Cela a été dit déjà, l’article est dérangeant. Intéressant par les
problèmes évoqués mais dérangeant par ses prises de positions et surtout
par la brutalité de la déclaration faite à un enfant qui ne peut en
comprendre les tenants et les aboutissants alors qu’ il eût été si
simple et si naturel de manifester cette conviction par une attitude
accueillante qui laisse l’enfant libre d’exprimer ses émotions et
sentiments, qu’ils soient positifs ou négatifs. Cet accueil
inconditionnel est ce qui suffit à dire la liberté (affective) que l’on
donne à l’enfant et qui lui permet de construire son indépendance.
Ce
qui est étrange c’est qu’en dépit de cette entame centrée sur l’enfant,
l’article questionne surtout l’obligation d’aimer du parent vis-à-vis
de son enfant vu que les exemples les plus marquants concernent des
personnes souffrants de ne pas avoir été aimées.
L’adulte a-t-il un devoir d’aimer son enfant ? N’est-ce pas la question qui doit être posée ?
Et si oui, que veut dire aimer dans ce cas ?
Quoi
qu’il en soit, l’auteur semble partir du principe que l’amour parental a
toute chance de faire défaut et que, par conséquent, il importe de
faire comprendre aux enfants qu’ils ne sont pas censés retourner un
amour qu’ils n’ont pas reçu.
Respecter la norme de réciprocité,
ça paraît sain à première vue, sauf que ça se fait dans le contexte d’un
positionnement malsain : ne pas avoir d’amour à donner à son enfant,
c’est d’emblée engendrer des troubles, car l’enfant en a vitalement
besoin.
Et la question se repose alors, c’est quoi bon sang l’amour
que l’enfant est censé recevoir ? Je propose, pour faire simple de le
circonscrire avec les notions d’intérêt, d’attention, d’accueil, de
disponibilité et de qualité des soins que l’on prodigue à l’enfant. Nous
sommes ici sur le versant Agape et non Eros de l’amour. Le parent donne
et l’enfant reçoit, c’est cela qui est naturel et ça se passe
complètement de mots ou de déclaration.
Le problème soulevé par
l’auteur est celui de l’enfant qui tente désespéremment de manifester de
l’amour à ses vieux alors que ces derniers sont incapables (et ils
l’ont prouvé) de lui en donner. Là où il y a maldonne, c’est que ce
comportement est interprété en référence à une obligation dont il
s’agirait de dispenser l’enfant pour le libérer de cette situation sans
espoir.
Il n’y a aucune obligation qui pèse sur l’enfant ici. Ce
qu’il faut voir, c’est qu’il est, tout simplement, encore à tenter de
réussir ce qu’il a échoué jusqu’à présent : se faire aimer de ses
parents. Dès qu’il prend conscience qu’il n’est pas aimé, l’enfant se
pense, forcément, fautif et donc responsable de ce manque d’amour. Il
fait alors de son mieux pour mériter l’amour de ses parents et pourra persévérer jusqu’à la mort.
Ce
qu’il faut voir c’est qu’il met lui aussi en oeuvre la stratégie de la
réciprocité. Je te donne et je m’attends donc à ce que tu me donnes en
retour. Sauf que, bien sûr, on peut donner tout l’amour que l’on veut à
un mur, il ne vous rendra pas grand chose, juste un peu de chaleur (si
on le chauffe en restant près de lui) et, évidemment, les coups (en
vertu du principe d’égalité de l’action et de la réaction).
Au
final, on découvre que tout tourne autour d’une logique du don et du
contre-don... attendu (en vertu de l’implacable norme de réciprocité).
Dans cette perspective, nous retrouvons ce grand classique qui veut que
le véritable amour donne ET N’ATTEND RIEN EN RETOUR.
On pourrait
donc imaginer qu’un parent dise à son enfant : "je t’aime de tout mon
coeur mais saches que toi tu n’es pas obligé(e) de m’aimer" (autrement
dit, je te dispense de la norme de réciprocité).
ça paraît bien
mignon comme ça, très beau, très pur, idéal, sauf que d’emblée, il y a
problème car, encore une fois, quel besoin d’exprimer verbalement ce qui
se dit si bien implicitement par une attitude d’accueil bienveillant
portant sur toute la palette affective de l’enfant ? Les actes parlent
infiniment mieux, plus fort et plus vrai que les mots.
Par
conséquent, ces mots « tu n’es pas obligé(e) de m’aimer », vu qu’ils sont
non nécessaires, disent probablement autre chose que ce qu’ils
prétendent dire.
05/11 13:22 - Luc-Laurent Salvador
@Taverne Je n’ai pas compris la question du début mais la position que vous présentez me (...)
31/10 09:00 - jjwaDal
@Monolecte J’en suis heureux mais je taquinais, vous ayant lu et votre billet étant (...)
30/10 16:31 - Taverne
@Luc-Laurent Salvador C’est important d’avoir votre point de vue de psychologue (...)
30/10 16:09 - Taverne
@Luc-Laurent Salvador Très intéressant tout cela. Mais, moi, je ferai plus court. Ne recourons (...)
30/10 02:06 - Mélusine ou la Robe de Saphir.
@Franck Einstein Enfance dans la restriction mais vos réflexions sont elles, souvent remplies (...)
29/10 23:06 - Spartacus
« Comment renoncer à ce que la société entière considère comme allant de soi : (...)
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