Si le droit organise la société, il est tout aussi vrai que les rapports de force à l’intérieur de celle-ci déterminent le droit. La propriété privée est emblématique de cette vérité. L’article de la constitution française qui sacralise ce droit découle directement de la prise du pouvoir politique par la bourgeoisie après la révolution française.
La propriété privée n’est pas un droit naturel, car— n’en déplaise aux libertariens— les droits naturels n’existent pas. Il n’y a que des constructions juridiques. Ceci, en soi, ne rend pas les droits ainsi institués moins légitimes que s’ils étaient effectivement naturels. Une communauté sage aura des lois sages et les droits institués seront raisonnables. Un droit n’est pas « mauvais » simplement parce qu’il n’est pas naturel.
Il me paraît qu’il faut distinguer le produit du travail et les ressources naturelles (principalement le sol et le sous-sol). Qu’on devienne propriétaire du résultat de son travail ou de ce qu’on achète avec ce résultat me paraît un principe valable. Par contre l’appropriation privée de la nature dépouille les autres membres de la communauté. L’économiste classique John Stuart Mill et l’économiste néoclassique Léon Walras, pourtant tous deux considérés comme des pères du libéralisme, défendent la propriété collective de la terre.
Au-delà de la question OUI ou NON au droit de propriété, éternel sujet de débat et de polémique, se pose la question des modalités de la propriété. Deux sous-questions : comment accède-t-on à la propriété privée ? Et quels sont les droits effectifs du propriétaire ? Concernant l’accès à la propriété, l’héritage me paraît très problématique. Par l’héritage, on transmet la propriété... et la non-propriété : une génération transmet à la suivante l’inégalité de la société. Une limitation me paraît souhaitable.
Les droits conférés par la propriété privée doivent être limités pour tenir compte des intérêts des non-propriétaires. La société doit être habitable de façon supportable pour l’ensemble de ses membres.
Je défendrais un programme qui institue la propriété collective su sol, la mixité privé + collectif pour le capital et qui élargirait la propriété privée pour le logement.