Angela C. Journaliste-Ecrivain / Handicapée / SDF. dans le couloir de la mort. Episode 2 / Septembre 2011
Sur le plan administratif, grâce à un comIté informel de solidarité et à la particulière bienveillance d’une assistante sociale et d’un contrôleur de la CAF, le dossier d’Angela C. a été pris en main et clarifié. Des pièces manquantes qui avaient été egarées dans les circuits administratifs ont été fournies à nouveau. Il est clair maintenant que vis à vis du droit français et européen, Angela C. a DROIT aux aides correspondant à son état, et cela depuis le moment où elle en a fait la demande, en juillet 2009. C'est le paradoxe principal de cette affaire. Aujourd’hui son dossier est encore bloqué dans les rouages de l’administration pour raison de changement de logiciel (sic), et pour une enquête diligentée pour une vérification comptable nécessaire pour fixer le montant de son indemnité. Le délai normal du traitement d’une réclamation est de 2 mois minimum. Pour Angela c’est 2 mois de plus, à la rue, sans revenus, dans les conditions que je vais vous raconter ... Révoltantes. Inhumaines. N’y a-t-il pas un recours permettant de traiter l’urgence et l’injustice ? Je parlais d’inadmissible dans mon premier papier. INADMISSIBLE. Je le répète. Aux portes de l’hiver, Angela C. est en danger de mort.
Suite de l'épisode 1 : IL ETAIT UNE FOIS UN ABRIBUS.
« LA CHAISE TOUT AU FOND Á GAUCHE » (1)
Salle d’attente des urgences de l’Hôpital Bichat. La nuit, 150 à 200 personnes en moyenne viennent y chercher secours. Le double en fin de semaine.
Toute la misère et la malchance du monde s’y croisent. Le contexte est bruyant, violent, criant de désespoir et de détresse : accidents de la circulation, accidents domestiques, malaises ou rixes sur la voie publique, femmes battues en fuite, enfants blessés, du sang, des larmes, des vieillards tremblants, hagards, des overdoses, des alcooliques et des drogués en manque ou en délire, des prostituées et des travestis en bagarre, la folie échappée du secteur psychiatrique, des petits caïds qui viennent jusque là règler leur comptes ... c’est un lieu où le temps court, se dissocie, éclate, s’accélère et angoisse. C’est un endroit prévu pour l’urgence et organisé pour qu’elle dure le moins de temps possible. Plus t’y reste, plus t’y meurs.
C’est là, dans cette Cour des Miracles, que Angela C., journaliste, écrivain, handicapée, SDF, vit, je dis bien vit, la peur au ventre, depuis 6 mois. 6 mois que cette salle d’attente lui sert de chambre, et « la chaise tout au fond à gauche », de lit.
Le matin, vers 6H30, Angela quitte sa chambre pour aller se réfugier à la cafétéria où elle restera jusqu’à la fermeture. Pour une personne valide le trajet se fait en 5 mn. Pour elle en 45 mn : un ascenceur, des marches, changer de bâtiment, un morceau du parcours en extérieur au gré du climat, et un long, long, très long couloir. Á cette heure là, il est vide et silencieux. D’une main Angela tire sa lourde valise. De l’autre elle s’appuie sur sa canne. Son dos est ankilosé. Ses jambes lourdes, enflées. Ce matin elle a croisé un infirmier, elle lui a souri et lui a dit bonjour. Lui, sur un ton méprisant lui a dit qu’elle se trompait d’endroit, qu’ici « ce n’était pas un aéroport ». Angela a ravalé ses larmes, et repris son chemin. Qu’il est long ce putain de couloir ! Des fois elle se dit qu’elle ne va plus avoir la force d’arriver jusqu’au bout. Surtout le soir, quand elle le prendra dans l’autre sens. Pour retourner en enfer.
Alain-Gilles Bastide
Paris 26 septembre 2011
Auteur / Journaliste indépendant
Pdt.fondateur de l’Association des Cyber-journalistes (ACJ)
(1) Le titre est de Angela C. Il sera celui du livre qu’elle essaye d’écrire sur le voyage en enfer qu’elle est en train de vivre.
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