@ Pierre Régnier
Je vous remercie pour votre effort de synthèse sans lequel il eût été difficile de dégager les points d’accord et de désaccord.
Pour ce qui est du premier, il tient à l’absence de solution véritable au conflit israelo-palestinien.
En effet, si je suis juste un peu réaliste, il me semble que ma proposition d’une commission Vérité & Réconciliation en Palestine ne pourrait être envisageable qu’une fois une solution apparue, afin de reconstituer l’unité du corps social par et dans l’accord sur LA réalité, sur l’histoire de violence qui a été celle de la Palestine depuis des décennies et dans laquelle les bourreaux se reconnaîtront eux-mêmes comme tels tout en reconnaissant leurs victimes.
Mais peut-être que si elle pouvait être mise en place de suite aiderait-elle à renverser la logique mortifère qui prévaut actuellement ?
Disons que je n’ose y croire et que je vous suis donc sur l’inextricabilité de ce conflit.
Pour le reste nous sommes en désaccord.
D’abord parce que vous me faites un mauvais procès en donnant à penser que nous pourrions être en désaccord sur l’idée que :
« s’il y a eu erreur politique dans la décision de certains juifs de boycotter les produits de l’Allemagne nazie après l’accession d’Hitler au pouvoir ça ne les rend pas responsables, si peu que ce soit, de l’abject génocide nazi. »
Il n’y a ici aucun désaccord, pour la bonne raison que (contrairement à moi qui m’en abstiens) vous parlez de « certains juifs ».
Il m’est donc facile de vous dire que oui, certains juifs ont pu faire une erreur politique avec l’appel au boycott et on ne va pas pour autant les rendre responsables aussi peu que ce soit de l’Holocauste.
Mais notez bien que là n’est pas la question.
PAS DU TOUT.
La question est : « certains sionistes ont-ils par leurs actions consenti ou contribué à ce que la situation des juifs d’Allemagne et d’Europe devienne précaire, pénible, voire atroce car ils savaient que cela servirait le projet sioniste en donnant des motifs sérieux de créer l’Etat d’Israël comme havre protecteur pour ces mêmes populations ? »
Cette question, je la pose, je n’y réponds pas et, comme je le disais, je demande une « mise en examen » des sionistes (un mise en « examen historique » bien sûr et non pas judiciaire vu qu’à ma connaissance il n’existe aucun cadre pour cela).
Même dans l’hypothèse, très plausible, où il faudrait répondre oui à ladite question, il est très clair que cela ne suffirait pas pour attribuer une responsabilité à ces sionistes dans, je vous cite : « l’abjecte décision nazie de mettre en chantier l’extermination des juifs. »
Car l’évidence veut que c’est celui qui prend la décision qui en assume la responsabilité. Il pourra toujours se trouver des excuses, des justificiations ou des circonstances atténuantes, mais c’est une autre histoire, un autre « procès ».
Bref, ne me faites pas, par pitié de faux procès.
Enfin, le second et dernier point de désaccord est celui qui vous tient à coeur, au sujet duquel vous m’avez déjà interpellé et pour lequel je n’ai pas souvenir de vous avoir fait une réponse très précise.
Je vais essayer à présent.
Mais d’abord un point préalable : vous parlez d’un texte vieux de combien de temps déjà ? 2500-3000 ans ?
Pensez-vous sérieusement pouvoir faire le procès que vous faites aux religions actuelles à partir d’un tel texte ?
Avez-vous des éléments qui montrent que le texte en question sert de support à la formation des fidèles ? Sert-il ici ou là à forger une représentation qui prescrit les modes de rapport entre telle et telle communauté religieuse, entre tel et tel peuple ?
Je ne le crois pas.
Je pense que vous n’avez pas d’élément en ce sens et l’absence de répudiation officielle dudit texte n’est preuve de rien.
Tel que je le perçois pour le moment (et peut-être parviendrez-vous à me faire changer d’avis ?), ce texte n’a plus qu’une valeur historique, marquant une étape de développement de la conscience (religieuse) des peuples d’alors et entre temps, beaucoup d’eau, beaucoup d’encre (et beaucoup de sang il est vrai) ont coulé sous les ponts et sur les pages.
Pour ma part, je considère que l’épisode du sacrifice détourné d’Isaac est la preuve d’un tournant religieux qui marque le refus divin de la violence sacrificielle et partant, le refus divin de massacres tels que celui que vous évoquez.
Ma représentation est-elle naïve, mal informée ou bêtement dans l’erreur ?
A vous de me le montrer.
Vous savez où je me tiens à présent.
Ce n’est pas une place forte mais sachez que je ne lâcherai rien comme on dit !
Autrement dit, je vous invite à ne me proposer que des arguments implacables.
Nous irons ainsi plus vite à la conclusion et peut-être apprendrais-je quelque chose...