Bonjour Eric,
Merci pour votre commentaire lourd de sens.
J’aime beaucoup même si, en l’occurence, je me sens comme on dit « habillé pour l’hiver » (et même si aussi je ne suis pas sûr d’avoir tout compris).
Pour ce qui est de ma révision du modèle girardien, j’entends que vous pensez l’original tout à fait conforme à l’orthodoxie darwinienne. Ce que je conteste fermement.
La reproduction différentielle étant ce qu’elle est, il est évident que les groupes protohominiens qui se sont dotés au plus tôt de mécanismes de régulation de la violence intestine ont eu plus de chance de survivre que les autres et cela, bien avant que n’existe quelque chose que l’on pourrait appeler en propre un sacrifice.
Donc ya pas photos, parmi des groupes de plus en plus mimétiques, de plus en plus conflictuels, ceux qui attendent l’arrivée d’un sacrifice efficace ont toutes chances de disparaître avant que cela n’arrive. Ne serait-ce que parce qu’ils sont en concurrence avec des groupes plus stables et donc plus forts. La plausibilité de l’hypothèse catastrophiste est nulle.
Pour ce qui est de l’indépendance entre la théorie girardienne et la croyance chrétienne de René Girard, j’ai longtemps pensé comme vous car j’ai tardé à entendre que, selon lui, cette théorisation est elle-même le fruit de la révélation. Dès le découplage n’est plus possible, en principe. Maintenant il est clair qu’un darwinien athée pourrait se satisfaire de l’hypothèse sacrificielle pour expliquer scientifiquement l’émergence de la pensée religieuse.
Quoi qu’il en soit, comme je l’expliquais, pour qui est croyant et adepte du modèle girardien, vient nécessairement la question de savoir comment il est possible que ce qu’il tient pour la réalité ultime se soit vu réflété dans les représentations spontanées de quelques bandes d’hominoïdes échauffés par la mimésis ?
Comment le divin pourrait-il être ce qu’on le croit être et avoir été conçu par des esprits animaux en passe d’accéder à l’humain ? That is the question !
Pour le reste, je l’avoue, même à la relecture, je ne suis pas sûr de savoir où vous voulez aller. L’évocation de Dupuy est des plus troublantes car je ne le sais pas croyant, et de plus, il dit à qui veut l’entendre qu’il n’est pas girardien. Enfin, je ne vois en quoi son chapitre dans Disorder & Order nous intéresse ici (peut-être s’agit-il d’un autre livre ?).
Le plus troublant pour moi est que vous évoquez l’hypothèse d’un christianisme sans le Christ. Comment êtes-vous venu à cette perspective à partir de mon propos ? Si vous avez suivi les liens qui pointent vers mes premières publications sur agoravox vous verrez que je travaille à un modèle pour la réconciliation explicitement mimétique de l’attitude christique. Mais bon, encore une fois, ça nous mènerait trop loin, donc je m’en tiens là.