Se mettre en boule
Les nerfs en pelote.
L'approche de Noël qui se prépare du reste de plus en plus tôt, histoire sans doute de réveiller les instincts consuméristes de ces braves gens qu'on entend dépouiller jusqu'au dernier écu, me met en boule avec les nerfs en pelote. Je ne vais pas tarder à finir accroché sur un sapin gigantesque ou bien une attraction grotesque comme nos cités aiment si bien les imaginer.
La boule du reste est la grande vedette de la période. Elle s'affiche, s'expose, s'illumine, roule sa bosse un peu partout non pour amasser de la mousse mais des dividendes, des bénéfices, des recettes. Les comptes en banque des acheteurs chroniques tout autant que compulsifs quant à eux tendent vers le zéro, le petit cousin de la boule, à moins qu'ils ne plongent dans le rouge.
Le rouge du reste est la couleur à la mode même si le blanc aime à venir lui apporter son contraste. C'est pourtant la couleur de la pelisse d'un vieillard cacochyme qui fixe la grande tendance pour célébrer une naissance dans le plus grand dépouillement. On peut s'interroger légitimement sur le besoin d'abondance pour commémorer cette simplicité extrême.
Du reste, la crèche est bannie de nos cités pour ne pas offusquer des sensibilités à fleur de peau qui semblent ne pas supporter la présence d'un âne dans le lot. Je ne vois que cette explication tandis que les rois mages apportent une mire avec laquelle on fait des cartons sur les populations de ce territoire, jadis sacré.
Vous pensez que je me mets les nerfs en boule à la légère. Il est vrai que l'effet boule de neige amplifie tout tandis que la réclame ne cesse d'évoquer des promotions, des affaires forcément à faire en des journées où les prix sont tirés pour les vaches à lait que nous sommes. Et le pire c'est que la foule marche comme un seul homme pour aller se faire tondre.
Regardez-donc d'un peu plus près les produits en vente dans ces merveilleux marchés de Noël qui fleurissent plus aisément que le houx. Ce sont les commerçants locaux qui doivent avoir les boules devant cet étalage de produits exotiques si peu typiques dans leurs chalets de bois, eux qui viennent de la lointaine Asie. Le toc a le vent en poupe en cette période ou seule la défroque fait vendre pourvu qu'un commerçant avisé se coiffe d'un bonnet rouge à fourrure blanche.
Que dire alors de la Grande Roue qui a fait pousser des boules climatisées afin que les promeneurs, délestés de leurs dernières économies, prennent de la hauteur en se disant que c'est ça, la magie de Noël : la cité vue du ciel avec une animation au ras des pâquerettes. Où sont les véritables contes de Noël ? Il suffit de présenter des ersatz de la chose pour enchanter un public qui n'aura pas l'occasion d'entendre les véritables conteuses et conteurs.
J'ai les boules quand on confond honteusement compte et conte tout en faisant référence implicitement aux classiques du cinéma de Noël. Walt Disney et son cirque médiatique aurait ainsi l'exclusivité de la féerie de l'époque, les enfants et les grands ayant désormais besoin de tout ce décorum artificiel et frelaté pour entrer dans l'univers mirifique.
Tout cela pour toucher les bourses et si possible les vider sans se préoccuper réellement des cœurs et de l'imaginaire puisqu'il convient de montrer, d'exposer, de représenter ce qui autrefois était suggéré par la seul puissance de la racontée. C'est à croire que ceci participe aussi à la vaste opération de déculturation des peuples de cette Planète en prenant appui ici sur une fête totalement dénaturée.
Il y a de quoi avoir les boules et enguirlander, sans nul espoir d'être entendu, les responsables de cette parodie artificielle, désacralisée, déshumanisée qui se répand dans tout le pays telle une traînée de poudre aux yeux.
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