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Commentaire de Jean Dugenêt

sur Un régime totalitaire et fascisant


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Jean Dugenêt Jean Dugenêt 27 mars 2019 11:22

@loulou
Je vous remercie et je vous comprends mais je vous invite à poursuivre la réflexion.
Il est vrai que je vis actuellement en province dans un coin paisible qui peut être considéré comme protégé.
Il faut observer ce qui se passe dans le mouvement des gilets-jaunes. Je vais devoir ici déroger à mes habitudes en faisant état de quelques impressions qui ne peuvent assurément pas être considérées comme des preuves. Au départ de ce mouvement, déclenché contre une augmentation des taxes des carburants, il y avait assurément des personnes sensibles à la politique du RN qui est particulièrement virulent contre l’immigration. Je ne méprise pas ces personnes. J’essaie de comprendre comment elles en viennent à partager cette politique. Quand les personnes n’ont pas de perspectives communes et vivent difficilement en étant repliées sur elles mêmes ou dans un milieu restreint, elles ont tendance à reporter les causes de leurs malheurs sur l’autre, sur les autres, sur ceux qui ne sont pas comme eux, qui ne vivent pas comme eux... Les immigrés deviennent facilement alors la cible de leurs mécontentements.
Mais, nous l’observons dans les manifestations des gilets jaunes, sur les ronds points et autres lieux de rassemblement, quand ils se rencontrent, discutent et échangent les gens se rendent compte qu’ils sont foncièrement semblables, qu’ils ont les mêmes difficultés et qu’ils subissent tous le même mépris. Ce mépris ne vient pas du voisin, de celui qui va prier ailleurs ou qui ne s’habille pas de la même façon. C’est le mépris de la caste des puissants qui se croient supérieurs.
L’ennemi des « français de souche » et des migrants et le même. Je remarque d’ailleurs aussi que les « gens du voyage » se sont joints massivement au mouvement des gilets-jaunes et toutes ces rencontres sont riches et épanouissantes pour tout le monde.
Au début du mouvement des gilets jaunes, j’ai reçu un petit texte d’un gars un peu poète. Nous fréquentons ensemble une association de slameurs. J’ai trouvé un peu émouvant ce qu’il écrivait. Je vous le transmets :

« Les amis(es) surtout ne souriez pas... Il y a dans le mouvement « gilets jaunes » l’esprit d’une crue... y compris poétique.

Aujourd’hui en province (Ardèche) et pour quelques jours, après avoir passé plusieurs barrages filtrants en tant qu’automobiliste pressé je suis allé sur différents carrefours de filtrage des « gilets-jaunes », il se passe quelque chose de très important et de très beau, une poétique du ras-le-bol avec beaucoup de lucidité et de générosité.

Sans doute comme partout, vous y croiserez peut-être (mais minoritairement) des caricatures populistes voire même nationalistes mais il y a tant d’autres choses... Elles rappellent ce qu’on pouvait espérer sans plus y croire mais qui soudain surgit dans cette beauté de la joie de se retrouver et de reconstruire ensemble une cohésion sociale, une fraternité, dans des termes de luttes de classe empreints de la seule radicalité d’une authentique justice sociale criée par le peuple des « effacés », le tout, selon une éthique libertaire. Ne parlons plus du peuple « invisible » mais des invisibilisés qui se relèvent et surgissent dans leur « redevenir peuple ».

SVP Ne manquez pas d’aller humblement sans obligation aucune de porter un gilet, aller voir et écouter...c’est trop important et si fragile à la fois.... Car devant cette crue de ras-le-bol et d’espoir mêlés, le pouvoir ne laissera sans doute pas faire très longtemps...

Je témoigne de ces moments passés en France profonde depuis quelques heures. Ne souriez pas par dédain, ne prenez pas le risque de vous fondre dans la cohorte des « bien-pensants » dogmatiques et serviles. Saisissez la chance de retrouver un peu d’espoir de fraternité, solidarité qui remontent des profondeurs humaines après avoir traversé les miasmes et toutes les séquelles, traumatismes de décennies de soumission à tous ces cortèges de manifestations encadrées et « nassées ».

Aux poètes, aux artistes et à toutes celles, ceux repliés dans leur "Privacy in progress« , derrière leur »burn out" plongez plumes, pinceaux et concepts dans l’encrier d’un instant de l’histoire qui nous ranime, nous redonne l’intelligence du vivant avant le meilleur ou peut-être le tragique. »


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