Or, comment réfuter une
hypothèse qui s’ancre dans un passé si lointain qu’aucune invalidation
ne sera admise par les « girardiens » ?
Vous vous servez d’un argument circulaire avec argument ad hominen pour vous poser en victime :
1) le passé lointain n’a jamais interdit la réflexion.
2) dire que les girardiens refusent d’admettre l’invalidation de leurs
hypothèses quand elle se présente est un pur argument ad hominen car il
s’agit d’une généralisation métathéorique abusive (au sens où cela ne
peut être établi vu qu’il existe déjà une foule de preuves contraires,
Lord en ayant donné une avec le cas Landy).
Postuler l’universalité des pratiques sacrificielles (et en plus comme fondement du religieux et origine de toute humanité « humaine »…), c’est devoir accepter l’éclairage des données archéologiques et anthropologiques… or, le pb est que ces faits ne sont pas avérés au Paléolithique.
• Les premiers témoins d’une préoccupation religieuse
(sépultures) n’en portent pas trace (comme ce sera le cas bien plus plus
tard, et même après les débuts du Néolithique), ni pour Néandertal ni
pour les formes archaïques d’HSap au Proche-Orient. Des offrandes
animales, à la rigueur, mais bien sûr pas de sacrifice humain.
Pour que ce que vous constatez des données paléolithiques
vienne infirmer les hypothèses générales de Girard, il faudrait que vous
puissiez expliciter ses hypothèses spécifiques concernant le
paléolithique.
Quelles sont elles ?
A-t-il fait des affirmations à ce niveau ?
Si ce n’est pas le cas, il vous appartient de déduire de manière
logique, nécessaire des hypothèses spécifiques pour le paléolithique à
partir de ses hypothèse générales.
Tant que vous ne l’avez pas fait, vous ne pouvez prétendre avoir invalidé ses hypothèses.
Si vous ne le faites pas, vous pourrez au mieux reprocher à
la thèse girardienne de ne pas être ... assez étendue cad, de ne
pas couvrir avec suffisamment de précision la période paléolithique.
Mais vous m’accorderez que c’est une critique « légère », juste pour faire opinion et pas conclusion.
• Les premières traces de représentation liées aux
développements cérébraux d’Homo sapiens montrent un système de croyances
qui fusionne l’homme et l’animal. Les premières évidences de rituels
concernent la mise à mort ritualisée du gibier par des actions violentes
(impacts, rainurages, fractures…) sur des statuettes animales (rituels
de chasse ? prophylaxie ?…).
Dans ma réponse à Lord plus haut j’ai déjà répondu sur ce point.
Ainsi que les données animales m’y ont préparé depuis longtemps (cf. encore une fois le texte original ou toiletté de
mon document de travail sur l’hominisation), je considère comme
hautement probable que le sacrifice dans ses formes tardives et bien
identifiées comme telles soit l’aboutissement d’un processus évolutif
issu de formes archaïques où chasse et sacrifice étaient indissociables
et ne se sont distinguées que secondairement.
Nous sommes ici dans la ceinture de protection de la théorie girardienne.
Des aménagements mineurs ou de simples précisions suffisent à s’adapter aux nouvelles données.
Les premières représentations humaines sont
fortement sexuées, et mêmes réduites symboliquement à leur sexe
(vulves, pénis…).
L’hypothèse d’une période quasi-bonobos chez l’homme à un
moment donné de son évolution me paraît très raisonnable et même
probable vu les données anatomiques et physiologiques dont nous
disposons.
Leur existence ne contredit aucunement l’hypothèse sacrificielle car on
peut imaginer celle-ci entièrement cantonnée au domaine de la chasse.
Toute la question est de savoir comment l’un et l’autre ont pu coexister et donc s’articuler.
Quelle bascule envisager entre un sacré peuplé de formes animales et un sacré anthropomorphe ?
Et à quel moment situer la bifurcation entre chasse et sacrifice proprement dit ?
Les premières vraies représentations de violence
inter-humaine n’apparaissent qu’à l’Epipaléolithique (et encore…).
Très bien, voilà que, la densité augmentant, dans l’espace sacré, il n’y a plus seulement de l’animal, il y a aussi de l’humain.
Forcément ça change les représentations et les pratiques
Ce système de croyances et de représentation thématique
perdurera pendant toute la période chasseurs-cueilleurs (plus de 20
millénaires !), montrant une sorte de cosmogonie fondée sur les
analogies ontologiques entre l’homme et l’animal, entre les actes de
copulation et de chasse et sur le fondement sexué de l’organisation
sociale et de sa transcription mythologique. Le sexe est infiniment plus
présent dans les cavernes que la violence, pratiquement toujours
édulcorée, occultée, transposée dans la symbolique cynégétique.
Il n’y a pas là la moindre chose qui fasse contradiction avec représentations de girardien darwinien à tendance éthologique.
A part 2
ou 3 hommes « blessés », rien, de près ou de loin ne pourrait illustrer
un sacrifice humain ou la marque d’un conflit intérieur.
Comme déjà dit avec Lord, nous sommes bien d’accord que de
si petits groupes face à l’adversité du monde environnant ont toutes
chances d’être très soudés car, en particulier, resoudés par le partage
ritualisé de la chair de l’animal tiré de l’espace du sacré par l’activité de chasse.
Pourquoi ne pas prendre en compte cette réalité factuelle de
la recherche, sinon qu’elle va à l’encontre de la théorie
« sacrificielle » des origines ?
Ces faits ne vont pas à l’encontre de la théorie
girardienne dès lors que vous ne réduisez pas celle-ci à une vision
stéréotypée issue de la seule mythologie de l’homme moderne.
En abordant cela sur un mode évolutionniste, les pistes envisageables
sont innombrables et si la théorie girardienne est loin de pouvoir être
infirmée au niveau archéologique c’est qu’elle est loin d’être achevée
ou aboutie à ce niveau en particulier.
les interprétations des mythes
« actuels » ne remontent qu’à des « histoires » de qques millénaires
tout au plus : c’est de l’histoire récente.
Oui, oui, on est bien d’accord, c’est pourquoi il ne faut pas se forger une image trop rigide de l’hypothèse girardienne à partir de ses analyses de la mythologie.
L’émergence des sociétés
complexes, qui date aussi de qques millénaires (IIIè millénaire),
s’accompagne de tous les témoignages culturels sur la guerre ou le
sacrifice. Pourquoi ne pas considérer que la thèse de RG convient alors
très bien à une explication pertinente des sociétés hiérarchisées et
urbanisées ?
Je suis ravi d’apprendre que vous considérez les choses ainsi. Moi c’est ce que je pense.
Mais à aucun moment je ne songe à cantonner la théorie à ce seul niveau
dès lors que j’ai une foultitudes d’éléments qui me démontrent sa
pertinence... chez l’animal !
Il nous reste à faire la jonction entre l’animal et l’homme historique,
c’est un fait qui, en soi, ne saurait être une raison suffisante de
remise en cause de la théorie girardienne
Pour reculer au plus loin la cause de « toute chose », vous
devez vous appuyer sur l’éthologie animale, pré-éminente à
l’humanisation, et tordre un peu les faits.
aha, vous m’intéressez...
Le cas de la chasse au
colobe observée chez les Chimpanzés ne relève pas vraiment d’une
pratique sacrificielle. L’interprétation est des plus douteuses.
Si ça c’est pas un exemple d’affirmation gratuite ?
Vous doutez. Très bien, c’est votre droit le plus sûr.
Mais si vous voulez qu’on en débate, dites moi pourquoi !
Les
guerres inter-groupes des chimpanzés montrent l’enracinement de la
guerre dans notre lignée très « territoriale » (pas tellement plus que
les troupes de lions), mais ce n’est pas une pratique intra-groupe,
comme vous la jugez nécessaire à la théorie de Girard…
Moi, je juge quoi nécessaire ?
Les guerres rituelles entre hordes, clans, etc. peuvent être vues chez
l’animal ou chez l’homme comme des occasions d’entretenir des pratiques
sacrificielles qui assurent la cohésion du groupe.
Elles « corroborent » tranquillement la thèse girardienne et il est vain
de leur reprocher de ne pas être des violences intestines.
Quant à cette dernière, il suffit de lire Fossey, Goodall
et de Waal pour comprendre la force et la pertinence du postulat
girardien concernant le risque d’éclatement auquel sont constamment
soumis les groupes hominidés.
Une fois ce constat opéré, on se demande comment il est possible qu’il
soit à peu près complètement absent des considérations en paléontologie
humaine.
Bref… je ne suis pas convaincue de l’extension vers
l’originel d’une conjecture qui est séduisante à partir des sociétés
complexes (Âge du Bronze, voire un peu avant).
Très bien, j’attends vos arguments sur le fond
Pourtant, l’une est
scientifiquement fondée, et pas l’autre.
Là, je ne suis pas sûr de bien vous comprendre, vous pouvez préciser ?
Pourquoi s’attacher à ce point à
une théorie totalisante, qui embrasse une réalité inaccessible et donc
« s’enferme » dans ce système clos que je regrettais ?
« théorie totalisante » est une critique métathéorique sans aucune validité scientifique ou seulement épistémologique.
La théorie de la gravitation universelle ne gêne plus grand monde en dépit de sa prétention universelle.
La théorie des acides nucléiques comme base de TOUT le vivant ne gêne personne en dépit de sa perspective totalisante.
Il me semble peu utile de s’attarder sur cet aspect.
Encore une fois la visée totalisante ou non d’une idée n’appartient pas au monde III de Popper.
On ne juge pas d’une idée sur la base de son intention.
« réalité inaccessible » est encore pour le moment une
affirmation gratuite de votre. J’attends quelque chose qui ressemblerait
à une démonstration.
« Système clos » : assertion difficilement soutenable dès lors qu’il est reproché à Girard de faire feu de tout bois.
Donc désolé, la réponse à votre question est qu’elle ne correspond pas à la réalité de la théorie girardienne
pourquoi des
recours aussi peu « parcimonieux » (économique) à des concepts lourds
et/ou insaisissables (désir, mimétique, causalité unique…)…
La parcimonie c’est de pouvoir expliquer beaucoup avec peu.
C’est précisément ce que fait la théorie girardienne, avec très peu : la
tendance mimétique et son corrélat, le mécanisme sacrificiel.
Cette parcimonie, c’est précisément ce que vous lui reprochez.
Donc mauvaise pioche, vous manquez de cohérence ici.
Prenez mes remarques pour des questions… (car je ne connais
pas la thèse de Girard dans tous ses aspects et sans doute ses nuances).
Aucun souci : questions, remarques ou critiques véhémentes, j’accueille tout avec plaisir.
Même l’ad hominen
Je suis méditerranéen, j’ai toujours baigné dans une culture du polemos où les débats ressemblent vite à des batailles de pelochons généralisées.
ça affole les amis germaniques qui se croient en enfer mais moi j’adore ça.
J’espère qu’il en va de même pour vous.
Si ce n’est pas le cas, je vous en prie, prenez mes remarques pour des questions.
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