Bilan après un an de présidence
Tout d’abord, si Sarko est maintenant perçu comme le président qui doit s’attaquer au pouvoir d’achat, outre le contexte économique mondial, c’est également après un martelage du PS qui a été relayé par les médias. En effet, il faut se rappeler que pendant la campagne présidentielle, cette dernière avait été qualifiée de campagne "zapping" ou "patchwork" tant les thèmes abordés avaient été nombreux et se succédaient.

Le programme présidentiel avait été construit pendant les deux années précédant l’élection et bien malin qui aurait pu prédire la crise des subprimes ainsi que la hausse des matières premières et surtout du pétrole qui touchent l’économie mondiale. C’est donc tout naturellement - oserais-je parler d’une aubaine pour l’opposition, mais pas pour la France ? - que le PS a porté le débat sur ce thème, sachant pertinemment que quelles que soient la couleur du gouvernement et la politique mise en place, il y aurait des conséquences de cette crise sur l’économie et qu’ils pourraient incriminer la politique du gouvernement en faisant des amalgames entre mesures prises et résultats économiques.
Pour ma part, en re-regardant les mesures du programme présidentiel ainsi que les réformes entreprises pendant cette année et celles qui suivront, le fil conducteur de la politique mise en place est surtout la revalorisation du travail... c’est d’ailleurs la solution prônée pour résoudre la baisse du pouvoir d’achat , le problème du chômage et la compétitivité de nos entreprises... c’est donc très réducteur que de voir le "travailler plus pour gagner plus" comme un simple slogan, ce qui par ailleurs dénigre cette solution... il semble que cet angle d’attaque du PS montre que le travail n’est toujours pas de retour dans leurs valeurs (excepté pour Manuel Valls).
Qu’on ne s’y trompe pas, même si elles ne sont pas parfaites (j’y reviendrais), les réformes engagées sont STRUCTURELLES et, bien qu’elles demandent du temps, elles permettront le maintien voire l’augmentation du pouvoir d’achat DURABLEMENT (contrairement à des mesures pour un pouvoir d’achat éphémère et à crédit).
J’espère donc que le gouvernement et le président maintiendront le cap sur ce sujet.
Pour ce bilan, je voudrais également parler de deux points en particulier :
Tout d’abord, le Grenelle de l’environnement qui a été une avancée majeure de cette année et je pense à une mesure en particulier qui est le système de bonus/malus pour les achats de véhicules en fonction des émissions de CO2. Bien que la gauche se soit alliée aux verts et que Mme Voynet ait été ministre, ils en ont rêvé, mais n’ont fait que ça... la droite, elle, l’a fait !
Néanmoins, je mets un gros bémol sur la loi sur les OGM adoptée il y a peu. Cette loi permet la contamination par les OGM des cultures traditionnelles, c’est un processus irréversible car, une fois les semences usuelles contaminées, la propagation des OGM sera constante et s’imposera de fait sans avoir de choix alternatif pour les consommateurs ! De plus, dans ce texte, c’est aux agriculteurs pollués de prouver qu’ils ont été contaminés (ceci entraînant des frais importants) et non l’inverse... inadmissible !
J’ajouterai qu’il est vraiment facile de s’abriter derrière l’Europe. De plus, Nathalie Kosciusko-Morizet ne fait même plus la différence entre biodiesels et huiles végétales, elle parle maintenant de biocarburants sans faire de distinctions alors qu’elle les connaît parfaitement. C’est devenu une fine politicienne et elle a un brillant avenir devant elle, mais ça me fait mal pour elle ! J’ajouterai que ce texte est surtout le fruit du travail de pression du député Bizet ainsi que du ministre de l’Agriculture Barnier (qui par ailleurs avait fondé un "club" écologiste pendant la campagne présidentielle... ça me fait rire jaune).
Sur les projets de loi à venir, il y en a un qui me semble particulièrement intéressant : celui sur l’épargne salariale avec un tiers des bénéfices de l’entreprise redistribués aux salariés.
Ce serait tout simplement la synthèse réussie entre le capitalisme et le communisme en ne prenant que leurs bons côtés ! Hausse du pouvoir d’achat pour ceux qui en bénéficieraient, motivation des salariés et fin de l’opposition stérile entre salariés et patronat. Cette mesure prend exemple sur le système des SCOP dont l’entreprise des "chèques déjeuner" est la pionnière... à suivre de très près donc.
Ayant été sarkozyste convaincu et ayant milité activement sur le net et particulièrement sur le forum de l’émission Arrêt sur image, j’avoue avoir été assez déçu sur certains points pendant cette année :
- tout d’abord la loi sur les OGM dont j’ai parlé juste avant ;
- il y a évidemment l’image de NS : sa façon de parler à Mme Merkel comme à une cantinière, il y a quelques mois, puis on a eu l’impression qu’il se reprenait... et il a "rechuté" la semaine dernière en comparant le nombre de SMS qu’il recevait de la chancelière avec son mari. Ca se voulait sûrement de l’humour au début, mais en y revenant lourdement à plusieurs reprises, c’était limite grossier à la fin... Je me demande comment les Allemands (culturellement protestants) l’ont pris. Mais il y a surtout eu sa façon de faire de la politique au petit bonheur la chance, j’entends par-là de lancer une mesure, de voir la réaction de l’opinion et de faire marche arrière si nécessaire... ça ne ressemble pas du tout à un président qui sait où il va et qui maintient le cap ! ;
- il y a également la réforme sur le service minimum dont, à mon sens, on a retiré l’essentiel. Le point-clé de cette réforme telle qu’elle avait été présentée pendant la campagne était les trois heures de transports en communs assurés matin et soir aux utilisateurs pour pouvoir se rendre à leur travail... mesure passée à la trappe !
Si le choix du recul a été fait, je pense que c’est surtout pour ne pas s’opposer frontalement aux syndicats dès le départ alors qu’une longue liste de réformes étaient à suivre... mais ça reste, à mon sens, une grosse erreur. Le gouvernement a gagné du temps pour les réformes qui ont suivi, mais à quel prix ? Pendant les grèves en novembre et décembre 2007, il y avait déjà des préavis de quinze jours (si je me souviens bien) avant que la loi ne passe et ça n’a pas empêché la région francilienne d’être bloquée ! Lors des prochaines grèves dans ce secteur et cette région (il y en aura sûrement dans les quatre ans à venir), les usagers seront bloqués comme avant, ils se rendront compte de facto que cette mesure est inefficace et en grande partie une histoire de com, histoire de dire que cette réforme a été faite ! A partir de là, il n’y a pas loin pour que des amalgames voient le jour entre l’inefficacité du service minimum et de l’ensemble de toutes les autres réformes ;
- il y a aussi la réforme en cours concernant les marges arrière et la distribution. Elle peut faire baisser les prix, mais la question est de savoir à quel prix pour l’économie française. Si la baisse des marges des grands groupes alimentaires ne me posent aucun problème (bien au contraire), j’ai peur que de nombreuses PME mettent la clé sous la porte ! ... et je pense que cela renforcera la position dominante de la distribution (en France, les discounters sont des filiales des grands groupes de distribution). De plus, je n’ai pas entendu de mesures visant à réduire la chaîne d’intermédiaires entre les producteurs et les distributeurs où il y a la plus grande marge de réductions de prix (les centrales d’achat dépendent également en partie des distributeurs). Enfin, j’ai cru comprendre que le système opaque de négociations avec la distribution restait de mise... même si les prix baissaient, cela ne viendrait pas des distributeurs qui sont en position de force dans les négociations... Il suffira de voir l’évolution de leurs bénéfices en France une fois que cette loi sera passée pour se rendre compte que le nouveau système les rendra encore plus bénéficiaire (sur le dos des consommateurs).
Un petit exemple : un produit vendu à 1,10 euro en Allemagne l’est à 2,20 euros en France.
(Exemple donné par M. Leclerc dans un journal du Soir 3 sans me souvenir du produit en question).
A partir de là, je vais diverger par rapport à son analyse, il y a forcément 1,10 au minimum de bénéfice réparti entre le distributeur et le vendeur. Supposons qu’ils aient chacun 55 centimes de bénéfice sur ce produit, que la loi passe et que le distributeur puisse faire pression sur le vendeur, ce dernier concède alors une baisse de 45 centimes sur son produit (la grande distribution étant incontournable pour faire des ventes à grande échelle) et le distributeur n’en répercute que 35 centimes de baisse.
Résultat :
- pour le consommateur, le prix baissera de 2,20 euros à 1,85 euros... Il sera content sans savoir qu’il se fait arnaquer de 65 centimes ;
- pour le vendeur (à la grande surface), son bénéfice resterait de 10 centimes supérieur au même produit vendu en Allemagne ;
- pour le distributeur (c’est le BINGO) son bénéfice augmente encore de 10 centimes sur ce produit.
Ce serait donc une avancée pour le consommateur, mais en fait les baisses seraient... au rabais !
Il serait donc nécessaire de lever cette opacité dans les négociations pour être vraiment efficace dans la baisse des prix.
Les grandes surfaces s’opposent évidemment à cette transparence, celle-ci mettant fin (selon eux) à la concurrence avec les autres grandes surfaces. Eh bien, il y aurait une solution simple : mettre en place une "commission" dépendante de l’Etat, chargée de surveiller le bon fonctionnement des négociations et intervenant alors en cas d’abus de position dominante... et qui soit assujettie à un devoir de confidentialité par rapport aux autres grandes surfaces.
Les grandes surfaces et la distribution sont pourtant les entreprises françaises qui, par définition, ne sont pas délocalisables, c’est pourtant à elles qu’on touche le moins... dommage !
- Concernant l’union pour la Méditerranée, j’avoue être sceptique... Il y a des négociations depuis des mois avec les pays outre-Méditerranée sans qu’on sache exactement sur quoi elles portent et ce que sera cette union. En tout cas, cela ressemble fortement à un élargissement de l’UE dans notre dos, un peu comme lorsque l’Europe a intégré dix nouveaux pays sans nous demander notre avis !
Et il y a la question de la Turquie avec le référendum mis au placard dans le flou artistique quant à son éventuelle date... mais peut-être aura-t-on un peu plus de précisions une fois la présidence française de l’UE passée... enfin, je l’espère !
Pour finir, je parlerai d’un regret, celui de la TVA sociale (ou anti-délocalisation) qui a été abandonnée par le gouvernement suite à une polémique politicienne et démagogique à des fins électorales lancée par M. Fabius dans l’entre deux tours des législatives.
C’est bien dommage car avec une hausse du RMI, des allocations chômage ainsi qu’une baisse des charges salariales, toutes calculées de manière à compenser exactement cette hausse de TVA, les Français auraient exactement le même pouvoir d’achat... SAUF QUE toutes les importations seraient taxées un peu plus et serviraient à financer une partie de notre système social.
Je reste donc convaincu que ce serait une très bonne mesure, que cette polémique lancée par le PS pour des raisons politiciennes et électorales a été irresponsable, et que le recul des élus de droite a démontré un manque de courage et de l’inefficacité dans la pédagogie... voire un recul sur cette mesure sans même essayer d’argumenter pour la défendre.
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