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Commentaire de plandreau

sur « Nantes appartient à la Bretagne, que cela vous plaise ou non »


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plandreau 8 septembre 2019 13:13

 Sur le fond d’abord. Ce n’est pas tant les faits pris les uns séparément des autres qu’il faut relever ici que l’échafaudage grossier qui en est fait et qu’il faut dénoncer pour ce qu’il est. L’essentiel du propos consiste en effet à démontrer que les sentiments d’appartenance à une communauté, une région, une histoire commune, une culture ne pourrait être légitimes que s’ils reposent sur des bases ethnicistes/linguistiques. Sans vouloir lui faire ce procès, on est donc clairement ici sur un formattage idéologique proche des thèses de f-de-souche que l’auteur doit penser comme universel et qu’il voudrait donc voir appliquer à la Bretagne et aux bretons.

Or la Bretagne en tant qu’Etat indépendant puis en tant que Province a rapidement dépassé les frontières du groupe ethnique qui lui a donné son nom. En fait, comme l’auteur de ce petit papier le souligne, le breton a rapidement perdu sa prédominance, ne serait-ce que parce que ses élites parlaient le français (et non pas le gallo). Le modèle Ein Volk, Eine Sprache que le formattage idéologique de l’auteur de ce papier essaie de calquer sur la Bretagne ne s’applique tout simplement pas à la Bretagne

Ensuite quand on veut vouloir se référer aux faits, il faut savoir les hiérarchiser et surtout ne pas les interpréter à sa sauce. Que les familles ducales aient été d’origines normandes ou françaises à un moment donné n’est que le reflet de l’époque où les grandes familles se partageaient l’Europe. Que Pierre Ier (dit Mauclerc) ait été d’une famille capétienne et originaire de l’actuelle Normandie ne change en rien au fait qu’il soit devenu Duc de Bretagne. De toute la Bretagne. D’ailleurs Pierre de Dreux s’est battu toute sa vie pour l’indépendance de la Bretagne (avec Nantes comme capitale). Avec des arguments aussi spécieux, on pourrait tout aussi bien soutenir que Londres n’est pas anglaise parce que la famille royale est de Hanovre, ou que Berlin n’est pas allemande parce que Charles Quint ne l’était pas, où que le Danemark est français parce que la famille royale est d’origine française. On pourrait à la rigueur s’attendre à ce type d’arguments de la bouche d’un élève de primaire, mais pas d’un type qui prétend nous éclairer de ses lumières !

En fait, tout est à l’avenant, l’auteur de ce petit papier tort le coup aux faits pour leur faire dire ce qui va dans le sens de son formattage idéologique. Je ne reprendrais que l’exemple de LA frontière linguistique. Le lecteur un tant soit peu intelligent aura compris sans qu’il soit nécessaire de tout reprendre

** LA ** frontière linguistique. Argument qu’il faut bien qualifier de mensonger puisque dans la vraie vie, ce genre de frontière ressemble plus à l’estran de nos rivages bretons qu’à la ligne Maginot que les convictions idéologiques de l’apostilleur lui font s’imaginer. L’estran, c’est cette zone entre les plus hautes marées hautes, et les plus basses marées basses, une zone de transition où l’on est à la fois marin et terrestre. C’est pareil pour les langues.

L’argument de la ligne Maginot linguistique est de plus tout empreint d’ethno centrisme qui s’imagine que notre monde français d’aujourd’hui, à savoir quasi uni-linguiste est le monde de nos ancêtres. Ce qui n’était absolument pas le cas. Avant que les rois de France et la république n’imposent leur langue aux populations basques, vendéennes, picardes, normandes, bretonnes etc, le multilinguisme était très répandu. Le mensonge est double qui plus est puisque cette « frontière » qui n’en est pas une a bougé à l’intérieur de la Bretagne pendant des siècles sans qu’aucun apostilleur ne vienne expliquer aux zones nouvellement majoritairement gallèses qu’elles n’étaient plus en Bretagne.

 


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