A la recherche du bonheur
Mardi 11 février 2015, quelques milliers d’internautes cliquent frénétiquement sur des sites du style « fait moi plaisir » ou « rend moi heureux.com » dans le but de trouver un refuge de douceur charnelle qui apaisera le feu des fantasmes sexuels issus leurs cerveaux reptiliens. Leurs homologues féminins, à l’autre bout du réseau virtuel, rêvant pour la plupart d’entre elles d’un partenaire fiable et équilibré, analyseront et croiront peut-être le baratin plus ou moins honnête de ces Roméo anonymes. Ainsi la pièce du destin est jetée dans l’espace internet où, martiens et vénusiennes croisent leurs doigts espérant la fin de leur galère galactique en solitaire en croyant fermement au bonheur de la suave chaleur des bras d’un hypothétique partenaire.
Manille à la même période, parmi les 100 000 enfants philippins qui se prostituent pour quelques pesos, Ernesto 12 ans est en joie car vient de trouver un rabatteur qui lui a proposé 1000 $ pour un de ses reins soit, cinq fois le salaire moyen d’un travailleur exploité par le système. De plus, il lui a garantie que cela se faisait sans douleur et qu’il serait dans un chouette endroit. Ce que ne lui a pas dit le charognard, c’est qu’il lui prendrait les deux et qu’il finirait à la fosse commune avec ses petits copains qui l’ont précédé. L’odieuse joie de la bête contre l’illusoire espoir d’une victime, la balance de la chance me semble soudain bien déséquilibrée et la laine de l’agneau ne pèse pas bien lourd face aux crocs acérés du loup.
Wall Street bourse de New York, Stanley joue gros. Il a misé 50 % des fonds confiés par ses clients sur les matières premières, le blé en conséquence. En faisant gonfler artificiellement les cours, il devrait pouvoir se gaver de sept à huit millions cash de bénéfice net. Depuis le temps qu’il rêve de changer la Maserati et d’en mettre plein la vue à Laetitia avec cette rivière de perles de chez Cartier… Tout en additionnant, il transpire devant la montée des cours et son palpitant a entamé un rock endiablé dans sa cage thoracique. Putain que c’est bon cette adrénaline qui te fouette quand tu ramasses un tas de pognon. Evidement, Stanley sait pertinemment que faire fluctuer le cours des céréales à la hausses fera crever de faim quelques milliers de déshérités en plus, quelque part en Afrique ou en Inde mais bon, la vie c’est une jungle et chacun se fabrique sa chance alors, faut pas l’emmerder avec ça le Stanley...
Emile a subit la crise de plein fouet. 32 ans dans le BTP à refaire des routes les poumons dans le goudron. Il a été remercié il y a trois ans et a d’obtenu officiellement son statut de SDF depuis huit mois. Inscrit dans des agences intérim, il fait quelques remplacements mais, sans famille et avec des revenus trop faibles pour espérer un logement, Il traine de places en trottoirs, de couloirs de métro en arrêts de bus et parfois, avec un peu de chance, une place en foyer. Son bonheur à l’Emile, son rêve, un petit deux pièces avec chauffage et un job, même payé au smic, pour pouvoir retrouver enfin sa fierté, sa dignité d’homme. Est-ce de la faute à Emile s’il en est arrivé là ? Peut-être, je l’ignore, mais ce que je sais, c’est que les cartes distribuées au début ne sont pas les mêmes pour tous et que ceux qui bien servis au départ, et qui pendant la partie étoffe leurs jeux de manière pas toujours très honnête, ont bien du mal à redistribuer de façon équitable...
Pour la trentième année des Resto du Cœur, la bande d’enfoiré n’a jamais si bien porté son nom. Avec leurs tronches de premiers de la classe, leurs belles têtes de vainqueurs, ils viennent faire la leçon aux chômeurs avec une chanson aux paroles blessantes et provocatrices. Ils oublient qu’ils sont nés au bon endroit, au bon moment et que la chance leur a sourit outrageusement. Avec un minimum d’élégance, ils pourraient la jouer discret et plutôt que d’aller planquer leurs surplus dans des paradis fiscaux en faire profiter les malheureux adhérents du Resto devant lesquels ils viennent se pavaner afin de se faire une publicité à bon marché. Mais bon, leurs définitions du bonheur est plutôt élitiste. Une chose m’a toujours étonné, celle de ces privilégiés venant prôner l’austérité et conseillant le sacrifice à ceux qui chaque jour se débattent pour survivre. S’il fallait donner une définition de l’indécence, celle-ci me semblerait bien adaptée. Michel revient, ils salissent ta mémoire. ..
Certains croient que le bonheur se cache dans un stock option, un golden parachute négocié, une nouvelle Ferrari, la femme du voisin, Noel à Courchevel etc… Les nantis ne connaissent par leur bonheur car en plus du nécessaire, ils accumulent le superflu tout en étant jamais satisfaits. D’autres pensent que le bonheur se cache dans un billet de loto, un repas chaud, un abri contre la pluie, un travail, des retrouvailles etc… Cette catégorie me semble plus près de la vérité. Oscar Wilde écrivait : " Il n'y a que deux tragédies dans la vie : l'une est de ne pas avoir ce que l'on désire ; l'autre est de l'obtenir."
Si notre passage sur cette terre est une quête incessante à la poursuite du bonheur, cette quête reste illusoire et perdue d’avance car le bonheur est furtif, c’est un état impermanent qui ce mérite chaque jour. Attention aux contrefaçons car il s’avère que celui-ci ne se trouve pas dans la matière et, l’accumulation de biens matériels ne fait qu’assoiffer le désir d’en posséder plus, c’est un piège. Le bonheur n'est pas un gros diamant mais une mosaïque de petites pierres harmonieusement rangées qui adoucit le puzzle de votre vie. Si vous avez la gloire et le pouvoir mais que lorsque vous rentrez chez vous c’est l’enfer alors, posez-vous la question, ai-je trouvé le bonheur ? Je crois, du moins il me semble, pardonnez moi cette prétention, que le vrai bonheur c’est de faire sourire une femme, rire un enfant aux éclats et que l’homme que je croise pose sa main sur mon épaule pour me parler comme un frère. Tout cela, je ne l’échangerais contre aucune de leurs éphémères richesses ou aucun de leurs précaires pouvoirs de papiers.
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