaits... Mais croyez-vous que les parents tout court, à savoir qui mettent au monde des enfants et les élèvent par la suite, sont parfaits ?
Figurez-vous qu’il y a beaucoup de gens qui ont été élevés par leurs parents biologiques, dans des familles a priori équilibrées, et qui ont eux aussi développé des tas de problèmes psychologiques. Croyez-vous que les violences, physiques ou psychologiques, n’existent pas dans les familles classiques ?
Ce n’est pas seulement l’adoption qui est un terrain complexe, mais tout simplement la relation entre parents et enfants. Et cela inclut les parents adoptants, évidemment.
Ensuite, qu’il y ait des choses spécifiques dans le vécu des enfants adoptés, c’est une chose. Je ne vais pas m’aventurer à dire lesquelles car je n’ai pas vécu cette situation. Mais vous savez, dans toutes les familles, il y a des problèmes. Par exemple, les secrets de famille font des ravages, ce n’est pas une nouveauté.
Par ailleurs, j’ai quelques réflexions à faire sur les anecdotes que vous citez :
"J’ai vu, à Paris, à la terrasse d’un café, une mère adoptante (âgée d’au moins 45 ans) d un petit garçon noir de 5 ans environ ; tout occupée à discuter avec un couple d’amis, elle lui prêtait , pour le moins, une attention distraite, accueillant chacun des " cadaux qu’il venait lui faire, (feuilles ou cailloux) avec le même sourire " forcément gentil mais, au fond, profondément indifférent...«
Alors là c’est le ponpon ! De quel droit jugez-vous cette femme et sa relation avec son fils sans les connaître ?
J’imagine que vous faites partie des gens qui considèrent qu’une »bonne mère« est une mère dont l’attention est centrée à 100% et à chaque instant sur son enfant ! Du coup, comme vous avez pris celle-là à un moment où elle discutait avec des amis, vous en avez tout naturellement déduit qu’elle n’était pas une bonne mère.
Plusieurs questions me viennent à l’esprit à partir de cette anecdote tout simplement révoltante :
- Déjà, est-il humainement possible d’être attentif à 100% à son enfant, biologique ou adopté, à chaque instant ? C’est pas parce qu’on est mère qu’on n’est plus un être humain qui a besoin de discuter de temps à autres avec ses amis. C’est quoi ce discours culpabilisant ?
- Deuxième question : est-ce que c’est sain, une mère qui est à 100% attentive à son enfant en permanence ? Je comprends quand c’est un bébé, mais quand c’est un enfant de 5 ans, non ce n’est pas sain. A 5 ans, un enfant a déjà son univers. Pour ma part, c’est l’âge où j’ai commencé à inventer des personnages et à écrire leurs histoires.
Au risque de vous choquer, j’affirme qu’il est essentiel pour un enfant de comprendre qu’il y a des moments où ses parents sont occupés et que, dans ce cas, il doit s’occuper tout seul. Il est bien entendu indispensable que les parents et les enfants communiquent, partagent des activités, jouent ensemble et tout, mais il est également vital que l’enfant apprenne à faire face à l’ennui : ça lui permet de développer ses ressources personnelles, son imaginaire, tout cela en vue de devenir un jour un adulte, tout simplement. Parce que l’éducation, c’est aussi ça : apprendre à l’enfant à devenir un jour un adulte indépendant. Ce genre de situation que vous décrivez fait partie de ces petites choses, de ces petits riens qui permettront un jour à l’enfant de prendre son envol pour devenir un être responsable et autonome.
Au passage, je ne connais pas cette mère et son petit de 5 ans, mais s’il venait lui apporter des »cadeaux« , ça laisse plutôt présager d’une bonne relation puisqu’il avait manifestement envie de lui faire part de ses découvertes.
Suite de citation :
»J’ai deux collègues qui, ne pouvant avoir d’enfants, ont adopté des
enfants originaires d’Afrique : des collègues dont je ne peux mettre en
doute les qualités de coeur, les ayant vues à l’oeuvre dans leur
enseignement...ces enfants, par la suite, ont eu de gros problèmes...«
Déjà, votre regard sur vos collègues n’est pas des plus bienveillants : vous ne mettez pas en doute leurs qualités de coeur mais vous vous permettez quand même de les juger en tant que parents, de leur accorder un traitement spécial en quelque sorte, tout ça parce qu’ils ont adopté. Vous partez du principe que c’est parce que l’enfant est adopté qu’il a ces problèmes, mais qu’en savez-vous ? Que connaissez-vous des liens qui unissent les membres de cette famille ? Si vous voulez que votre interlocuteur valide le lien de cause à effet que vous pointez, faut développer un peu plus votre argumentation.
Mais ce qui me révolte le plus dans votre intervention, c’est ça :
»Cependant, je me demande si, au lieu de « s’approprier » à vie un petit
être venu d’ailleurs, il ne vaudrait pas mieux l’aider à rester sur sa
terre natale en lui allouant une allocation qui lui permette ainsi qu’à
sa famille de manger à sa faim et d’aller à l’école : je sais que des
associations existent dans ce but mais j’ignore si leur action est
toujours bénéfique.«
Vous savez l’impression que ça me donne, quand je lis les termes de »petit être venu d’ailleurs« et »terre natale« ? Ça me donne l’impression que vous parlez d’un animal !!! Je traduis : qui sommes-nous pour mettre les animaux de la jungle dans des zoos plutôt que de les laisser dans leur environnement naturel ?
M’enfin bon, on parle d’adopter et d’élever des enfants, là, pas de mettre un singe en captivité !
Que vous soyez critiques quant à la manière dont se fait le processus d’adoption, je le comprends très bien et je suis prête à vous suivre là-dessus. Mais vous ne pouvez pas prendre de haut tous les parents adoptant et balayer d’un revers de main toute la démarche, avec tout l’investissement humain qu’elle requiert dès lors que la sincérité est au rendez-vous.
Quant à la solution de l’allocation, elle fonctionne si les parents biologiques s’occupent vraiment de leurs enfants. Mais si celui-ci se retrouve abandonné, vous pensez que c’est humain de se contenter de lui allouer une somme d’argent ? Je trouve cette solution très froide. A part bien sûr si l’enfant atterrit dans un orphelinat idyllique comme on en voit dans les dessins-animés (quoique pas dans tous, j’ai vu récemment la série »Hinamizawa : Le Village Maudit" et ce qu’on y montre des orphelinats japonais des années 60 est assez terrifiant).
Sinon, on est d’accord qu’il faut favoriser la construction d’écoles dans les pays pauvres, notamment en Afrique où il faut absolument que les filles accèdent à l’instruction. C’est une urgence mais ça ne se fera pas en un jour. En attendant, l’adoption n’est pas une mauvaise idée pour les orphelins, plutôt que de les laisser se faire revendre par un oncle ou une tante à un réseau de prostitution...
10/01 19:35 - Morgane Lafée
@ mick : Vous parlez du commun des mortels ou des célébrités qui exhibent leurs enfants sur (...)
10/01 19:09 - Morgane Lafée
Alors si je lis entre les lignes, en gros vous reprochez à tous les parents adoptants que vous (...)
10/01 17:23 - Morgane Lafée
Vos témoignages m’ont beaucoup troublée, je l’avoue. Je ne remets absolument pas en (...)
07/01 14:45 - mick_038
06/01 16:26 - antonio
@ mick 038, Merci à vous de votre témoignage ; vous avez entamé un courageux parcours ( (...)
06/01 13:54 - orianeborja
Cette interrogation était une boutade, vous le comprenez en lisant la suite. Du reste, la (...)
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