Le CSA confirme la bipolarisation de la vie politique française
François Bayrou fut le premier a s’en offusquer. Le CSA vient de le confirmer, la bipolarisation de la politique, autour de Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, imposée dans le traitement de la campagne présidentielle par TF1, se décalque sur France 2 et M6.
Relevons que la presse écrite, sur ce point, est loin d’être à la traîne.
Patrick Le Lay l’avait, en son temps, revendiqué. Robert Namias vient, aujourd’hui, de confesser que tous les critères d’équité ne s’appliquent pas à tous. Ainsi, le journaliste est-il, peu à peu, sorti de sa sphère d’intervention privilégiée, informer, pour adopter celle, plus militante, de la manipulation. Comment appeler autrement un système qui occulte, en toute connaissance de cause, tout un pan de la réalité sociale ?
Cette situation est d’autant plus préoccupante que la quasi-totalité des grands médias sont aux mains de puissances économiques et financières ayant partie liée avec l’appareil d’Etat. Sans compter les nombreux copinages et amitiés entre nos dirigeants et ceux chargés de rendre compte de leurs actions. Le quatrième pouvoir est devenu une antenne du CAC 40 et les relations publiques de nos palais nationaux.
On nous donne à voir une vie publique évoluant autour des deux grands partis de gouvernement et du Front national instrumentalisé, à titre d’épouvantail, au profit de ces derniers. L’alibi démocratique étant recherché autour des rares apparitions du président de l’UDF.
La grande majorité de nos concitoyens ne reconnaît pas leur quotidien dans l’interprétation qui en est proposée par la presse. Cette perception gibbeuse génère une véritable forclusion du réel. Ce qui n’est pas médiatique n’a aucune existence. L’action citoyenne, sous peine de perdre toute consistance, se doit donc d’abonder vers le spectacle, avec le risque de surenchère et d’approximation qu’une telle entreprise comporte. Les Enfants de Don Quichotte l’ont bien compris pour faire avancer la cause des SDF.
Ite missa est
Capitaines d’industrie, prédateurs de la haute finance et grands commis de l’Etat ont en commun leur adhésion, sans réserve, au libéralisme tel qu’il a été théorisé, dès 1944, par Friedrich A. Hayek,qui reçut pour ses le prix Nobel de sciences économiques trente ans plus tard.
Pour ce pourfendeur du socialisme et de la social-démocratie, point de salut, pour nos démocraties hors une totale libre concurrence. Ce n’est pas au facteur humain de déterminer la répartition des richesses et des biens, mais au marché qu’il convient de donner une totale liberté. Il est prépondérant, nous dit ce brillant penseur, d’exalter l’individualisme, consacré pour la circonstance comme unique viatique d’une ontologie.
Aussi s’est-il érigé contre toute tentative d’une quelconque socialisation responsable, à ses yeux, de l’abandon d’une des caractéristiques les plus saillantes de la civilisation occidentale telle qu’elle s’est édifiée sur les fondements posés par le christianisme, par la Grèce et par Rome (...) l’individualisme fondamental que nous avons hérité d’Erasme et de Montaigne, de Cicéron et de Tacite, de Périclès et de Thucydide.
Cette pensée politique est au cœur de la mondialisation. Et ne croyez pas, un seul instant, qu’elle serait devenue obsolète ou réservée à quelques néoconservateurs américains. Elle essaime même parmi une intelligentsia hier acquise à la gauche..
Dans une tribune du Monde (Le discours de la cécité ordinaire) rédigée après les attentats du World Trade Center, Robert Redeker, par ailleurs membre du comité de rédaction des Temps Modernes, empruntant à la logique des préférables chère aux stoïciens, affirmait que le capitalisme, comme Braudel l’a mis en relief, fait surgir des ères de civilisation qui permettent un plus grand épanouissement de la liberté (en particulier de la liberté de penser, d’écrire, de publier, de diffuser) et qui offrent de plus riches possibilités de vivre que tous les autres systèmes bâtis jusqu’ici par les hommes.
Et c’est cette même messe qui est célébrée, chaque jour, sur nos écrans ou dans nos journaux. Tous ceux qui auraient l’outrecuidance de la dénoncer, ou s’y opposer, seront frappés d’apostasie.
Dessin : Chappatte
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