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Commentaire de Analis

sur Israël. Et s'ils partaient... les Palestiniens ?


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Analis 23 juillet 2014 14:27

Le journaliste libanais Youssef Bazzi donne une analyse lucide des ressorts du comportement israélien dans un article de Al-Mustaqbal écrit le 13 juillet :

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Israël ne veut pas d’un Etat palestinien viable, avec un territoire et des frontières clairement définies. Mais Israël ne veut pas non plus devenir l’Etat de tous ses habitants [incluant les Palestiniens]. Il n’est ni capable de se séparer des Palestiniens ni de les englober. Son problème, c’est l’existence même des Palestiniens. Le seul fait qu’ils existent rend impossible la réalisation de “l’Etat juif”.

Si la Nakba des Palestiniens a été la création de l’Etat d’israël en 1948, la “Nakba” d’Israël aujourd’hui réside dans l’existence des Palestiniens, non pas en tant qu’êtres humains et résidents dont on n’arrive pas à se défaire, mais en tant que peuple vivant sur un territoire et aspirant à former une entité nationale.

Ce fut un tournant historique [à la fin des années 70] quand les Palestiniens ont pris acte de l’existence de l’Etat d’Israël. Jusque-là, ils avaient en tête [la reconquête de l’intégralité de] la Palestine historique, idée qu’ils ont ensuite abandonnée pour tenter d’établir un Etat palestinien [à côté et distinct d’Israël]. Tout en affirmant que, au cas où il n’y aurait pas de solution à deux Etats, ils n’auraient pas d’opposition de principe à la création d’un Etat binational, juif et arabe, garantissant l’égalité démocratique.

L’Etat israélien a connu une évolution inverse, avec une régression vers un projet racio-religieux, misant sur la colonisation et ne comptant que sur l’occupation, la force militaire et l’oppression pour assurer sa pérennité. Alors que les palestiniens ont intégré ce changement dans leur raisonnement, les Israéliens sont restés bloqués dans un imaginaire biblique. Israël n’a pas su être un Etat normal. Même l’Afrique du Sud, exemple s’il en est d’une création colonisatrice et raciste, s’est débarrassée de cet héritage. Au lieu de chercher une solution, Israël s’enfonce dans l’impasse. Son erreur consiste à nier la réalité. Malgré sa toute-puissance et sa férocité, il est prisonnier d’un système non-viable. Or, en se piégeant lui-même, il emprisonne en même temps les palestiniens.

Toutes les négociations entre Israéliens et Palestiniens depuis 1991 et jusqu’à aujourd’hui se sont déroulées entre, d’un côté, les Palestiniens qui cherchaient désespérément une solution et, de l’autre, les Israéliens qui cherchaient désespérément la “victoire” définitive. Les Israéliens sont engagés dans une fuite en avant et se laissent aller au délire qui consiste à refuser tout à la fois la solution de deux Etats et la solution d’un seul Etat pour les Juifs et les Arabes. Leur seule perspective, c’est toujours plus d’occupation et de spoliations. Israël a décidé de vivre dans la guerre permanente. De ne pas s’accorder la paix ni de donner leurs droits aux palestiniens.

Les Palestiniens sont prisonniers de l’occupation, mais les Israéliens sont prisonniers du sionisme. Le drame des Palestiniens est donc double : ils doivent, avant de pouvoir se débarrasser de l’occupation, libérer les Israéliens de leur propre prison. La lutte israélo-palestinienne est devenue une lutte pour la liberté de tous.

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Ces constatations rejoignent celles de Shlomo Sand et de Gilad Atzmon (ainsi que celles de l’auteur de l’article, mais Youssef Bazzi ne propose pas de combler les souhaits des sionistes agresseurs par une méga-purification ethnique !). En Occident, trop en sont encore à discuter de la pertinence du choix de deux Etats par rapport à celui d’un Etat binational. Mais la question ne se pose plus pour les Israéliens, qui ne veulent ni de l’un ni de l’autre.

Le sionisme est pathologique, parce que l’identité juive elle-même, plus exactement celle de ces juifs qui se disent juifs parce qu’ils se basent sur un « sentiment d’appartenance » diffus, est pathologique. Cette identité est en effet négative, en même temps qu’elle conserve un fond racial -est juif celui qui a des ancêtres juifs ; mais elle n’a pas de fondements solides, culturel/religieux. Ce juif ne se définit au final que par le fait d’avoir été persécuté et/ou exclu des communautés indigènes. Cette absence d’identité les rend très agressifs, d’autant que reste toujours chez eux un fond inconscient d’exceptionnalisme venu d’un conditionnement religieux depuis la plus petite enfance.

Ainsi, le sionisme est caractérisé actuellement d’un côté par le développement de l’intégrisme juif tribaliste et très intolérant, de l’autre par des sortes de juifs non-juifs, appellés erronément des « laïcs », qui sont tout aussi tribalistes et intolérants, et ce même quand ils font mine d’être séculiers et progressifs. Les palestiniens se retrouvent ainsi pris entre les deux (il est à noter cependant que les sondages montrent un très net déclin des pseudo-laïques ; tant qu’à avoir un sentiment d’identité, les israéliens en préfèrent un - c.a.d. le religieux - qui n’est ni ambigu ni sans queue ni tête).

La vérité est qu’Israël évolue à l’envers du reste du monde. Alors qu’ailleurs tolérance et anti-racisme sont les valeurs montantes depuis des décennies, en Israël elles sont honnies. Une conséquence grave dans les pays occidentaux en est cependant que ces valeurs, avec d’autres d’obédience libérale comme la liberté d’expression et d’information, sont combattues par une partie de la propagande politico-médiatique, car les défendre revient à critiquer Israël. Le sionisme corrompt tous les Etats dits démocratiques.


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