Ustica : l’époque où la chasse au Khadafi était ouverte
La nouvelle est très surprenante : le Parquet de Rome vient de rouvrir une enquête sur des faits qui datent de 28 ans ! Et ce, à la suite d’une déclaration du président de la République italienne, Francesco Cossiga, qui décidément, ne semble pas décidé à garder le silence que d’autres chefs d’état entretiennent habituellement sur divers sujets importants. Cette fois, il s’agît d’une des énigmes parmi les plus tenaces ayant pour sujet une catastrophe aérienne, une des plus étonnantes jamais survenues. Celle d’un DC-9 italien, immatriculé I-TIGI avec 81 personnes à bord, le vol 870 parti de Bologne pour Palerme, qui s’est abîmé brusquement en Méditerranée le 27 juin 1980, ou plus exactement en mer Tyrrhénienne, près de l’île d’Ustica (située au nord de la Sicile).

En janvier de l’année dernière, pourtant, on croyait bien l’affaire définitivement close, le dernier recours juridique après 27 ans de bataille ayant été rejeté par la Cour de Cassation italienne, qui avait enterrinée l’élargissement en appel de quatre généraux italiens accusés d’avoir fait de l’obstruction manifeste durant l’enquête. Sacré phénomène donc, que ce Cossiga, qui utilise ses fonctions pour remettre sur le tapis cette énigme, qui, si elle parvenait un jour a être éclaircie, provoquerait une belle déflagration dans l’omerta habituelle des catastrophes aériennes où sont impliqués des avions militaires, car c’est le cas semble-t-il pour cette catastrophe ! Et met en l’occurrence des pilotes qui ne sont pas italiens, mais... américains ou... français. Et oui, en ce moment, les oreilles de l’ancien président Giscard d’Estaing doivent sacrément siffler : il aurait dissimulé les faits lui aussi, en accord avec les autorités américaines de l’époque, à savoir l’administration de Jimmy Carter (Reagan ne devenant président qu’en novembre 1980) ! Lui ou son ministre des armées de l’époque, Yvon Bourges, dont le fils Gilles s’intéresse beaucoup à l’aviation commerciale. Surtout celle gérée par un égyptien, Rami devenu « Raymond » Lakah, rendu célèbre autrement, lui...
Ce soir là, en effet, aux abords de la Sicile, une intense activité militaire avait lieu à l’endroit où passait le DC-9 : plusieurs avions, dont deux italiens (des F-104S), un français (un Crusader ou un Mirage F-1) et deux américains (deux Phantoms, mais on cite aussi un Corsair II), en manœuvres pour l’Otan, pourchassaient un
Vous allez me dire, certes, mais le lien n’est pas avéré, entre cette chasse au MIG et l’accident du DC-9 civil. Sauf que le 18 juillet 1980, une vingtaine de jours plus tard, au Sud de l’Italie, en Calabre, des promeneurs trouvent la carcasse d’un Mig-23 encore muni de son siège éjectable et de son pilote sanglé dessus, mort. Un avion a bel et bien été abattu, qui, quelques minutes avant avait laissé une trace sur les écrans radars, celle d’un avion se rapprochant brusquement de la trajectoire d’un vol commercial pour devenir une trace fantôme, une vieille technique éprouvée de diversion et de masquage, un avion se réfugiant sous un autre pour ne plus faire qu’une seule image radar (le « shadowing »,ou « écran »). A l’époque, les américains redoutent assez le MIG-23, qui accélère plus vite qu’un Tomcat ou un Hornet, au point de le faire tester secrètement à Groom Lake, ce qui n’est pas d’ailleurs sans danger. Le Lt. Gen. Robert M Bond, vice commandant de l’Air Force Systems Command, y perdra d’ailleurs la vie le 26 avril 1984 en tentant de s’éjecter à grande vitesse à bord d’un MIG-23 fourni par l’Egypte. L’avion provenait de.. la Libye, un pilote Libyen ayant fait défection pour y atterrir en catastrophe et y poser son appareil, une véritable aubaine pour les américains qui avaient alors chèrement négocié le rapatriement de l’appareil.
Les débris repêchés 9 ans après ( ?) à 3500 m de fond par l’Ifremer démontrent vite que le DC-9, lui, a été touché à l’arrière, le premier élément découvert au fond de l’eau étant sa porte d’accès arrière et des débris humains (38 corps disséminés à la surface), l’une des portes d’accès (à escaliers) étant située, comme sur Caravelle et les Boeing 727 dans le cône de queue. Les deux réacteurs, brusquement détachés du fuselage, continuant leur course folle et isolée pour rejoindre au fond de l’eau l’avant de l’appareil, la pièce la plus imposante du désastre ! L’examen de l’éparpillement des débris et de la boîte noire repêchée en 1991 seulement montre autre chose : la descente du corps de l’avion a été relativement lente, et son fuselage et ses ailes présentent une foultitude de petits impacts sur les ailes et les ailerons, des traces propres aux explosions d’engin air-air. Un énorme impact est situé également en arrière de la porte d’accès avant, côté gauche. Sur le fuselage, réduit en miettes minuscules, plusieurs tôles arrachées sont tournées vers l’extérieur, preuve d’une déflagration interne. L’appareil aurait donc subi deux missiles et non pas un, ou deux explosions en tout cas.
A peine remontés, les débris examinés conduisent obligatoirement sur la piste de missiles qui auraient raté leur cible, en l’occurence le MIG-23, ou auraient abattu les deux en même temps. La théorie de l’explosion due à une bombe à bord, située à l’emplacement des toilettes (selon la version officielle, démontrée en 1994 comme étant la seule possible), tient alors difficilement : deux bombes, c’est inutile, avec la dépressurisation une seule suffit ! Et l’état d’émiettement complet du fuselage de l’avion d’Itavia confirme une explosion avant. L’Italie, alors en pleine guerre intérieure contre les terroristes, devait recevoir l’impact psychologique terrible de l’attentat de Bologne, du 2 août 1980, imputé au final à l’extrême droite. Et le pays tout entier songe alors à la même origine ou à son opposée des Brigades Rouges pour l’explosion du DC-9. Nous ne sommes que deux ans seulement après l’éxécution d’Aldo Moro, et le terrorisme vient naturellement à l’esprit, mais la théorie terroriste tentante ne tient pas. Les dégâts, dont notamment ceux portés aux ailettes des compresseurs des réacteurs, la rangent vite dans la catégorie des suppositions : quelque chose a explosé à l’avant avant que les réacteurs ne se détachent (le missile de devant, qui a traversé l’avion et ressorti du coté gauche). Les réacteurs ont alors ingéré des centaines de débris, ce qu’ils n’auraient pas pu faire avec une explosion arrière seule.
Les réacteurs, surtout le droit, ont tout ingéré, leurs aubes sont rognées, certaines détruites. L’ingestion de débris de revêtements intérieurs alors que le réacteur tourne encore est la preuve de l’explosion en vol de l’avion. Côté terroriste, aucune revendication n’a jamais été faite, à l’extrême droite comme à l’extrême gauche. Et pour ce qui est des autres débris.. c’est étrange : une bonne partie de l’avion est manquante (une bonne moitié !). Un côté complet ainsi que l’avant s’est en effet volatilisé comme par enchantement, ne restent que des bribes de fuselage. Comme d’ailleurs aussi les cassettes d’enregistrement des radars à l’œuvre ce jour là, cinq sur les 17 disponibles, dont celle du porte-avions USS Saratoga qui croisait alors dans les parages. Des « nettoyeurs » ont-ils bien fait leur travail ? Ils en ont eu largement le temps, en neuf ans, avec les multiples obstructions apportées à l’enquête. N’oublions pas une chose ; Robert Ballard a créé sa société en 1981, et a raconté récemment que ses plongées au dessus de l’épave du Titanic l’avaient été également pour le compte de la NAVY... a-t-on cherché à remonter entre temps des morceaux compromettants ? Rien ne l’indique pourtant dans les sorties de l’Alvin, qui avait succédé au Trieste II. Un engin qui travaille beaucoup pourtant : « Alvin makes between 150 and 200 dives every year. A typical dive measures about 6560 ft and lasts about six hours, depending on the power usage. As a general rule, the sub takes about two hours to reach the typical depth, and another two hours to surface, leaving two hours for study on the seafloor. » Le nombre de pièces manquantes au puzzle du DC-9 est alarmant, et l’on songe à une possible plongées ou plusieurs pour repêcher les débris compomettants. Un examen attentif des tournées en Méditerranée de L’Atlantis, le bateau porteur de l’Alvin est intéressant à faire pour la période 1980-1994 : en réalité, nous n’avons trouvé aucune visite de Méditerranée de la sorte sur un document de ce type. Mais un appel anonyme, un soir, à la télévision italienne d’un prétendu contrôleur aérien sème un peu plus le trouble sur le rôle de l’armée de l’air italienne. On a peut être bien absolument rien dissimulé des débris, mais les preuves radar des explosions et de l’interception râtée ont bel et bien été effacées des bandes magnétiques d’archives des contrôleurs aériens.
Un autre élément penche en la faveur du second scénario : au fond de l’eau au milieu des morceaux de DC-9, on repêche... la verrière fracturée du cockpit... d’un MIG-23. Un avion qui a déjà montré d’étranges capacités : celle de continuer à voler sans pilote vivant à bord, lui réputé si difficile à maîtriser. En 1985, un appareil de ce type de la DDR avait affolé tous les avions de chasse de l’Europe du Nord (dont ceux de Cambrai d’où avaient décollé des Mirage V pour tenter de l’intercepter !) en continuant à voler en ligne droite après que son pilote se soit éjecté. Parti de Kolobzreg, près de la Mer Baltique, à plus de 700 km de là, il avait fini par foncer à 10H37 du matin dans un pavillon de banlieue en Belgique, près de Courtrai, tuant un pauvre étudiant de 18 ans en train de réviser ses examens. Son pilote s’était éjecté en... Pologne ! Son pilote tué au dessus d’Ustica, et qui donc ne s’éjecte pas malgré sa verrière partie, le MIG-23 de notre histoire avait fait pareil et continué droit vers la Calabre pour s’écraser à 1 929 m d’altitude sur le Mont Sila. L’autopsie du corps retrouvé d’ Ezedin Koal, le pilote Lybien, avait démontré qu’il était mort depuis plusieurs semaines. Même s’il été resté en vie, et s’était éjecté, il n’avait aucune chance de retrouver son pays : la Libye, traditionnellement, ne s’embarrasse jamais à repêcher ses pilotes perdus. La preuve neuf années plus tard, dans le Golfe de Syrte, avec deux F-14, qui, attaqués par deux Mig-23 Libyens armés de missiles infrarouges AA-7 Aplex les abattaient au Sparrow AIM-7 sans demander leur reste. Les deux pilotes Libyens éjectés n’avaient pas été secourus. L’incident avait déjà eu un précédent en 1981, à peine un an après la catastrophe du DC-9 : deux Tomcats de la VF-41 des « Black Aces » avaient alors descendu deux Sukkhoi SU-22 libyens au même endroit, le Golfe de Syrte ! Deux heures après, deux MIG-25 Foxbat armés effectuaient une passe d’attaque de représaillles au dessus du porte-avions Nimitz. A l’époque déjà, donc, les américains n’hésitaient à tirer sur les avions libyens sans se préoccuper de sommations, ni des conséquences possibles sur l’humeur de Khadafi, jugé irrécupérable diplomatiquement.
Ces avions libyens, en fait, connaissaient bien le trajet vers les côtes italiennes (et le retour) : dans le rapport de 5 488 pages d’un juge obstiné, Rosario Priore, établi après neuf ans d’enquête acharnée, il s’avérait que le MIG était en fait chargé de l’escorte, avec un confrère du même type, d’un Hercules C-130 de l’armée de l’air libyenne qui sortait de remise en état état au sein d’une société privée italienne, avec 7 autres avions libyens en réfection. On comprend alors l’embarras des généraux italiens : la Libye est alors sous étroite surveillance américaine, question livraison d’armes, et ce bien avant l’attentat de Lockerbie, imputé à la Libye ! D’où l’idée de vouloir étouffer à tout prix l’affaire, les américains ayant alors des relations plus que tendues avec le régime de Khadafi : les responsables militaires italiens, au courant de ce qui s’est réellement passé, grâce à leurs radars et à deux F-104 de sortie, se seraient alors tus. A peine six mois auparavant, des manifestants libyens avaient en effet saccagé l’ambassade des États-Unis à Tripoli, au prétexte de son soutien à Israël, et les USA s’apprêtaient à déclarer leur embargo, effectif deux ans plus tard. Reagan faisant bombarder Tripoli le 5 avril 1986 par ses F-111, événement qui a failli coûter la vie à Khadafi qui en sortira vivant par miracle.
Pour le désastre d’Ustica, l’examen des débris pulvérisés et l’enquête reprise par Guiliano Amato, membre du cabinet Prodi, accuse plutôt, selon lui... la France. Le missile incriminé, selon lui, est à détection par « résonance » (à détecteur de proximité) et non « à impact » (à infra-rouge), à savoir qu’il explose avant de toucher l’appareil (d’où les innombrables éclats), et qu’il incrimine en ce cas directement la marine militaire française, ses Crusaders ...et ses missiles R-530 de l’époque. Ça où les Mirage F-1 de la base de Solenzara, mis en cause dans de nombreux reportages télés italiens, et ceux envoyés régulièrement... au Tchad. Un pays où les avions ne débarquent pas seuls. Selon certains, les services secrets français auraient tout simplement étaient tentés d’abattre le colonel Khadafi, soupçonné d’être du voyage du retour des livraisons d’avion, en qualité de passager du... DC-9. C’est la thèse que défendra le leader libyen des années après, selon lui les services secrets étrangers s’étant trompés d’objectif et de cible principale. L’hypothèse est difficile à suivre, car les italiens eux-mêmes utilisent l’ AIM-9 Sidewinder du même type que le R-530 (les français les remplaceront en 1992 sur les Crusaders), et leurs F-104 Starfighters en étaient équipés. On voit mal en prime Khadafi voyager en C-130 ou en DC-9 commercial sans ses célèbres « amazones », lui qui adore les fastes et s’offre des jets privés (pour lui et sa famille). Les français ont bien tentés des coups tordus avec Khadafi, dont celui bien compliqué et rocambolesque où Roland Raucoulles a très certainement perdu la vie en 1978, mais cela ne suffit pas pour expliquer une ouverture de tir sur le MIG libyen par l’aéronavale française ou un F-1 de Solenzara.
La France est alors sérieusement empêtrée dans le problème tchadien, dans lequel gravite certes Khadafi, (elle y est toujours), avec l’affaire Claustre notamment, et le lâchage honteux du pauvre commandant Gallopin, officier français du renseignement auprès du gouvernement tchadien, mais Khadafi, qui pourrait être la cible d’un attentat fomenté par les services secrets français, n’est pas la priorité absolue. Le problème, c’est avant tout le Tchad, sur lequel Khadafi à des vues, certes. Il dérange beaucoup plus à l’époque que maintenant : Anouar El-Sadate, l’ancien raïs égyptien, l’appelait « le fou », Ronald Reagan « le chien enragé ». Ses frasques et les tensions qu’il entretient au Tchad, tout cela est suivi de près par le premier ministre de l’époque : Jacques Chirac. Et au Tchad, à cette époque, des mercenaires français pilotent sans vergogne des avions tchadiens, au service de Goukouni Oueddei, qui finira par fuir en Algérie en 1987. Abbré ou Oueddei, La France change de pion tchadien selon la direction du vent diplomatique contre Khadafi, car les choses évoluent vite dans ce conflit qui s’internationalise et où elle souhaite ne pas faire d’impair. Elle table alors sur Goukouni Oueddei, l’homme qui affirme aujourd’hui que « sans nul doute, Idriss a pris le pouvoir en 1990 avec l’appui incontestable de la France pour des raisons économiques et géostratégiques. Il demeure toujours, et pour les mêmes raisons, l’homme de la France » Et rappelle par la même occasion une vérité souvent oubliée : « puisque nous parlons de Hissène Habré, je tiens à préciser que son agent d’exécution, à l’époque, n’est autre que l’actuel président du Tchad, Idriss Deby Itno. Ce dernier a successivement exercé, à cette période, les fonctions de responsable des services secrets tchadiens et de chef d’état-major de l’armée ». Aujourd’hui, les pilotes mercenaires de Deby sont brésiliens ou algériens. Et le Tchad toujours un épineux problème pour la France... pour ce qui est de Khadafi, en revanche... il n’est plus le galeux d’avant.
Cossiga semble avoir oublié lui une chose dans sa nouvelle charge : sa propre aviation, munie de F-104 et de Sidewinders avait elle aussi les moyens d’abattre l’appareil. Mais on explique difficilement en ce cas pourquoi, puisque les italiens réparaient en douce les avions de Khadafi. Selon toutes les sources existantes, deux Starfigthers italiens en alerte rapide ce jour là, ont bien décollé pour l’ interception d’un avion Libyen dans la zone concernée. L’histoire retiendra que les deux pilotes faisaient partie de la patrouille acrobatique italienne, la même qui provoquera la terrible catastrophe du show aérien du 29 août 1988, à Rammstein, causant 67 morts et 346 blessés dans le public de plus de 300 000 personnes. Sur les trois pilotes qui décèdèrent ce jour-là, on trouvait, étrange coïncidence, les deux anciens de Starfighters qui ont pourchassé le MIG-23. Evidemment, la mort ce jour là des deux seuls pilotes ayant sorti pour l’interception du 27 juin 1980 alimente tous les rumeurs, y compris les plus... « complotistes ». Difficile de suivre cette voie, pourtant, tant la terrible catastrophe de Ramstein a été totalement inattendue et particulièrement tragique. Le hasard fait aussi malheureusement parfois mal les choses, il faut bien s’en convaincre, et les théories sur le sabotage possible bien peu crédibles. Reste qu’on évalue quand même à la douzaine de cadavres les morts liés de près ou de loin à la catastrophe du DC-9 : un secret d’état aussi embarrassant (81 morts ce n’est pas rien), et, derrière, ça tombe vite comme des mouches.
Reste l’hypothèse américaine, la plus probable donc, étant donné les tensions du moment. A l’époque Carter n’a encore rien décidé vis à vis de Khadafi, mais ça ne tardera pas avec son successeur : le 26 mars 1982 Les USA de Reagan décrètent un embargo commercial contre la Libye. L’occasion de mettre définitivement Khadafi au pas est peut être trop belle avec ce MIG-23 perdu au milieu d’avions de l’Otan en exercice ce jour là. C’est fou ce que les exercices aériens peuvent déboucher sur des catastrophes aériennes dès qu’il y a un avion US en jeu ! Reste le hic de l"improbabilité que la CIA ait pu croire un seul instant Khadafi à bord du DC-9 : c’est donc bien le MIG-23 qui est seul visé, et le DC-9 une malencontreuse cible interposée.
Deux ans avant l’incident du Golfe de Syrte et des avions de la VF-41 « Black Aces », l’USS Saratoga a lancé un de ces avions pour tenter de rattraper un MIG-23 ou deux (ils volent par paire) et l’interception s’est mal passée, c’est l’hypothèse la plus probable. Le 28 septembre, le porte avions rentrera en cale sèche pour 28 mois pour une remise à niveau majeure. En juin 1980, à son bord, on trouve des F4-J de la VF-31 des « Tomcatters » et de la VF-103 des « Sluggers », des A7-E des « Bulls » (VA-37) et des « Gunslingers » (VA-105) ainsi que les A-6E/KA-6D des « Sunday Punchers » (VA-75). L’un des deux premiers modèles est celui à incriminer dans l’attaque du MIG-23 : tous les observateurs en reviennent à un Phantom aperçu dans les parages par des pêcheurs peu de temps après les faits. La VF-31 a il est vrai une réputation à défendre de bonne gâchette : « VF-31 is the only US squadron (of all three branches) to have scored confirmed kills in three wars, World War II, the Korean war and the Vietnam war. »... Un des pilotes de la VF-31 a-t-il verrouillé hâtivement ses deux Sidewinders sur le MIG-23, qui, le constatant, s’est réfugié sous le DC-9 pour éviter les missiles ?? Les traces radars semblent le démontrer : le MIG a fait un virage brusque avant de prendre la même trajectoire que le DC-9 en le suivant de près. Touché par les débris lui aussi malgré sa ruse, le pilote perdant la vie dans sa manœuvre audacieuse. Au fond de l’eau, on retrouvera également un réservoir central larguable de Phantom en 1992, dont l’appareil se déleste toujours en combat avant d’attaquer, et même en 1994 un avion complet, crashé en Sardaigne, à Capo Carbonara (près d’un émetteur Loran US !), contenant toujours ses enregistreurs de vol. On retrouvera également parmi les débris un casque de pilote. Mais là-dessus, silence complet de la part des autorités US. Les italiens ont bien interrogé l’armée américaine qui a fini par avouer en 1998 seulement qu’un avion avait bien été signalé comme manquant en "1981"... mais rien de plus, et avec cet aveu tardif, on en arrive à une autre solution encore, celle d’un crash aérien des deux avions militaires, l’un d’entre eux ou ses débris ayant en cas abordé ensuite le DC-9. Une solution qui devient un peu trop compliquée, il est vrai.
Du côté italien, outre les dirigeants du pays, 4 généraux sont visés par la réouverture de l’enquête : Lamberto Barolucci, promu chef d’état-major de la Défense en 1983, Corrado Melillo, nommé général de division aérienne en 82, Franco Ferri, commandant des forces de l’Otan basées à Vicenza, Zeno Tascio commandant du centre radar Licola, tous bien entendu depuis longtemps en retraite en 2008. Et tous grâciés le 30 avril 2004 des charges énormes pesant sur eux. Tous responsables pourtant, à des degrés divers de la dissimulation de leurs responsabilités et de celle des dirigeants italiens de l’époque. Responsables d’un obstruction manifeste devant la justice italienne, comme on pouvait le constater à l’époque en Italie, minée jusqu’au plus haut sommet par un pouvoir tortueux lié à des réminiscences mussoliniennes. "Dans leur enquête sur l’attentat de Bologne, les juges italiens, forts de leur expérience des années de plomb et du terrorisme orchestré avec la complicité de l’État, se sont rapidement orientés sur la piste de l’extrême droite. Mais ils en ont été distraits par des renseignements fournis par les services secrets italiens du général Santovito. Ces informations ont égaré les juges sur une multitude de fausses pistes". Cette façon de faire étant une stratégie globale de gestion de l’état : "avec le recul, la fin de la Seconde Guerre mondiale semble avoir marqué le véritable début d’un usage répété de méthodes terroristes par les États, afin de déstabiliser leurs propres systèmes démocratiques et de limiter les libertés individuelles. Ainsi, « loin d’être un acte isolé, le massacre de Milan est le point culminant d’une offensive concertée de déstabilisation du régime parlementaire italien". L’italie des années quatre vingt semble avoir donné des idées à W.Bush...
Des généraux tous responsables du sort du DC-9 qui s’ajoutait ce jour là à la (très) longue liste des avions abattus pendant la guerre froide et dont le grand public ne soupçonne même pas l’existence les trois quarts du temps. Comme cet incident en 2005 au large de la Mer du Japon, ou deux MIG-29 et deux.. MIG-23 interceptèrent un RC-135S Cobra Ball II de l’US Air Force devenu un peu trop curieux. Aux dernières nouvelles, on attend toujours une réaction de Valéry Giscard d’Estaing aux déclarations de Cossiga : officiellement, les diamants de Bokassa n’ont jamais existé. C’était vrai, remarquez (l’affaire avait été montée de toutes pièces par Roger Delpey, appartenant à l’extrême droite qui se chargeait alors de la sécurité présidentielle giscardienne !), mais devenus secret d’état, ils se révélèrent efficaces pour faire chuter le président en 1981. Les fameux diamants ou d’autres casseroles, le preux Valéry n’étant pas le dernier à s’être acoquiné avec des gens douteux. A mon humble avis, on peut donc attendre longtemps cette fameuse réaction. Faudrait d’abord que nos vaillants journalistes hexagonaux abandonnent deux minutes le fond du sac à main de Carla Bruni pour penser à aller poser les questions qui dérangent... aux personnes concernées. Cossiga est certes provocateur et insidieux (en chargeant autant la France, il disculpe les Etats-Unis !), mais la mémoire de 81 victimes innocentes demande davantage qu’un enterrement juridique de première classe et un mépris journalistique évident.
Un reportage très précis sur la catastrophe est disponible en six épisodes à cette adresse.
Un autre passionnant, encore ici, dont on a extrait certaines photos accompagnant ce texte. l’un des rares montrant (à la fin du reportage) les vestiges du MIG-23 calabrais et la récupération du corps du pilote par les autorités italiennes, avec les honneurs militaires rendus.
le site fondamental est ici.
Epilogue 1 : les italiens, au lieu de transformer les débris repêchés en sanctuaire, ont décidé d’en faire une étrange œuvre d’art en confiant la mise en scène de leur exposition à un artiste, le français Christian Botanski, qui a répandu dans le hangar lumières et rampes d’accès. Le Musée de la Mémoire de l’Ustica a été ainsi inauguré à Bologne le 27 juin 2007, il y a donc un an.
Epilogue 2 : si l’enquête nouvellement ouverte met à jour des éléments cachés, l’espoir est permis pour un autre cas d’espèce, celui du vol 800 de la TWA, sur lequel les soupçons demeurent, étant donné le peu d’empressement de autorités aériennes à faire appliquer les modifications nécessaires sur les 747 induites par les conclusions de l’enquête officielle. Onze recommandations portant essentiellement sur les passages de câbles électriques au sein même du réservoir central de l’avion ("the FAA examine sulfidation of electrical parts in the fuel tanks"). La présence sur place le jour de la catastrophe de pas moins de 5 sous-marins (Le Trepang, le Sturgeon, l’Albuquerque, l’ Augusta et le Wyoming), est plus qu’intrigante. Certains étant équipés de tubes de lancement verticaux pour missiles Tomahawk (ou Harpoon), les suspicions vont bon train. Et même sans ce dispositif : la Navy testait alors son lancement de missiles Harpoon via les tubes de torpilles, via un autre dispositif assez étonnant. Seul défaut pendable à cet argumentaire : le Harpoon n’a jamais été anti-avions, mais d’aucuns imaginent que ce jour là on a testé autre chose comme type d’engin, sous le même procédé original d’éjection. Et pas mal de témoins visuels également parlent d’un tir émanent du sol. Signalons pour l’anecdote que dans l’avion de la TWA étaient passagers le rédacteur en chef de la revue Guitares et Claviers et son ami, un certain Marcel Dadi, tous deux disparus tragiquement ce jour-là.
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