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Commentaire de easy

sur Y a-t-il plus de violence religieuse dans le monde monothéiste que dans le monde non-monothéiste ?


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easy easy 16 novembre 2012 12:51

Les relations affectives sont-elles l’alpha et l’oméga, ou bien la toile de fond ?

Les peintures rupestres, les tatouages, les habits, les os dans le nez, la musique, la culture ne peuvent pas être autre chose que la toile de fond.

L’alpha et l’oméga c’est la relation directe en Moi-Toi.
Relation qui est quasiment toujours altérée par quelque tiers.

Ce n’est pas dans l’écume qu’est la culture qu’on peut trouver la source de la violence 

Deux personnes seules sur une île ne peuvent pas se haïr alors que la haine surgit dès la présence d’un tiers. Et le tiers, c’est finalement, quand on est nombreux, les autres, ceux qui nous empêchent d’avoir une relation strictement immédiate avec telle personnes puis telle autre personne.

Il n’y a qu’un moment de notre vie où nous sommes en relation directe avec une personne qui est toute à nous disponible, c’est quand nous sommes bébé face à notre mère. Et encore, à condition qu’elle soit vraiment toute disponible, qu’elle n’interpose pas entre elle et nous des considérations tiercées.

Une fois devenus adultes, la masse tiers est si imposante que nous nous déguisons en Elle, que nous cherchons à lui ressembler, à nous faire plus gros qu’une grenouille. Et nous devons alors dénier être resté un bébé.
A part ces derniers temps et encore, jamais un adulte n’évoque son enfance. Il efface tout ça. Il dissimule sa nostalgie de ce moment très immédiat qu’il a connu. Il parlera donc de tout sauf de son véritable manque.
Or, une fois adulte, nous pouvons tout de même revivre quelques moment d’immédiateté : quand nous faisons l’amour avec une personne et quand nous la frappons.

La sensation d’immédiateté est même plus puissante lorsque nous sommes sur le point de tuer car la personne ainsi menacée est à nous entièrerement disponible. Si on ne pige pas ça, on ne pige pas les millions de meurtres et de viols qui se produisent chaque jour. Ces crimes ne sont que l’expression de l’intense besoin que n,ous avons de relations immédiates, quitte à risquer notre vie pour les ressentir.
Et il y a des extensions à cette recherche qui sont les confrontations de soi-même avec la mort, tout seul (Sports à risques, cascades, kamikaze et ...suicide)

Placez-vous face à un tigre ou un cobra et vous ressentirez l’immédiateté absolue.

Suspendez-vous par une main au-dessus de 50 m de vide et vous ressentirez aussi cette intensité de relation immédiate. Plus personne d’autre n’intervient dans le devenir de vovre relation avec le rocher auquel vous vous agrippez, il n’y a que lui et vous, il est tout à vous et vous êtes tout à lui.

Est-ce que les millions de personnes qui chaque jour font le baiser de la mort avec quelque cobra ou requin ont une quelconque religion en tête à ce moment là ?



Votre démonstration sur la violence inscrite dans les Livres est magistrale. J’en ai rarement vu d’aussi complète en si peu de phrases (car on peut aussi développer en douze volumes). Vous en avez tout dit en un minimum de mots et c’est une belle performance.

Si donc il y avait à rechercher la religion qui favorise le plus la violence, qui y incite même, votre travail peut servir de référence. Cette recherche ou thèse étant par ailleurs très rebattue. Depuis 20 ans, c’est tous les jours qu’on peut lire un papier sur la même thèse « Il y a des versets sataniques dans le Livre »

Mais cette focalisation de tout me monde sur le Livre comme source du mal est opportune.

Cette thèse aujourd’hui très ordinaire aurait semblé incongrues dans les années 1960. A l’époque, ce qui faisait flipper les gens, la source de la violence, c’était à leur sens l’URSS ou la confrontation Est-Ouest.

James Bond était à propos, pas la thèse des versets sataniques.

Ce n’est qu’après la chute du Shah d’Iran, la prise des otages américains, le spectacle des incantations à la haine de Khomeini, mais aussi des incantations équivalentes côté chrétien américain, après aussi le spectacle des confrontations entre Israël et les Palestiniens, après bien entendu Gorbachev, que nos angoisses ont cessé de considérer les missiles soviétiques pour focaliser sur la vague islamiste (d’autant qu’elle s’installait en France).
Nous ne pouvions pas faire l’économie d’un examen d’abord du Coran mais, de fil en aiguille, de toutes les versions de l’abrahamisme. Le 9/11 n’a fait que renforcer nos convictions qu’il y avait à discuter du poison des Livres.

Pour ce qui me concerne, comme j’ai vécu une guerre et qu’elle n’était en rien liée au Livre, ni même à une ressource, j’ai pu méditer hors Livre.

J’ai vu que mille batailles de toutes échelles se sont produites dans le monde sans aucun recours au Livre. 

Ici ou là, des gens ont évoqué quelque verset du Livre pour lancer un putain de contact, mais combien de fois ? 

Nos pires guerres, entre nous car ce sont toujours celles qui procurent le plus de catharsis, se sont passées sans que personne ne fasse référence au Livre.
Et aucun de ceux qui s’affrontent dans la série des printemps arabes ne fait appel à quelque verset sinon très accessoirement, histoire de rhétoriser de quelque légitimité.

Où était le Livre dans le Rwanda ? Où était le Livre dans la guerre de Sécession, dans la guerre de Crimée, dans la Commune, dans la bataille d’Alésia, dans les innombrables guerres intra chinoises, dans les deux guerres mondiales ? Où est le Livre dans le hooliganisme, dans les émeutes de banlieue ?
Quel rapport y avait-il entre Sade ou Barbe Bleue et le Livre ?

Vous pouvez développer mille pages sur la méchanceté de certains versets du Livre, vous pourrez établir que tel meurtre, telle lapidation a été justifiée ou motivée par un de ces versets.
Mais la preuve qu’un médicament est efficace doit être livrée par des expériences en double aveugle et randomisées

Il faudrait prouver que tous ceux qui croient au Livre ont plus que d’autres recherché une confrontation ultra violente donc très immédiate.
Et il faudait prouver que ceux qui ignorent le Livre n’ont quasiment jamais pratiqué la violence.
Et il faudrait faire cette étude en considérant toutes les échelles d’affrontements, par millions de personnes jusque par deux personnes.

Rousseau avait raison de considérer que l’Homme avait une bonne nature, mais jusqu’au chiffre deux seulement.

Cela dit, même en partant de mon point de vue a-Livre, je dois bien admettre que le fait qu’il y ait des versets aussi violents dans le Livre ne peut qu’inciter chacun à aller plus vite encore à la bataille rangée.
Alors oui le Livre est incitateur de violence.
Oui un autre Livre interdisant la violence freinerait la propension de chacun à rechercher cet intense contact (Fin de la boxe alors)

Mais il y a en dessous, un fond permanent et universel de besoin de contact violent parce qu’elle est le débouché fatal de notre colère de ne plus pouvoir accéder directement à notre mère ou à quelque remplaçante. 
Etant entendu qu’il existe des personnes ayant la chance de pouvoir établir une immédiateté douce avec quelqu’un vraiment disponible (et en toute réciprocité) et que ceux-là n’éprouvent aucune colère, aucune envie d’essayer la violence.

Heureusement, il a existé des gens comblés parce qu’ils parvenaient à vivre une relation tendre immédiate avec quelqu’un. Mais je crains qu’avec l’incursion des smartphones dans notre vie ajoutée à la judiciarisation de nos relations, bientôt plus personne ne puisse ressentir que son interlocuteur est tout à lui disponible.

Si nous parvenons à ressentir une immédiateté avec un smartphone, avec la Toile, ces objets pourtant médiatiques, nous n’aurons plus du tout besoin de rechercher le contact vif qu’offre la violence. 
Apparemment, ce n’est pas le cas.
Les gens ont beau disposer d’objets étranges, à la fois accaparables et impossibles à posséder en leur entièreté, ils semblent ne pas en être comblés. Ces objets semblent offrir la solution de contact immédiat avec Tout, on se précipite donc sur eux mais on ressent toujours une frustration.
Un smartphone, le Web, représentent le Tout avec lequel il est extrêmement tentant de faire l’amour. Mais ce Tout est comme un arc-en-ciel, plus on s’en approche, moins on le saisit.

Nous n’avons que deux exutoires qui nous semblent possibles :
soit un ami tout à soi réservé
soit Tout
A défaut d’avoir un ami à soi réservé, on cherche à posséder tout ce qui l’enveloppe, donc Tout.

Si l’on dispose d’un ami tout à soi réservé, on ne s’intéresse pas au Tout. Mais comme c’est une chance rarissime, on se tourne vers Tout.
Comme 99% des gens se tournent vers Tout, chacun a l’impression que les autres y trouvent comblement et cette culture augmente le désir de ce Tout. Ce qui ne peut aboutir qu’à la frustration finale donc à la jalousie et la colère ou à la dépression.



Dans une tribu de 1000 personnes, chacun est en contact direct avec chacun. De sorte que chacun a l’impression d’immédiateté avec Tout. Aucun membre de la tribu n’évoque quoi que ce soit d’extérieur à la tribu. Aucun ne prétend avoir vu d’OVNI. La situation n’est pas pour autant aussi simple à gérer que dans une dyade mais c’est gérable et il n’est pas concevable de construire quelque sorte de prison (alors que c’est techniquement possible). Il ne vient à l’idée de personne de concevoir un moyen de transport puisque Tout est là.

Dans les cités, surgit l’anonymat et plus personne n’a le sentiment de pouvoir toucher directement chacun. On se retrouve obligé de considérer le hors la vue, l’inconnu.
L’inconnu devient carrément l’objet recherché et on se met à fabriquer des moyens de transport, on invente les vertiges et les infinis. Cela afin d’essayer de cerner tout ce que les autres conçoivent pour les envelopper, les ramener à soi.
« Maman, regarde-moi ! »
On conçoit des prisons parce qu’on impose ainsi une enveloppe à quelqu’un, on l’empêche de penser à autre chose qu’à soi (Cas flagrant de Louis XI mais de Tristane Banon aussi qui tient à cerner DSK). On jouit d’avoir enveloppé quelqu’un. La torture c’est « Ha ha, tu ne peux pas penser à autre chose, tu es tout à moi dévolu »

Dans la phylogénèse de la violence, il y a donc l’étape qui va de l’apparition de la troisième personne jusqu’au village de 1000 personnes (où il n’y a pas d’infinis et où elle est de faible intensité) et la seconde étape qui va de la cité au monde entier (où il y a des infinis et où elle est très intense).


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