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Accueil du site > Culture & Loisirs > Culture > Houellebecq : le devoir d’être abject

Houellebecq : le devoir d’être abject

« Acceptable comme tout écrivain de valeur, Houellebecq ne l’est pas. Son encre est trempée dans le cyanure, sa littérature est dangereuse, parce qu’elle dit le pays dans lequel nous vivons », Marc Weitzmann, Houellebecq, Aspect de la France

« Merci d’être né, Michel », Pierre Cormary, Houellebecq, notre frère

Les romans de Michel Houellebecq font écrire, parler, sourire, hurler. Mais sont-ils réellement lus ? On a l’impression à y regarder de près que tout le soufre qui entoure chaque nouvelle parution d’un opus de l’écrivain le plus « déprimant » du moment, équivaut à de passionnelles polémiques destinées à faire vendre des journaux, ou à faire hurler des indigents. Rien de ce qui est dit autour de l’auteur ne concerne l’auteur. Rien de ce qui est écrit à propos de ces œuvres ne concernent ses œuvres. On se retrouve malgré soi coincé par une critique méta-textuelle qui interprète, extrapole, s’alarme sans jamais se soucier du texte lui-même. Le nouveau Houellebecq intitulé La Possibilité d’une île, n’a évidemment pas échappé à cette destinée funeste...

Houellebecq, le cynique

Houellebecq est un monstre. Ou devrais-je plutôt dire derrière Pierre Cormary que Houellebecq est « Le seul écrivain français qui ait compris l’époque ! Le seul qui mérite vraiment d’être lu »[1] ? Houellebecq dénonce l’échec d’une civilisation ! Tous ses personnages, généralement des hommes médiocres, souffrent, cherchent désespérément l’amour de l’autre. Mais les illusions de la libération sexuelle, l’individualisme primaire qui s’est installé dans les rapports humains, chacun revendiquant pour lui seul son droit au plaisir, le sadomasochisme, la compétition sexuelle, la négation ou mutilation du corps d’autrui, autant de murs, autant de fossés qui séparent les individus. Autant de limites posées par la gestion des intérêts privés, l’égoïsme. Le tout à l’ego. Autant de remparts à l’amour ! Oui ! Ca n’est pas seulement la société de consommation, et la fausse libération sexuelle qui sont les ultimes coupables de nos déchéances amoureuses. Société délétère incapable d’enseigner l’amour désintéressé de son prochain ; une société qui véhicule une image fausse, illusoire des corps ; une société qui stigmatise les beaux corps. C’est la faute au moi. Un « moi » pour Houellebecq, qui n’existe pas. Nous ne savons pas nous trouver. Le moi n’est qu’un objet en souffrance focalisé par la mort. De fait, chez Houellebecq, tous ses personnages sont aux prises d’une spirale irréversible. Tout d’abord, l’attachement à l’ego : origine de toute souffrance. Nourri par la compétition sexuelle, il l’est d’abord par la mort. Mort et souffrance. « Il est faux de prétendre que les être humains sont uniques, qu’ils portent en eux une singularité irremplaçable. (...) C’est en vain, le plus souvent, qu’on s’épuise à distinguer des destins individuels, des caractères[2]. » Notre mort et notre souffrance ne se partagent pas ; elles sont notre pleine essence. Le reste ne demeure dans la mémoire qu’à peine plus qu’un roman qu’on aurait lu[3]. Cette association inextricable à notre fin tragique annoncée ne permet pas l’amour. Et pourtant ! Qu’ils soient misérables, pleins de haines, froids, médiocres : tous les hommes rêvent d’amour. Reste que les hommes et les femmes en rêvent. Mais peuvent-ils seulement atteindre leur désir ? Les quinquagénaires salivent sur des nymphettes dont les corps sont très beaux, bandants, mais vides, creux. De petites « garces » de 17 ou 18 ans incapables, bien souvent par connerie crasse, de sortir de l’amour de leur petite personne sans existence, sans importance[4]. Des crétines aussi belles que stupides. Plus tard, lorsqu’elles seront devenues des femmes, elles prendront « des calmants, (feront) du yoga, (iront) voir des psychologues ; (les femmes) vivent très vieilles et souffrent beaucoup. Elles vendent un corps affaibli, enlaidi ; elles le savent et en souffrent. Pourtant elles continuent, car elles ne parviennent pas à renoncer à être aimées. Jusqu’au bout elles sont victimes de cette illusion. À partir d’un certain âge, une femme a toujours la possibilité de se frotter contre des bites ; mais elle n’a plus jamais la possibilité d’être aimée. Les hommes sont ainsi voilà tout »[5]. Mais sommes-nous seulement programmés pour l’amour ?

Houellebecq est cet écrivain cynique, sans concession sans compromission. Écrivain qui dénonce son temps, qui refuse de travestir la réalité, qui jette sur les événements et les comportements, un regard froid et lucide, un regard glacé...

Et Houellebecq est au fait de notre réalité. Avec la sortie d’Extension du domaine de la lutte[6], il espérait encore changer le monde, depuis, il n’espère même plus. Il ne se voit plus en conflit avec le monde[7]. Probablement parce qu’il sait que la littérature aujourd’hui ne changera plus rien...

Houellebecq est donc tout simplement de cette race des pessimistes. Oui ! Des grands pessimistes post-Schopenhaueriens qui ont beaucoup de mal à se guérir.

Et si...

Et si finalement Schopenhauer avait raison ? Et si la vie n’était qu’un pendule oscillant entre souffrance et ennui ? Question que Houellebecq se pose irrémédiablement. Qui paraît hanter tous ses romans depuis le premier, Extension du domaine de la lutte[8]. Lui, dont la plume souhaite rendre ses lettres de noblesse au philosophe allemand armé d’un irréversible pessimisme, et que Nietzsche avait, selon les mots mêmes du romancier, si mal compris...

Houellebecq, le moraliste

À l’instar de Camus, de Dagerman ou de Sartre, Houellebecq est la conscience de son temps, de toute une génération dont il est devenu le porte-parole. Il est notre miroir. Un miroir qui renvoie une image si abominable qu’elle nous interpelle et nous effraie. Une image si insupportable qu’elle nous révolte. Houellebecq n’est pas un écrivain monstrueux. Juste un monstre qui met le doigt sur notre condition humaine et détestable. Il est la victime de la vindicte des « faibles », des hommes du ressentiment qui ne supportent pas d’être ainsi mis à jour. Il pourrait être comparé à ce messager dans la tragédie grecque antique, qui, apportant une mauvaise nouvelle à la cité, se voit la cible de la colère de tous car, ne pouvant détruire le message, tous s’en prennent naturellement au messager. Je vous avoue donc être complètement désespéré par toute ces lectures si convenues, bâclées, banales qui voient en Houellebecq lui-même, un écrivain désespérant et atrophié par le désespoir morbide d’un suicidaire qui déteste la vie. Quand on ne lui reproche pas d’écrire des romans de gare saturés de scènes pornographiques et de réflexions pseudo-métaphysiques, telle cette perle : « Je m’étais dit que les hommes étaient vraiment de braves bêtes, parfois, dès qu’il était question de la chatte »[9], on reproche à l’écrivain francophone d’être désespéré. Quelle belle vérité !

Mais pas de méprise ! Michel Houellebecq n’est pas l’auteur du « désespoir ». Il n’est pas un auteur pour suicidaire sous Prozac. Michel Houellebecq est un écrivain dé-sengagé, tragique, désespéré. Écrivain non de l’absurde, mais dont l’absurde ne lui est en rien étranger. Cet absurde né de cette absence d’espoir. « L’homme se trouve devant l’irrationnel. Il sent en lui son désir de bonheur et de raison. L’absurde naît de cette confrontation entre l’appel humain et le silence déraisonnable du monde », écrivait Camus dans Le Mythe de Sisyphe[10].

Nous avons découvert Houellebecq dans sa dimension tragique.

Je lui appliquerais d’ailleurs volontier cette brillante formule de Nikos Kazantzakis : « Je ne crains rien, je n’espère rien, je suis libre ». Voilà la représentation parfaite dont Houellebecq se fait de la vie[11]. Une représentation à la fois morale, éthique, existentielle, et métaphysique. Parce que osons - contre la fronde - le dire une bonne fois pour toute : Houellebecq est un « moraliste »[12]. Un vrai ! Un de ceux que l’on pourrait ranger aux côtés de La Rochefoucault ou de La Bruyère.

Et pour illustrer cette idée, prenons l’exemple de son troisième roman, Plate-forme[13] : l’écrivain dépeint le cheminement initiatique d’un homme à Bangkok, qui s’abandonne aux plaisirs du body massage, avant de décider, avec son amie Valérie, rencontrée là-bas, de proposer un club « où les gens puissent baiser ». Certes, pas entre eux. Non ! Michel le personnage principal, ne pense pas à un club échangiste, si répandu ces dernières années en Occident. Pourquoi ? Eh bien tout simplement parce que selon l’anti-héro houellebecquien, « il doit certainement se passer quelque chose, pour que les Occidentaux n’arrivent plus à coucher ensemble ». La vision de cette dégradation des rapports est parfaitement vue par le personnage de Houellebecq. Michel veut en réalité, leur proposer des autochtones : parce que celles-ci « n’ont plus rien à vendre que leur corps, et leur sexualité intacte ». Pas de lutte des sexes, pas de hargne, seul le bon rapport avec le partenaire compte.

N’est-ce pas Houellebecq qui encensa les Thaïlandaises, à la sortie de son roman, faisant valoir leur savoir-faire en matière sexuelle, les considérant comme des femmes, à l’inverse des occidentales, qui savent réellement donner de l’amour et du plaisir aux hommes ? En effet...

Les mauvaises interprétations, incapables de s’élever, peuvent démarrer. Eh bien, contrairement à toutes ces lectures convenues de « bien-pensants », il ne faut certainement pas voir dans ce roman, une apologie du tourisme sexuel, mais bien la dénonciation de la déliquescence du monde occidental, causée par l’ultralibéralisme, que Houellebecq avait déjà entamée avec Extension du domaine de la lutte[14].

Faire le constat d’un déclin de la sexualité étendu à l’ensemble des couches sociales, aux hétérosexuels comme aux homosexuels, épargnant à peine les jeunes ou les adolescents (lorsqu’ils baisent). Constat d’autant plus fort, que Michel Houellebecq remarque, à juste titre, que l’absence de sexe entraîne irrémédiablement d’autres dérives : « If you have no sexe, you need ferocity. That’s all[15]... »

Nous sommes bien loin de l’immoralisme dont on le taxe sans arrêt. Je l’ai déjà dit : Houellebecq est cynique ; il n’attend plus rien des hommes. Et il n’a même plus le désir de changer quelque chose... Un roman ne changera jamais rien !

Pour rajouter à l’infamie, Houellebecq use d’une écriture grise[16]. Sacrifie le style au profit des idées. Des idées au service d’une vision politique du monde.

Houellebecq, le politique

Dans un texte de toute première catégorie, Sortir du XXe siècle ?[17], Michel Houellebecq écrit la chose suivante : « La littérature ne sert à rien. Si elle servait à quelque chose, la racaille gauchiste qui a monopolisé le débat intellectuel tout au long du XXe siècle n’aurait même pas pu exister. Ce siècle, bien heureusement, vient de s’achever ; c’est le moment de revenir une dernière fois (on peut du moins l’espérer) sur les méfaits des « intellectuels de gauche », et le mieux est sans doute d’évoquer Les Possédés, publié en 1872, où leur idéologie est déjà intégralement exposée, où ses méfaits et ses crimes sont déjà clairement annoncés à travers la scène du meurtre de Chatov. Or, en quoi les intuitions de Dostoïevski ont-elles influencé le mouvement historique ? Absolument en rien. Marxistes, existentialistes, anarchistes et gauchistes de toutes espèces ont pu prospérer et infecter le monde connu exactement comme si Dostoïevski n’avait jamais écrit une ligne. Ont-ils au moins apporté une idée, une pensée neuve par rapport à leurs prédécesseurs du roman ? Pas la moindre. Siècle nul, qui n’a rien inventé. Avec cela, pompeux à l’extrême. Aimant à poser avec gravité les questions les plus sottes, du genre : « Peut-on écrire de la poésie après Auschwitz ? » ; continuant jusqu’à son dernier souffle à se projeter dans des « horizons indépassables » (après le marxisme, le marché), alors que Comte, bien avant Popper, soulignait déjà non seulement la stupidité des historicismes, mais leur immoralité foncière. »

Comme Dantec, Houellebecq ne retient des années 70, qu’un vilain souvenir, vomissant cette pensée de gôche, intelligentsia précaire aux fausses valeurs. Cette gôche à vomir, gôche caviar, incarnée par l’icône Mitterrand, grand homme politique qui fit entrer la gôche à l’Élysée en 1981, puis la droite en 1984. Valeurs périmées aussi vite que cueillies de l’arbre, cette gôche mitterrandiste qui sut, avec quel brio, trahir tous ses partisans, préparant, ô ! ironie, avec quel talent subtil, l’entrée en grandes pompes, du grand capital dans notre belle France moderne des années 80, l’entrée par ricochet de l’aliénation de l’individu à la machine économique ; gôche, parti le plus bête du monde, qui ne sut faire autrement que travailler contre son propre camp en préparant de façon irréversible, une très belle extension du domaine de la lutte pour tous les travailleurs, les futurs diplômés, les générations à venir, générations Mitterrand qui furent trahies !

Michel Houellebecq a évidemment raison de vouloir faire la guerre à ces histrions de fortune, ces intellectuels hallucinés qui avaient la haute prétention, cette méprisable vanité de remettre à zéro les compteurs de l’histoire ; il s’agit donc de faire le procès de ces intellectuels de gôche, vite, avant que tous les ouvriers de France, tous les employés, tous ces gens d’ « en bas » comme certains disaient benoîtement, désespèrent des valeurs sociales-démocrates, et se mettent à voter pour des ultra-libéraux, voire pis, des fascistes populistes de tout horizon.


Par l’incipit de ce texte magnifique, Houellebecq ne fait que stigmatiser le fait qu’il appartient à une génération qui fut marquée profondément par le vocabulaire creux et pompeux du marxisme, dénonçant avec justesse combien tout ce qui prétend libérer l’individu l’aliène au contraire. Grand Héraut de notre médiocrité moderne, Houellebecq dénonce le schéma du modèle privé : toutes ces relations humaines non rentables que la société de consommation balaye sous le tapis ; il brasse des thèmes complexes et dérangeants tels, la solitude, la frustration comme principe constitutif de nos personnalités fin de siècle, la lutte à mort pour la satisfaction de nos désirs consuméristes, dans un univers où la logique libérale organise tout, du travail à la sexualité, rien n’échappant aux « eaux glacées du calcul égoïste ». Un Houellebecq certes controversé. Un Houellebecq qui ne demeure pas figé dans ses idées. Probablement même, un Houellebecq qui parle à une génération « désenchantée » : les 30-45 ans. Il est à noter que son premier roman est encore très marqué extrême gauche. Une marque de fabrique qui ne se trahit tout de même pas par son examen sensé et critique de la « libération sexuelle » en tant que moteur de toute relation entre individus, dans sa vision très « hobbesienne » ou très « darwinienne » de notre société « postmoderne ».

Houellebecq, l’écrivain postmoderne

Et puisque je cite ce concept-clé de ces dix dernières années : le « postmoderne », posons-nous une question : ne faudrait-il pas précisément aborder son nouveau roman, ainsi que toute son œuvre, avec cette idée en tête : Houellebecq est le chef de file d’une littérature « postmoderne » ? En effet ! Il est également un écrivain qui écrit contre le vice, le nihilisme, et l’immoralisme rampant qui agitent notre époque, s’installant insidieusement. Écrivain « postmoderne » car il n’assassine pas la forme du roman, il ne vilipende pas les techniques du roman. L’essence du roman est éteinte depuis Nathalie Sarraute[18] et le nouveau roman qui lui firent la peau. Houellebecq est le plus important écrivain de son temps, car il a saisi tous les signes, les enjeux de la postmodernité dans laquelle nous nous engouffrons tête baissée. La définition de « postmoderne » que j’emploie est celle d’une notion valable pour quelques millions d’Occidentaux pour qui la vie est rapide, rationnelle, efficace, propre, désenchantée et magique ; pour qui la modernité est assumée et existentielle et non vécue sur le mode de l’imposition d’un quotidien technique et instrumental. La prolifération des « post », « néo », « high-tech » révèle ce sentiment d’une modernité assumée et vécue au second degré. Est post-moderne donc ce qui permet le retour du passé sur le mode de l’instable, du changement et du progrès propre au modernisme ; le retour du passé n’étant pas pour autant retour au passé. Et même s’il existe plusieurs acceptions de ce concept, bien sûr, c’est l’acception philosophique que je retiens, celle qu’emploie Jean-François Lyotard dans La Condition postmoderne[19].

Et je le redis : Michel Houellebecq est le plus grand écrivain « postmoderne » de ce siècle naissant, - aux côtés de Maurice G. Dantec. À eux deux, ils sont les écrivains les plus pénétrants, les plus incisifs lorsqu’ils décrivent notre époque contemporaine et sa décadence. Ils réforment les codes en vigueur, ils transforment à leur manière la littérature : Houellebecq en vidant la langue française de toute fioriture stylistique et inutile, et en réinventant le roman journalistique selon Zola, en l’innovant, faisant de ses romans de véritables dynamites littéraires à thèses multiples. Soit ! « Il fait tâche ! » Mais auprès de qui ? Des professeurs de lettres moribonds ? Des censeurs de la pensée correcte ? Des chiens de guerre toujours alléchés par le scandale et la chair fraîche ? Ne serait-ce pas finalement une formule qui cache une réelle incompréhension du sillage dans lequel s’est à présent inscrit la littérature française, trop souvent au point mort, enfermée dans les clichés et le « psy-cul », vilaines histoires de fesses, telles celles de Catherine Millet, Virginie Despentes et consœurs, inventant une littérature féminine et féministe, en réponse à la littérature machiste masculine, mais qui n’est en fait qu’une vague imitation décadente, quand ce n’est pas la prose sordide d’une Christine Angot singeant maladroitement le style de Duras, et nous racontant ses cunnilingus échangés avec une lesbienne ou ses aventures ordinaires d’une décérébrée ordinaire et platement banale ?

Un roman de Houellebecq paraît, si on ne s’y approche pas de plus près, écrit systématiquement sur le même thème. Les personnages sont stéréotypés, les situations presque caricaturales. Tous les caractères de l’œuvre houellebecquienne paraissent englués dans un réel sordide. Les romans sont des narrations de faits, de scènes dénuées de toute fiction. L’histoire, l’intrigue, le nœud même qui caractérisait le roman jusque-là semble évacué au profit d’une peinture sociologique d’une complaisance exacerbée. Et ce réalisme attaché à la plume de Michel Houellebecq semble rejeter dans les termes mêmes de la conséquence du choix de peindre le réel avec une fidélité que seul Balzac connaissait, une façon de rejeter définitivement l’art. Lire et apprécier Houellebecq, c’est accepter que l’art du roman, - si son âme est encore parmi nous ! -, n’est plus la réinvention même du réel, mais la mimésis la plus parfaite. Une sorte de traduction du monde tel qu’il est, ou prétendu telle...

Houellebecq transfigure le banal, dénonce la haine ordinaire, le racisme rampant, celui qui est véhiculé par une pensée molle, celle de l’homme du ressentiment pour reprendre la formule nietzschéenne. Michel Houellebecq dispose de cette distance, cette acuité sévère qui lui permet de rationaliser les comportements ou des sentiments ressentis par le nombre sur le mode du « vécu ». Michel Houellebecq est le diaporama d’un malaise « civilisationnel », d’une dépression généralisée. Il est comme la chouette de minerve de Hegel qui prend son envol à la tombée de la nuit. Son regard se fait synthèse d’une catastrophe générale, témoin des catacombes de l’Occident, fin d’un empire économique, technique et philosophique.

Houellebecq, le visionnaire

Dans l’hystérie collective qui entoure la « sulfureuse » parution d’un nouveau roman de Michel Houellebecq, tout et n’importe quoi est dit : « infâme écrivain », « politiquement incorrect », « misogyne », « raciste », « petit bonhomme animé par la vengeance et la haine du genre humain ». Bref, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’on y voit finalement assez peu clair. Devrait-on dire de Houellebecq ce que Malraux disait de Céline ? « Grand écrivain, mais pauvre type » ? Dans le même registre, faudrait-il, comme certains le firent avec Céline, distinguer l’œuvre de l’artiste ?

La question qu’il faudrait avant tout se poser est la suivante : qu’est-ce qui fait courir, et surtout parler Houellebecq ? Lucidité ? Cynisme ? Désespoir ? Haine ?

Quand après avoir écrit un roman[20] dénonçant ce qu’il appelle la « bêtise » d’une religion, précisément l’islam, sa dangerosité sur le plan politique et idéologique, et qu’il réitère en personne répondant à la revue Lire  : « (La) religion la plus con, c’est quand même l’islam. Quand on lit le coran, on est effondré[21]... ! » On a l’impression que tout est clair !

Oui ! Cela semble clair ! À certains moments, c’est probablement la haine qui le fait parler... Oui ! C’est en effet possible ! Il est probable qu’avec Houellebecq, nous sommes bien dans la vengeance, comme le prétend Patricola[22]. Reste que l’islam se doit encore d’en passer, à l’instar de son aîné le christianisme, par son « siècle des Lumières ». Il n’en demeure pas moins non plus qu’un certain islam, dans la confusion des débats, se présente, avec ses controverses autour du voile, les attentats meurtriers perpétrés par des minorités intégristes qui prônent un islam idéologisé, comme un islam politique qui mène en fait un combat contre la République et contre la démocratie, ne faisant que très peu cas de la vie humaine.

Michel Houellebecq serait alors cet « iconoclaste de la République des lettres »[23] dont parle Patricola, que cela ne changerait pas grand-chose au côté visionnaire de son œuvre, à sa grande lucidité et son acuité en matière d’observation de notre monde contemporain. Les attentats du 11-Septembre 2001, de Bali en 2002, et récemment de Londres montrent bien que certaines « interprétations » de l’islam font problème... que la lucidité de l’écrivain est une sorte de fil directeur à sa sulfureuse plume.

Houellebecq, le misanthrope

Sans jamais se laisser aller au moindre psychologisme, Houellebecq fonde ses romans sur le moule anglo-saxons, notamment celui de Bret Easton Ellis. Il dénonce la cruauté ou la méchanceté qui courent depuis le début de l’humanité. Dès l’enfance, on a le sentiment que l’homme est « programmé » pour faire souffrir ses congénères. Cette vision très hobbesienne l’amène à introduire dans ses romans des descriptions crues, sans nuances qui nous montrent combien en Occident, si l’on n’y prenait pas garde, en observant simplement nos contemporaines, en analysant l’histoire et sa violence accoucheuse du progrès tel que l’écrivait Karl Marx, on glisserait progressivement vers une sorte de misanthropie crasse.

Emplis de compassion pour les multiples victimes qui jalonnent ses œuvres, nous acceptons alors volontiers de suivre Houellebecq sur le chemin vers lequel il nous entraîne, le seul qui soit encore un chemin d’espoir pour nous tirer de la « barbarie » si on en croit l’auteur : celui de l’eugénisme. Ca n’est pas une « solution finale ». Pas un « eugénisme fasciste ». C’est un projet scientifique qui permettrait l’invention et non la sélection. Inventer une espèce humaine qui serait enfin délivrée du désir sexuel et de la mort [24].

Une idée novatrice qui se trouve reprise et continuée par le nouveau roman de Michel Houellebecq, La Possibilité d’une île [25].

Dans Les Particules élémentaires [26], Michel, le scientifique, imaginait une espèce asexuée et immortelle. Dans ce nouveau roman, l’idée de l’immortalité est reprise. Le personnage principal, Daniel1, qui est par ailleurs un artiste célèbre pour ses sketchs comico-haineux, - un de ces personnages houellebecquiens englués dans une vision du monde cynique et décalée, qui admet que ses sketchs véhiculent bien la haine raciale et la haine de son prochain, car, quand on fait rire, on vous donne le droit d’être abject - couche sa vie sur le papier afin que ses futurs clones puissent en prendre connaissance et ainsi éviter de nombreuses erreurs. Houellebecq ose ainsi aborder avec beaucoup de discernement le sujet si controversé du clonage. Bienvenu dans l’ère du « post-humain ». Ce que Daniel25 dans le dernier roman de Houellebecq, appelle le « néo-humain ».

Voilà donc la grande novation houellebecquienne, à peine tentée si l’on peu dire par l’avant-dernier, Plate-forme[27] : l’anticipation. Des « néo-humains » en quête d’immortalité. Evidemment ! Le désir d’éternité ! Qui n’en a jamais rêvé ? Plus que jamais notre société consumériste, individualiste, nihiliste, athée, incapable de se penser dans la pérennité du groupe, pose cette alternative comme salvatrice. L’éternité comme dernier espoir d’accès au bonheur ?


On connaît la fameuse « quête » du bonheur en laquelle Houellebecq ne croit pas [28], ou ne croit plus, lui qui, par ce livre, se pose une autre question fondamentale, celle du sens de la vie ? Heidegger avait, jadis, en son temps, repris la vieille question antique : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » Une question fondant toute la recherche du sens. Un sens que la secte des Elohims bien évidemment se pose, et pose dans ce roman.

L’intérêt de citer cette rencontre entre le narrateur et le prophète des Elohims pour Houellebecq reste bien entendu de souligner les limites de la science, de la technique et surtout des religions. Religions qui, dans ce roman, sont réduites à de vulgaires phénomènes de pure consommation.

Mais la vie éternelle est-elle seulement une possibilité envisageable ? Et aurait-elle pour autant un sens ? Simone de Beauvoir dans Les Hommes sont tous mortels [29] en dénonçait déjà la supercherie. L’homme ne mérite pas un tel destin ! Car c’est le destin le plus funeste qui soit !

Quand à Houellebecq, s’il ne montre plus beaucoup de compassion pour ses « frères » humains, il continue tout de même de les créditer d’une faculté qui leur confère toute leur dignité : l’émotion. Faculté que la vie éternelle leur ôterait définitivement :


« Je compris également que l’ironie, le comique, l’humour devaient mourir, car le monde à venir était le monde du bonheur, et ils n’y auraient plus aucune place [30]. »


L’émotion, serait donc la rançon à payer pour obtenir le bonheur ? Et Houellebecq en écrivain désespéré au sens grec du terme règle la question sans illusion.

L’homme aussi évolué qu’il soit, scientifiquement, techniquement, culturellement, resterait quoi qu’il prétende, une bête, un infrahumain, un post-humain dont les sentiments auraient disparu, et ne seraient pas plus heureux qu’autrefois. L’homme ainsi ne mériterait donc pas la vie éternelle, car il ne sait que produire violence et souffrance sur ses propres frères ; en bref, un homo sapiens à peine plus évolué que ses congénères, qui est pour lui-même le plus nuisible des êtres vivants.

Houellebecq, à l’image de ses héros, ressent le mal de vivre. Un mal de vivre sûrement inspiré de la décadence, du nihilisme contemporain, du délitement de la morale. « Elle avait raison : je suis un tout petit enfant infirme, très malade, et qui ne peut pas vivre. Je ne peux pas assumer la brutalité du monde ; je n’y arrive tout simplement pas [31]. »

Pour survivre, rester vivant en ce monde qu’il juge derrière Schopenhauer, n’être qu’« une souffrance déployée » [32], Houellebecq n’a qu’une seule parade, qu’une seule carte : la poésie. Il est peut-être même l’un de nos derniers poètes. Mais grâce à elle, grâce à la poésie, il peut « survivre ». Survivre par l’écriture. Une écriture qui lui permet, - et nous permet - de ressentir quelques moments d’infini.

Houellebecq a donc compris la leçon : il ne doit pas mourir. Il doit tenir bon ! Car, « un poète mort n’écrit plus. D’où l’importance de rester vivant » [33].



[1] Pierre Cormary, « Houellebecq, notre frère » in Journal de la Culture, n° 16, oct/nov. 2005.

[2] Michel Houellebecq, Les Particules élémentaires, Flammarion, 1998.

[3] « En somme, l’idée d’unicité de la personne humaine n’est qu’une pompeuse absurdité. On se souvient de sa propre vie, écrit quelque part Schopenhauer, un peu plus que d’un roman qu’on aurait lu par le passé », opus. Cité.

[4] « Je me souvenais d’être passé le matin même devant le lycée Fénelon. C’était entre deux cours, elles avaient 14, 15 ans et toutes étaient plus belles, plus désirables qu’Isabelle, simplement parce qu’elles étaient plus jeunes. Sans doute étaient-elles engagées pour leur part dans une féroce compétition narcissique,
- les unes considérées comme mignonnes par les garçons de leur âge, les autres comme insignifiantes ou franchement laides ; il n’empêche que pour n’importe lequel de ces jeunes corps un quinquagénaire aurait été prêt à payer, et à payer très cher, voire le cas échéant à risquer sa réputation, sa liberté et même sa vie »,
La Possibilité d’une île, p. 84, Fayard, 2005.

[5] Les Particules élémentaires, Flammarion, 1998.

[6] Opus. Cité

[7] « Il faut écrire un texte religieux pour changer le monde », Interview Les Inrockuptibles, octobre 2005.

[8] Editions Maurice Nadeau, 1996.

[9] La Possibilité d’une île, Fayard, 2005.

[10] Folio-Gallimard.

[11] « Cela dit, il avait eu tort sur un point : on peut très bien vivre sans rien espérer de la vie ; c’est même le cas le plus fréquent », Lanzarote, Librio, p. 54, 2002.

[12] Voir à ce propos l’excellente réflexion tenue par Jean d’Ormesson sur le plateau de l’émission Le Bateau livre, sur la cinq, le 4 septembre 2005.
[13] Flammarion, 2001.
[14] Opus. Cité

[16] Jean-François Patricola, Michel Houellebecq ou la provocation permanente, p. 112, Ecriture, 2005.

[17] Lanzarote et autres textes, Librio, 2002.

[18] Marc Alpozzo, Y a-t-il un avenir du roman ? A propos de Nathalie Sarraute, Lekti-ecriture, 29 mars 2005 : http://www.lekti-ecriture.com/contrefeux/article.php3 ?id_article=135

[19] Jean-François Lyotard, La Condition postmoderne, Rapport sur le savoir, Les éditions de Minuit.

[20] Plate-forme, Flammarion, 2001.

[21] Lire, n° 298, septembre 2001, p. 31.

[22] Jean-François Patricola, Michel Houellebecq ou la provocation permanente, Ecriture, 2005.

[23] Jean-François Patricola, ibid, p. 64.

[24] Michel Houellebecq, Les Particules élémentaires, Flammarion, 1999.

[25] Fayard, 2005.

[26] Opus. cité

[27] Flammarion, 2001.

[28] « N’ayez pas peur du bonheur, il n’existe pas », « Survivre » in Rester vivant et autres textes, Librio, 1999.

[29] Folio Gallimard

[30] La Possibilité d’une île, Fayard, 2005

[31] La Possibilité d’une île, Fayard, 2005

[32] « D’abord, la souffrance », in Rester vivant et autres textes, Librio, 1999.

[33] « Survivre », in Rester vivant et autres textes, Librio, 1999.


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28 réactions à cet article    


  • morice morice 7 décembre 2007 10:19

    Dans cinquante ans, qui se souviendra de Houellebecq ? Personne. On lui a donné bien trop d’importance, c’est tout.


    • Pie 3,14 7 décembre 2007 20:00

      Rien n’est moins sûr , votre commentaire lapidaire dit simplement que vous ne connaissez pas son oeuvre.


    • Adama Adama 7 décembre 2007 10:28

      Dans un an qui se souviendra de Momo ? Même pas sa boulangère !


      • morice morice 7 décembre 2007 10:30

        J’espère bien, Adama, c’est toute la différence !


        • Adama Adama 7 décembre 2007 10:41

          Marc, votre critique de Houellebecq est acerbe et juste. cela étant, il reste tout de même le plus grand écrivain de langue française vivant.Il est ,il me semble, le céline de notre époque, abject certes comme l’était l’auteur de « Bagatelles pour un massacre », mais génial.


          • C.C. C.C. 7 décembre 2007 12:42

            Exactement Adama. A l’instar de Dantec, Houellebecq à l’art d’écrire des pages sublimes ... et de les noyer aussitôt dans un océan de merde. En ce sens, et l’auteur de l’article a absolument raison de le souligner, il nous assène une vision (trop ?) fidèle de ce qu’est la société humaine. C’est en cela qu’il gêne et c’est là qu’est son génie.


          • LAULA LAULA 8 décembre 2007 16:22

            Pour répondre au commentaire de C.C., étant, quant à moi, de nature résolumment optimiste, je n’ai pas du tout la même vision du monde que M, Houellebecq. Aussi aurais-je pour ma part plutôt tendance à retenir de ce que j’ai pu ingurgiter de son oeuvre, que les flots de merde, et non le génie. Je pense qu’il exagère et provoque dans le seul but de se faire connaître. Mais dans ce but, c’est réussi, effectivement et si c’est ce que l’on appelle le génie, alors ok. Certains passages sont écoeurants, horribles, abjects (comme la torture d’un nourrisson décrite au plus près) et ne reflète tout de même pas la société actuelle. Le genre de malades que décrit Houellebecq ne sont tout de même pas la majorité de nos concitoyens, les situations sont poussées à leur extrême. De plus, je trouve que l’écriture n’est pas excellente (sans doute meilleure que la mienne, mais je ne suis pas écrivain professionnel, hein.) En tous cas, je n’oserais insérer dans un bouquin de longues lignes décrivant le mode d’emploi d’un appareil électro ménager, si ma mémoire est bonne, par exemple. C’est se foutre de la gueule du lecteur. A mon avis, c’est du remplissage.


          • olakala 7 décembre 2007 11:14

            Je constate que, dès lors qu’un article de fond se présente, sur ce site, les réactions se font attendre et les votes sont souvent négatifs.On préfère la provocation, le vite-pensé, et l’article lui-même, pour beaucoup de membres, n’est qu’un prétexte à échanger des « amabilités ». Histoires d’ego, de narcissisme : on se regarde dans le miroir de son propre verbe.


            • JoëlP JoëlP 7 décembre 2007 11:20

              Très juste olakala mais on attend votre commentaire éclairé.


            • olakala 7 décembre 2007 12:53

              Rien ne me contraint à formuler un commentaire éclairé, comme vous dites. On peut, il me semble, simplement se contenter, pour un article, de le lire, sans justement entrer forcément dans la course effrénée et parodique du commentaire. Vous savez, en réalité, à quoi me font penser le plus souvent les-dits commentaires, la surenchère qu’ils mettent en place ? Eh bien, oserais-je le dire... la plupart des commentateurs me font penser à des gens qui autrefois traînaient leur lassitude et leur ennui sur des sites pornographiques, en quête de sensations fortes, instantanées (ou feu le minitel rose) et qui désormais se rabattent sur agoravox. Il y aurait un bel article à écire là-dessus...


            • socal 7 décembre 2007 14:38

              ...et qui désormais se rabattent sur agoravox. Il y aurait un bel article à écire là-dessus...

              Chiche !!!...Jetez-vous à l’eau ! smiley


            • JoëlP JoëlP 7 décembre 2007 11:19

              Morice, si on donne tant d’importance à Houellebecq c’est sans doute que cela correspond à quelque chose de très profond. Et il est bien prétentieux de dire ce qui restera dans 50 ans...

              Cormary dit : « Rien de ce qui est dit autour de l’auteur ne concerne l’auteur. Rien de ce qui est écrit à propos de ces œuvres ne concernent ses œuvres. » J’ai le sentiment que cet article, beaucoup trop long, enfonce un peu ce clou en assénant des vérités que l’on a déjà lu un peu partout si on s’intéresse à Houellebecq et à son oeuvre.

              Soyons juste, les citations et références à l’oeuvre sont nombreuses, au moins autant que celles aux exégèses de l’oeuvre mais les commentaires qui en sont tirés ne me semblent pas toujours en rapport avec l’oeuvre mais plutôt en rapport avec des idées dans l’air du temps comme par exemple de tirer dans cette pauvre ambulance de gôche en associant l’affreux (et génial) Dantec, adepte d’Occident et des idées les plus nauséabondes, pour tenir le tube du bazooka.

              Loin de moi l’idée de défendre Millet, Despentes et Angot mais je ne vois pas pourquoi leurs histoires de cul seraient moins dignes de vos commentaires éclairés que celle du triste Michel. Elles sont aussi dans l’air du temps, bien glauque... et puis Angot en politique moraliste et post-moderne du cunnilungus, il me semble que cela ferait un bon article. Non ? Vous ne pensez pas ?

              Il y a quelques trucs bien rigolos comme : « Un (moraliste) de ceux que l’on pourrait ranger aux côtés de La Rochefoucault ou de La Bruyère. » ... « Des grands pessimistes post-Schopenhaueriens qui ont beaucoup de mal à se guérir. »... « L’essence du roman est éteinte depuis Nathalie Sarraute »...


              • thirqual 7 décembre 2007 11:49

                « (et génial) Dantec »

                Merci d’égayer ma journée et de m’aider à optimiser mon espérance de vie. Un bon ricanement par jour, c’est très sain.

                Par contre je suis bien d’accord avec le début de votre commentaire.Difficile au sein de la soupe actuelle de dire qui va sortir du lot et marquer nos descendants.


              • Serpico Serpico 7 décembre 2007 14:36

                JoëlP : « si on donne tant d’importance à Houellebecq c’est sans doute que cela correspond à quelque chose de très profond »

                ***********************

                J’ai -de toutes mes forces- voulu essayer d’être complaisant, je ne suis pas arrivé à comprendre la logique de ce bout de phrase.

                Soit il y a un raccourci fulgurant que je n’arrive pas à plaquer dans ma tête, soit vous êtes du genre, ou à vous extasier devant n’importe quoi ou à croire que les chevaux borgnes, parce qu’ils sont rares et donc exceptionnels, sont de grande valeur.

                Ayez l’obligeance de m’expliquer en quoi le fait de donner de l’importance (est-ce la bonne formule ?) correspondrait à « quelque chose » (essayez des termes moins passe-partout) de profond (c’est quoi « profond » ?).

                Merci.


              • socal 7 décembre 2007 14:48

                « ...l’affreux (et génial) Dantec, »

                Dites-moi que vous avez omis « feu » en lieu et place de mon point de suspension.

                Je le croyais mort et entérré depuis longtemps ce « grand génie-de-la-littérrature-universelle-et-interplanétaire » S’il ne s’agit pas d’une omission de votre part, eh ben merde alors !!!... Dantec encore en vie ?! Pfff !!!... smiley


              • Serpico Serpico 7 décembre 2007 15:21

                socal : « Dantec encore en vie ? »

                *************

                Malheureusement, la mauvaise herbe ne meurt jamais.


              • tvargentine.com lerma 7 décembre 2007 11:35

                Voila comment lancer des plans médias sur des polémiques stériles uniquement pour remplir les poches d’un éditeur sur un écrivain (on aime ou on n’aime pas) qui vit à l’étranger.

                Cela ne mérite pas que nous soyons instrumentaliser ici par ce monsieur pour lui permettre de se vendre au média encore plus cher


                • Goulven Goulven 7 décembre 2007 12:18

                  Courte interview en Argentine, bien plus parlante que cet article à mon avis, qui ne fait qu’énumérer ce qui « se dit » sur Houellbecq, loin de ce qu’il écrit. http://www.lepetitjournal.com/content/view/21953/303/


                  • socal 7 décembre 2007 15:02

                    « Et c’est grave de le placer aux côtés de Dantec, qui est parfaitement illisible et n’écrit que pour des garçons rageurs et acnéiques »

                    Tout a fait d’accord !

                    Merci de le dire. smiley


                  • pepin2pomme 7 décembre 2007 12:51

                    J’ai lu « les particules élémentaires » et « plate-forme ». J’ai beaucoup apprécié son style politiquement incorrect, et l’acuité de sa vision de la condition humaine. J’ai donc acheté les yeux fermés son dernier roman, « la possibilité d’une île » qui m’a beaucoup déçu. J’ai trouvé l’auteur en manque d’inspiration, la science fiction ne lui convient pas.


                    • manusan 7 décembre 2007 13:25

                      pépin2pomme, j’ai lu les même livres que vous + Extension du domaine de la lutte. Au contraire, la SF lui va bien, je trouve, car il arrive à jongler entre une littérature dite « intelligente » (la SF) à une littérature plus émotionelle (la scène du chien écrasé).


                    • Goulven Goulven 7 décembre 2007 13:54

                      Lisez aussi « Rester vivant » et « le sens du combat ». Des recueils de texte et de poèmes. Il avait déjà tout dit dedans, il ne fait qu’approfondir depuis.


                      • brieli67 7 décembre 2007 15:11

                        comme il sied à de la littérature de quai de gare on attend.

                        Si Adéma le vigneron nous parle de Karité bien pensée et de son beurre. On comprend... Si un inconnu notoire se mousse et se graisse par un bout de phrase insipide et glauque ; Qui plus est MH fuit les caméras et les interview et n’assume. C’est du Piffard tout craché ce Michel.

                        Hâte de le savoir l’abject Michel sioniste ou anti-sioniste au détour d’une phrase. Pas vrai Adéma ?


                        • brieli67 7 décembre 2007 15:43

                          c’est du H Boell il aura son prix Nobel si son film est bon et meilleur que le Parfûme. Patrick au moins il se montre pas.

                          Je préfère causer veaux vaches poules poulets ... et poules avec M. Thomas. Mais il s’est barré ailleurs comme Tomy Ungerer.

                          Frage : Und die Genetik erscheint Ihnen als geeignetes Mittel ?

                          Houellebecq : Keine Ahnung. Aber es ist eine Möglichkeit, die es vorher nicht gab. Das sind zunächst einmal gute Aussichten.

                          IN http://www.literaturkritik.de/public/rezension.php?rez_id=611


                          • Manuel Atreide Manuel Atreide 7 décembre 2007 21:21

                            @ l’auteur ...

                            Vous avez écrit un papier formidable, chiadé, argumenté, passionnant. Vous exposez votre point de vue avec talent, même si c’est un bon article roboratif à l’image d’une vraie bonne potée.

                            Je suis en total désaccord avec vous. Vous faites de M.H. le porte-parole de l’époque, le symbôle, l’écrivain de génie des temps actuels, partant du postulat qu’il a raison, que vous avez raison, que tout le monde occidental n’est qu’un vaste cloaque dans lequel nous sommes plongés ; pataugant dans la fange, la décadence, peut être même la dépravation la plus absolue.

                            Vous êtes en droit d’avoir cette vision du monde. Si tel est le regard que vous portez sur l’époque, ma foi, je vous concède que M.H. vous va fort bien. Mais, de grâce, ne venez pas me dire que toutes et tous partagent votre point de vue ! Je ne vis pas dans ce même regard. Le monde que je vois, le monde auquel je participe, le monde que je tâche de bâtir n’est pas celui que vous décrivez et que M.H. colle dans ses livres. C’est sans doute bizarre, mais je ne vis pas dans votre monde.

                            N’essayez donc pas de faire de M.H. mon porte-voix. Il ne saisit pas mon regard, il ne vit pas ce que je vis. Je ne suis pas dans un monde opposé au sien, il n’y a pas de demi-tour. Je suis juste à 90°.

                            C’est cela en définitive que je ne supporte pas chez M.H. ou Dantec : cette prétention à détenir la verité ultime, comme si leur vision, parce qu’elle était vraie dans leur monde, était la seule vraie parce que forcément unique. Je suis au regret de le dire, cette vérité n’a pas cours chez moi.

                            Mais ce simple fait est peut être insupportable pour tous ceux qui se reconnaissent dans les bouquins de M.H. Oui, nous ne vivons pas tous ce que vous vivez. Et ce que vous vivez semble si insoutenable que je comprends ce cri de désespoir lorsqu’une voix, parfois ténue, s’élève pourtant pour dire que la fange n’est pas partout.

                            Si tel est le cas pour vous, peut être vous faut-il vous poser la question suivante : Dois-je sortir de cet état terrifiant dans lequel je suis, ou dois-je tout faire pour y plonger les autres afin d’y être moins épouvantablement seul ?

                            Je vous incite à relire Victor Hugo, la Légende des siècles, et plus particulièrement la Fin de Satan qui parle de ce quelque chose qui surnage après le naufrage, ce débris qui se refuse à sombrer, cette chose infime qui refuse ce destin pourtant tracé pour elle. Qui sait, cela pourrait vous plaire ...

                            Manuel Atréide


                            • Manuel Atreide Manuel Atreide 8 décembre 2007 12:52

                              Salut Cyp ....

                              Faut croire que c’est bon la potée ! Qui sait, on commente un papier comme il est écrit. Mais là je finis par être désagréable vis à vis de l’auteur alors que son papier est formidable. Bon d’accord, j’assume. N’est pas Victor Hugo qui veut ! smiley

                              C’est vrai que j’aurais pu faire court et dire, comme je l’ai déjà fait, que Houellebecq n’est pas pour moi un auteur un tant soit peu intéressant. Que j’ai toujours du mal avec ces auteurs dont la petite frange intello du parisianisme s’empare pour en faire - à coup de phrases définitives auxquelles on est sommé de se rendre - « l’auteur incontournable ». Je n’ai jamais aimé qu’on vienne m’expliquer que penser. Je n’ai jamais aimé qu’on s’érige en penseur ultime. Et quand je vois certains auteurs s’abandonner avec ivresse à ce petit jeu somme toute si pathétique, je ne peux m’empecher de penser que ma foi, la littérature n’est pour eux qu’un prétexte, la clé du chemin de la célébrité.

                              Or j’aime trop les livres pour accepter cela aisément. Alors oui, pour une fois j’ai voulu détailler les raisons de mon rejet de M.H. C’est long c’est empoté. Mais j’argumente !

                              Quand au fait de t’expliquer comment je vis à 90° de M.H., c’est difficile à faire précisement. C’est peut être vivre avec d’un coté le cynisme, la lacheté et la veulerie de l’univers de Houellebecq, et les grandes envolées lyriques, les promesses d’eden des utopistes souvent totalitaires du siècle dernier.

                              Cela dit, pourquoi veux tu savoir ? smiley

                              Manuel « en potée » Atréide


                            • jamesdu75 jamesdu75 8 décembre 2007 03:54

                              Je vais être franc en vous disant que je n’ai pas lus l’article en entier. Juste quelques passages.

                              Mais vôtre vision de Houllebec est totalement erroné.

                              Déjà il ne vend que parce qu’il est devenu connu (merci a lovecraft) et par ces buzz médiatique, pour la possibilité d’une ile il reçoit un prix destiné aux journaliste (vive les lobbys), ses bouquins sont tous une suite de scène scabreuses ou le mot couilles est forcement suivis d’éjaculation ou salope voir pute. Il n’hésite pas a désigné les filles des années 2000 de putes car elle s’habillent sexy. Toujours dans la possibilité d’une ile (le seul que j’ai pus terminé), certaines phrases sont a la limite de la pédophilie. En parlant d’une fille de 14 ans :

                              « Ces petites pute qui n’attendent qu’à baisé et sucer des bites... » ou un truc de ce genre

                              En plus sa transpire la prétention, le côté je sais tout, j’ai tout fait dans ma vie. (Toujours tiré de la possibilité d’une ile : J’ai 35 ans et je ne veut plus travaillé, je suis fatigué. Je n’ai plus gout a rien).

                              Et surtout le plus vomissant, c’est qu’il n’hésite pas a reniée les pauvres (forcement ils ne lisent pas et sont stupides selon lui, il inclut Djamel Debbouze, un petit arabes ça fait toujours vendre dans un livre forcement). Techniquement dans son livre il vas contre la mode du maigre, du modèle Jeune et Jolie, mais n’hésite pas a mettre une femme qu’il appel gros cul comme la grosse méchante de l’histoire.

                              En plus je trouve pas que c’est super bien écrit, dans le sens ou chaque phrase contient quasiment les mêmes explication, qu’il fait légèrement évolue.

                              Et ca donne 500 pages de : Elle a coincés mes couilles entre ses doigts et attendez que je jouissent devant un serveur payer une misère dans un restaurant de luxe.

                              Si ce pseudo auteur reste dans les annales face a bien d’autres Français injustement inconnu ou reconnu mais pas aimé de la critique (qui a dit Werber), la littérature française sera aussi morte que son ciné fait de Parisiennisme et histoire d’amour qui se passe dans le 16e arrondissement.

                              Pour infos, Sartes se vend moins bien aux lecteurs (je parle des lecteurs pas des étudiants qui achète pour leurs cours) que Jules Vernes par exemple.


                              • Iren-Nao 9 décembre 2007 04:13

                                Article un peu longuet, mais bien vu.

                                Je crois vraiment que Houellebecq est une des seule voix digne d’écoute en ce temps historique,

                                Le Dantec, j’ai pas vraiment lu,ca ne m’a guere interpelle, Regis Debray a des choses a dire, mais est ce un écrivain ?

                                Je crois , je trouve que MH en est un, même si parfois, et normalement inégal. Bref, j’en redemande.

                                En tout cas je ne vois pas ou est l’abjection dans la dénonciation d’une civilisation qui nous mène a notre perte (ce qui est peut être une bonne chose).

                                Évidemment MH transpire un peu le désespoir, et pour cause, et je le trouve un peu trop obsédé de la quéquette, çà doit être les dégâts de l’âge chez moi...je veux dire les progrès...

                                Vive Houellebecq et les Thaïlandaises !!!!

                                Iren-Nao Abject

                                PS :Je vous conseille aussi vivement un livre qui rappelle étrangement Plate forme presque en mieux : Pattaya Beach de Franck Poupart

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