@Kapimo
La récupération ultérieure a fait rentrer « l’affaire Dreyfus » dans une dimension méta-hystérique plus qu’historique très éloignée du procès et encore plus de l’histoire sur laquelle le point de vue allemand peut nous éclairer et dont on peut voir qu’il est sans aucun rapport avec l’antisémitisme !
Gerd Krumeich* : L’affaire Dreyfus vue d’Allemagne (professeur émérite de l’Université de Düsseldorf, spécialiste de l’histoire franco-allemande spécialement, de la Première guerre mondiale)
[......] Les réactions du gouvernement allemand aux événements en France se sont déroulés en trois phases consécutives.
Il s’agissait d’abord de réagir à une information donnée par le journal à grande diffusion Le Matin annonçant en 1894 une affaire de trahison du secret militaire au profit de l’Allemagne. L’ambassadeur allemand, le comte von Münster dément catégoriquement. On n’en parle plus jusqu’en 1896-97, au moment où les Allemands découvrent l’alliance franco-russe et où est publié le pamphlet de Bernard Lazare L’Affaire Dreyfus – Une erreur judiciaire, début novembre 1896. C’est à partir de cette date que l’attaché militaire allemand Schwartzkoppen remarque que le bordereau censé avoir été envoyé par Dreyfus l’avait en fait été par Esterhazy en relation avec lui à l’insu de son ambassadeur. En automne 1897, les autorités militaires allemandes décident de rappeler à Berlin leur attaché militaire en France. Ce geste est aussitôt interprété comme un aveu et renforce la nervosité de l’opinion française. [...] Le gouvernement allemand avait tout fait pour rétablir la situation. En vain. Les Allemands niaient et les Français affirmaient avoir la preuve du contraire. Le retrait de l’attaché militaire allemand Schwartzkoppen grillait la piste Esterhazy et convainquit les Français que l’Allemagne n’était pas innocente. La focalisation sur Dreyfus était telle qu’aucune autre piste n’était envisagée.Le gouvernement allemand ne fit que réagir aux affirmations françaises. En ce sens, il jouait un double jeu car il ne livrait pas le vrai coupable qu’il connaissait. Il se contentait de ce qui sonnait comme une dénégation.
La « gifle » officielle allemande intervint en mai 1898 et prit la forme d’ une déclaration officielle :
« le gouvernement allemand n’a jamais dit qu’il n’avait pas eu de relation avec Esterhazy ».
Les Allemands ont ainsi livré le coupable mais les Français ne veulent pas le croire. Jusqu’à l’absurdité.
[...] https://www.lesauterhin.eu/laffaire-dreyfus-vue-dallemagn/