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Commentaire de soi même

sur Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux


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soi même 13 janvier 2015 11:59

Merci pour c’est article dans la même veine :

[562b][Socrate] Le bien mis en avant, dis-je, et par lequel l’oligarchie s’était établie, c’était bien l’excès de richesse, n’est-ce pas ?
[Adimante]Oui.
Et c’est ce même désir insatiable de la richesse et l’indifférence à l’égard de tout le reste induite par le souci de gagner de l’argent qui l’ont conduite à sa perte.
C’est vrai, dit-il.
Eh bien, ce que la démocratie définit comme bien, n’est-ce pas un désir insatiable à son égard qui la détruit ?
Mais dis-moi ce qu’elle définit ainsi.
La liberté, répondis-je. Cela en effet probablement, dans une cité gouvernée démocratiquement
[562c], tu l’entendrais : que c’est ce qu’il y a de plus beau et que, pour cette raison, c’est seulement dans une telle cité qu’il convient qu’habite quiconque est par nature libre.
On entend en effet, dit-il, ce mot répété à tous bouts de champs.
Eh bien, dis-je, comme j’allais le dire à l’instant, ce désir insatiable d’elle et l’indifférence à l’égard de tout le reste, c’est cela qui fait changer ce régime et le prépare à avoir besoin de la tyrannie.
Comment ? dit-il.
Quand, me semble-t-il, une cité démocratique assoiffée de liberté

[562d] a le malheur d’être dirigée par de mauvais échansons, et qu’elle s’enivre plus que de mesure d’elle à l’état pur, alors, si ses dirigeants refusent de filer doux et de lui laisser une totale liberté, elle châtie ceux qu’elle tient pour responsables, comme des meurtriers et des tenants de l’oligarchie.
Ils agissent en effet, dit-il, ainsi.
Et ceux, repris-je, qui obéissent aux dirigeants, elle les couvre de boue, les accusant de se livrer eux-même à l’esclavage et d’être des moins que rien, alors que les dirigeants qui se laissent diriger et les dirigés qui dirigent, aussi bien dans les affaires privées que publiques, elle les loue et les honore. N’est il pas alors inévitable que dans une telle

[562e] cité la soif de liberté vienne à tous ?
Comment en serait-il autrement ?
Et qu’elle s’insinue, dis-je, mon très cher, jusqu’au plus profond des maisons et qu’en fin de compte il n’y ait jusqu’aux animaux en qui l’anarchie se développe ?
Que veux-tu dire ? demanda-t-il.
Que, répondis-je, le père s’habitue à devoir traiter son fils d’égal à égal et à craindre ses enfants, le fils s’égale à son père, n’a plus honte de rien et ne craint plus ses parents, parce qu’il veut être libre ; le métèque
[563a] s’égale au citoyen et le citoyen au métèque, et la même chose pour l’étranger.
C’est bien ce qui se passe, dit-il.
À tout cela, dis-je, s’ajoutent encore ces petits inconvénients : le professeur, dans un tel cas, craint ses élèves et les flatte, les élèves n’ont cure de leurs professeurs, pas plus que de tous ceux qui s’occupent d’eux ; et, pour tout dire, les jeunes imitent les anciens et s’opposent violemment à eux en paroles et en actes, tandis que les anciens, s’abaissant au niveau des jeunes, se gavent de bouffoneries

[563b] et de plaisanteries, imitant les jeunes pour ne pas paraître désagréables et despotiques.
C’est tout à fait ça ! dit-il.
Mais en fait, dis-je, le comble, mon très cher, de l’excès de liberté, tel qu’il apparaît dans une telle cité, c’est quand ceux et celles qui ont été achetés ne sont en rien moins libres que ceux qui les ont achetés. Et dans les relations des hommes avec les femmes et des femmes avec les hommes, le point où en arrivent l’égalité des droits et la liberté, nous étions près de n’en quasiment rien dire !
[563c] Pourquoi pas, pour citer Eschyle, dit-il, « dire ce qui nous est venu à la bouche à l’instant » ?
Bien sûr ! repris-je. Et c’est ainsi que je parle. À quel point les animaux qui sont au service de l’homme sont beaucoup plus libres dans une telle cité qu’ailleurs, c’est incroyable pour qui n’en a pas eu l’expérience. Car sans mentir, les chiennes, comme dit le proverbe, deviennent en tous points semblables à leur maîtresses, et les chevaux et les ânes, habitués à aller en tout librement et fièrement, heurtent à tout instant dans la rue les passants qui ne s’écartent pas ; et tout
[563d] devient ainsi gavé de liberté.
C’est, dit-il, mon propre rêve que tu me racontes là ! Car je subis bien souvent de telles mésaventures quand je vais à la campagne.
Et le résultat, dis-je, de tous ces abus accumulés, tu le conçois, c’est qu’ils rendent l’âme des citoyens si délicate qu’à l’approche de la moindre apparence de servitude, ils s’irritent et ne peuvent le supporter. Et tu sais bien qu’au bout du compte, ils n’ont plus cure des lois écrites ou non écrites afin de n’avoir jamais
[563e] nulle part à supporter de maître.
O combien, dit-il, je le sais !
Eh bien, dis-je, mon très cher, tel est le beau et vigoureux commencement duquel naît la tyrannie, ce me semble.

 République, VIII, 562b-563e


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