J’ai tout largué y compris les amarres !
640 jours !
La décision de changer pour une vie de romanichelle n'a pas été facile à prendre. Et encore moins à faire accepter à ma femme. D'autant qu'entre temps une petite fille a rejoint le clan familial, ce qui, aux yeux de ma femme, rendait le projet quasi-impossible. Il m'a encore fallu quelques années pour la convaincre, d'autant que notre expérience du bateau était pratiquement nulle, à part quelques ronds dans l'eau sur un petit bateau pendant les vacances. Et c'est avec une fillette de cinq ans que nous avons enfin largué les amarres.
Il a aussi fallu lutter contre ceux qui veulent vous convaincre de laisser tomber. La famille qui s'inquiète et qui voudrait voir grandir notre fille. Ceux qui vous explique que c'est un suicide professionnel, qu'on ne retrouvera pas de travail à notre retour, qu'on sera catalogué "inapte au travail". D'autres qui nous ont expliqué que nous finirions clochards dans un pays pourri, que rien ne vaut la France etc, etc, etc... Et encore nous ne leur avions pas dit que nous ne comptions pas rentrer en France mais chercher un endroit pour vivre où nous serions mieux et qui nous donne plus d'espoir pour l'avenir de nos enfants. Nos enfants car depuis notre départ un petit garçon est venu rejoindre l'équipage. Encore une occasion pour nos familles de nous dire : "Bon. Maintenant, avec un bébé, vous allez arrêter vos conneries et rentrer ?".
Donc on a vendu tout ce qu'on avait accumulé comme objets, bidules, véhicules et autres, on a acheté un beau voilier d'occasion que nous avons préparé pendant cinq mois et nous voilà partis.
Nous vivons maintenant de peu de choses, ce qui m'aurait paru impossible il y a encore quelques années. Nous pêchons, cueillons, échangeons... Nous rencontrons beaucoup de gens, créons des amitiés sincères car basées sur aucun intérêt particulier. Nos journées passent entre la scolarité de notre fille que nous faisons nous-mêmes (au passage on évite les théories du gender et autre folie actuelle), l'entretien du bateau qui est devenu un membre à part entière de la famille et pas le moins chronovore, les rencontres avec les amis, les visites des lieux que nous traversons, l'avitaillement et la recherche de nourriture. Sans compter les coups de mains que nous donnons à droite à gauche... Dire que nos amis restés en France nous imaginent en train de glander dans le cockpit, sous le soleil. Nous n'avons pas une minute à nous ! Tout le temps débordés mais notre vie a gagné en intensité.
Nous sommes aujourd'hui dans un modèle décroissant sans avoir l'impression de nous priver pour autant. Notre électricité est celle produite par nos panneaux solaires. Une douche nous coûte entre dix et douze litres d'eau. Nous avons un vieil ordinateur, plus de téléphone, troquons, ne mangeons que les légumes de saisons et achetés au paysan du coin. Quel plaisir de bricoler un truc avec un vieux bout récupéré dans l'eau. J'ai plus de plaisir à me servir de mon palan artisanal que j'en avais à utiliser mon smartphone dernier cri.
Je sais que vous aussi vous avez au fond de vous un vieux rêve impossible. Et bien j'ai une bonne nouvelle pour vous : il est tout sauf impossible. Foncez ! accomplissez-vous ! N'attendez surtout pas votre retraite pour le faire, il n'est pas sûr que ça existe encore la retraite d'ici là. Ni que vous ayez encore la force, le courage ou le temps pour le faire. Ne croyez surtout pas ceux qui vous disent qu'il n'y a qu'une vie et qu'elle se résume à métro, boulot, dodo...
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