@Michel Maugis en guise d’ hors-d’œuvre .
LE BRISE-GLACE
Tiens une citation peut connue de Staline .
« L’Occident, avec ses cannibales
impérialistes est devenu un foyer de
ténèbres et d’esclavage. Il s’agit de briser
ce foyer pour la joie et la consolation des
travailleurs de tous les pays*. »
Staline, 15 décembre 1918.
Présface
AU LECTEUR
Qui a commencé la Deuxième Guerre mondiale ?
Parmi
toutes les réponses à cette question aucune ne fait l’unanimité. A
plusieurs reprises, le gouvernement soviétique a même changé
officiellement d’avis sur ce sujet.
Le 18 septembre 1939, il
déclarait, dans une note officielle, que la responsabilité de la guerre
incombait au gouvernement polonais.
Le 30 novembre 1939, dans la
Pravda, Staline accusait « l’Angleterre et la France, qui ont attaqué
l’Allemagne », de porter « la responsabilité de la guerre actuelle. »
Le
5 mai 1941, dans un discours confidentiel prononcé devant les
promotions des académies militaires, il désignait un autre coupable :
l’Allemagne.
La guerre achevée, Moscou élargit le cercle des
responsables du conflit à l’ensemble des pays capitalistes. Comme l’URSS
était alors le seul pays non capitaliste, c’était donc la communauté
internationale tout entière, à l’exception de la « Patrie des
travailleurs », qui portait, selon cette thèse, la responsabilité du
conflit.
La mythologie communiste a longtemps conservé le point de
vue stalinien. N.S. Khrouchtchev, L.I. Brejnev, Iou.V. Andropov et K.Ou.
Tchernenko ont régulièrement mis le monde entier au banc des
accusés.
Sous l’influence de M.S. Gorbatchev, bien des choses commencent à
changer, mais le jugement porté par Staline n’a pas été corrigé : le
lieutenant- général P.A. Jiline, historien en chef de l’Armée
soviétique, répète toujours à qui veut l’entendre : « Les responsables
de la guerre n’ont pas été les seuls impérialistes d’Allemagne, mais
ceux du monde entier 1 . » ( 1 L’Etoile rouge, 24 septembre 1985. )
La raison de cette attitude est simple :
les communistes soviétiques continuent d’accuser le reste du monde pour
dissimuler le rôle qu’ils ont eux-mêmes joué dans la genèse du conflit.
Après
la Première Guerre mondiale, le Traité de Versailles avait retiré à
l’Allemagne le droit de disposer d’une armée puissante et d’armes
offensives : chars, avions de combat, artillerie lourde et
sous-marins.
Les chefs militaires allemands qui ne pouvaient s’entraîner sur leur
territoire à la guerre offensive, le firent, grâce au Traité de Rapallo
(1922), en... Union soviétique. Staline leur offrit les meilleures
conditions d’entraînement. Des salles d’étude, des polygones et des
champs de tir furent mis à leur disposition, mais également tout le
matériel qui leur était interdit. Sur ordre de Staline, les portes des
usines de production de blindés furent ouvertes aux stratèges allemands.
Si Staline accorda alors tout le temps et l’argent nécessaires à la
reconstitution de la puissance militaire allemande,
c’est parce que,
en cas de conflit, elle serait dirigée, non pas contre l’URSS, si
compréhensive, mais contre le reste de l’Europe.
Staline
savait qu’une armée, aussi puissante et agressive qu’elle fût, ne
suffirait pas à déclencher une guerre. Il fallait également un chef
fanatique et illuminé. Il fit beaucoup pour qu’un tel personnage
parvienne à la tête de l’Allemagne. Dès l’arrivée des fascistes au
pouvoir, il les encouragea à la guerre. En août 1939, le pacte
Molotov-Ribbentrop fut l’apothéose de cette politique : il garantissait à
Hitler une totale liberté d’action en Europe ce qui rendait la guerre
inévitable.
Quand nous évoquons le chien enragé qui a couvert de morsures la moitié
de l’Europe, n’oublions pas que c’est Staline qui l’a dressé avant de
détacher sa chaîne.
Bien avant qu’il ne devienne Chancelier du Reich,
les dirigeants soviétiques avaient donné à Adolf Hitler le surnom
secret de « Brise-glace de la Révolution ». C’est un sobriquet précis et
lourd de
sens. Les communistes savaient bien que le seul moyen de
vaincre l’Europe capitaliste était la guerre extérieure et non les
révolutions intérieures. Le « Brise-glace » devait, à son insu, frayer
la voie au communisme mondial en anéantissant les démocraties
occidentales à coup de guerres éclair qui épuiseraient et disperseraient
ses propres forces.
Contrairement à Hitler, Staline savait que
c’était le dernier entré en guerre qui la gagnerait. Il lui céda donc
l’honneur de la déclencher et se prépara à attaquer lorsque « tous les
capitalistes se seront battus entre eux* ». ( * Staline, Œuvres, t. 6, p. 158. )
Hitler était un véritable
cannibale mais il ne faut pas prendreStaline pour un végétarien. On a
fait beaucoup pour dénoncer les crimes du nazisme et démasquer ses
bourreaux. Ce travail doit être
poursuivi et développé. Mais il faut aussi condamner ceux qui ont encouragé tous ces crimes dans l’intention d’en tirer profit.
Les
archives soviétiques ont été depuis longtemps soigneusement épurées.
Elles sont, en plus, difficilement accessibles aux historiens.
J’ai
eu la chance de pouvoir travailler dans celles du ministère de la
Défense de l’URSS, mais c’est volontairement que je les utiliserai de
façon limitée. Les publications officielles sont amplement suffisantes
pour faire asseoir les dirigeants communistes soviétiques au même banc
des accusés que les nazis.
Mes principaux témoins seront Karl Marx,
Friedrich Engels, V.I. Lénine, L.D. Trotski, I.V. Staline, tous les
maréchaux de la période de guerre et un bon nombre de généraux de
premier plan. Dans cet
ouvrage, les responsables communistes eux-
mêmes dévoileront au lecteur leurs desseins. De leur propre aveu, ils
reconnaîtront qu’ils ont favorisé la guerre ; que l’action des nazis leur
a permis de la déclencher ; qu’ils se préparaient à attaquer par
surprise pour s’emparer de l’Europe préalablement ravagée par Hitler.
Il
se trouvera de nombreuses personnes pour défendre les communistes
soviétiques. De grâce, puisque je les ai pris au mot, qu’on les laisse
se défendre eux-mêmes.
Victor Suvorov,
décembre 1988