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Accueil du site > Tribune Libre > Ceci n’est pas le monde, ni même de l’information (...)

Ceci n’est pas le monde, ni même de l’information !

Nous ne sommes pas dupes. Les déclarations des politiques dans les médias ont un double volet. Elles ont une valeur déclarative et explicative lorsqu’il s’agit de commenter des décisions et des actes mais elles ont aussi une fonction dérivative, artificielle, un peu comme l’est la publicité pour des marques. C’est flagrant. Même le plus puissant des présidents, affublé d’un Nobel de la paix, n’échappe pas à ce dualisme. Obama, ce sont de beaux discours, de belles incantations, mais dans les faits concrets, des failles importantes, notamment sur les questions qui fâchent, celles du Proche-Orient et de la guerre en Afghanistan. Les analystes les plus sévères évoquent carrément une impuissance du président des Etats-Unis. Une drôle d’atmosphère plane sur le monde en cet automne 2009. On ne sait quoi dire d’essentiel face à un spectacle de sociétés devenues confuses, à un point tel qu’on ne différencie plus tellement ce qui est de la représentation et ce qui relève de l’action. Ces deux volets étant régis par des règles bien distinctes. La représentation, elle est ou elle n’est pas. L’action c’est tout autre chose. Elle peut être représentée ou ne pas l’être. Et quand elle n’est pas représentée, ce n’est pas pour autant qu’elle n’est pas. Bien au contraire. Ce monde qui était volonté et représentation selon Schopenhauer n’apparaît plus que comme représentation, voire simulacre. Qui fait la différence entre la série Urgences et un reportage sur la vaccination ? Les points de repère ont été troublés, parfois détruits, parfois falsifiés. Les puissants ne font rien là où ils affirment agir dans leurs discours, alors que d’autres puissants agissent sans que les médias ne puissent livrer des faits et des analyses argumentées.

La vérité en sciences sociales, c’est à la fois les actions et leur interprétation, et les intentions réelles, autrement dit les volontés, les buts poursuivis par les hommes. Un monde où tout serait clair sur ces points fonctionnerait dans un état d’équilibre parfait si on y ajoutait le sens de la justice. Mais il serait sans doute figé. La progression passe parfois par des transgressions.

Ces bonnes paroles philosophiques énoncées, que penser de ce cirque et ce flou médiatique ? Le flou dans l’interprétation de nombreux faits importants, en économie, en santé publique, en climatologie. Les grandes gueules ont gagné la partie. Les citoyens ont été enfumés sur tous ces sujets. Le cirque, c’est un peu la revanche des citoyens sur l’impuissance. On lance des tomates, on hue, on fustige, et c’est ce qui s’est passé à propos des affaires Brice Hortefeux, Frédéric Mitterrand puis Jean Sarkozy. La société n’est sortira pas grandie, ni améliorée mais ceux qui ont hué peuvent se sentir soulagés, au même titre qu’un supporter déçu ayant crié « mort à l’arbitre ». C’est sévère mais c’est la réalité. Admettons que Hortefeux ait été sanctionné, que Mitterrand ait démissionné, que Sarkozy se soit retiré de l’EPAD, et alors, quel aurait été le progrès de la société ? Nul, excepté la satisfaction de la victoire qui n’apporte rien si ce n’est un supplément de sens moral équivalent, en termes allégorique, à une pulvérisation de déodorant sur une décharge publique car l’immoralité sociale est plus répandue que le territoire couvert par les médias. Récemment, les rédactions ont témoigné de considération envers les salariés des entreprises où l’on se suicide avec un peu trop d’ostentation.

Les médias représentent ce qui est ostentatoire. Un type qui atteint le nirvana ne fera jamais la une ni n’aura son quart d’heure de célébrité. Son dessein se déroule dans l’âme et il n’a que faire des frasques médiatiques qui le lui rendent bien. Le SDF qui crève dans son coin c’est la même chose, sauf que cette fois ce sont les médias qui n’en ont rien à faire. Pourtant, ces deux faits devraient intéresser les médias. La représentation du monde en serait élargie mais peut-être pas les bénéfices des sociétés industrielles de l’image dont les profits sont liés à la satisfaction des goûts moyens du spectateur que du reste, ils contribuent à façonner.

L’info est parfois orchestrée, avec des fuites organisées. Quelques fois, d’étranges recoupements confèrent un parfum d’irréalité aux événements. Comment se fait-il que Jean-Pierre Treiber puisse passer devant des caméras de police, se faire photographier, sans être inquiété, alors qu’un couple appartenant au mouvement autonomiste basque vient d’être capturé en Bretagne, à près de 1000 kilomètre du Pays Basque espagnol ? Dans « Ce soir ou jamais », Frédéric Taddéi s’interrogeait sur ces photos de Treiber publiées par le Figaro après une fuite non identifié, et se permettait d’affirmer qu’il n’y avait aucun doute, que c’était bien Treiber. Peut-être que Taddéi ne connaît pas les mots sosie et ressemblance. Mais peu importe, c’est sans importance, sauf au cas où il y aurait vraiment un faux Treiber, auquel cas ça ferait un beau pataquès si l’anonyme filmé contactait un journal concurrent pour se dénoncer. Et si quelqu’un avait payé un type ramassé dans la rue pour passer devant les caméras ? On n’est plus certain de rien.

De quelle époque ces simulacres de représentations sont-ils le signe ? Sans doute d’un crépuscule, d’une fin de quelque chose, mais de quoi au juste ? Fin de la modernité ? Pourquoi pas. Mais savons-nous ce qu’a été la Modernité, son ressort ? Le savoir, puis le savoir faire et enfin le faire savoir. Technique de communication et hypertrophie pragmatiques vont de pair. Il faut du résultat et il faut publier les chiffres et les graphiques. Mais attention, ceci n’est pas une représentation. Pas une fiction non plus. Un mélange des deux. Faire du chiffre et chiffrer les choses, ainsi la matière humaine en friche se fait arraisonner et l’on déchiffre ce défrichage d’un humain devenu défiguré, d’un côté la figure du technicien, du manager, de l’autre, celle de la substance humaine, chair à profit, instrument des objectifs industriels et politiques, sous l’œil des objectifs médiatiques.

Et dans un coin de la scène, à l’écart des caméras, des poètes composent d’autres mélodies, jouant aux quatre vents une partie sans règles autres que celles de l’art de créer et d’exister.

Autre signe du crépuscule, le délitement de l’Etat. Mais c’est une autre affaire. L’Etat est un élément de la Modernité mais cet Etat n’est-il pas soumis à un permanent délitement, avec des phases constructives et d’autres, disons, de corruption ? Un beau sujet à traiter


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12 réactions à cet article    


  • Francis, agnotologue JL 22 octobre 2009 11:27

    Comme d’habitude Bernard Dugué fait son marché sans payer. Mais magritte s’en fout.

    Ceci n’est pas un article, c’est de la bouillie.

    Je me suis donné la peine de lire ces élucubrations jusqu’au bout, et même de relire. J’espère que son auteur ne m’en voudra pas si je dis ce que je pense : nous ne sommes pas tenu de commenter intelligemment les réflexions d’un monsieur qui ne se donne pas la peine de les présenter correctement.


    • Francis, agnotologue JL 22 octobre 2009 11:38

      Bon, je dois faire mes excuses, cet article est présenté en tribune libre. Il devrait y avoir une rubrisue « philosophie », ou « divagations ».


    • geo63 22 octobre 2009 11:49

      Je ne trouve pas que cet article est de la bouillie, bien au contraire. Il pose une vraie question sur ces simulacres de représentation. Ce qui prévaut actuellement c’est le sentiment d’une grande impuissance devant ce « cinéma » sans cesse répété.


      • L'enfoiré L’enfoiré 22 octobre 2009 11:54

        Bonjour,

         Question que seul un Belge qui a Magritte comme porte drapeau peut répondre : c’est article est il une pipe ?
         Pourquoi veut-on toujours être en porte à faux ? Toujours à se demander si l’action est meilleure que la réflexion. Les impatiences, j’en ai connu dans ma carrière. Du côté des conneries annexes, plus qu’à mon tour.
         Le but n’est pas d’aller vite, mais d’aller juste avec tous les paramètres en sa possession
         Huit ans de conneries aux States ne s’effacent pas en un peu moins d’un an.
         Le prix Nobel de la paix était un cadeau empoisonné.
         Alors, un pipe ? Je ferais un tableau avec des cendres, en posant la même question.


        • kako brutus kako brutus 22 octobre 2009 16:51

          Monsieur Dugué m’a fait connaitre THERION , grand merci à lui . Je lui suggere d’ecouter OPETH si ce n’est déja fait .
          Salutations


          • ddacoudre ddacoudre 22 octobre 2009 18:04

            bonjour dugué

            de ce que nous connaissons de notre histoire reconstitué par nous, jamais société n’a été aussi complexe, et il semblerait que l’accroissement de l’enseignement ne soit pas de nature à réduire le différentielle entre l’enseignement reçus et la complexité du monde à appréhender.
             il devient donc facile de tromper et de duper si l’on ne distingue plus le virtuel du réel. ou bien il faut admettre que loin d’être naïf, la population s’accommode parfaitement de cet asservissement au leurre flatteur et à la manipulation narcissique. ou admettre comme nous le démontre notre histoire qu’il ne faut rien attendre des masses qui sont veules et qui se solidarisent toujours avec leurs tyran, soit en le courtisant soit en rongeant son frein pour se joindre à celui qui aura le courage de fondre sur le précédent.

            cordialement.


            • UnGeko 22 octobre 2009 20:40

              Nom d’une pipe l’âme d’un vrai résistant le ddaendecoudre !

              Si les massmedias servent de la « merde » c’est parceque les gens aime ça (dixit jean yann dans le rôle d’un journaliste). A ce titre AV s’en fait un peu trop la caisse de résonnance à mon gout ! Mais ça fonctionne du feu de dieu !




            • ddacoudre ddacoudre 22 octobre 2009 21:20

              bonjour ungeko

              merci. effectivement il n’y a aucune raison que ago échappe à ce phénomène. a l’acception de quelques articles, la plus part commentent une actualité qu’ils subissent et ne font pas puisque elle nous est distribué par tous les média et nous ignorons la plus part du temps qui ou quelle structure parmi les millions d’informations choisi tel ou tel sujet que nous subissons et reprenons en coeur.

              il ne peut échapper à un esprit avisé instrumentalisation de l’info, je rapellerai une maxime chinoise d’ont j’ai oublié l’auteur, inscrivait au dos d’une carte à jouer ce dont vous voulez instruire les hommes.
              c’est ainsi que dans ce jeu de l’info le dos est souvent « merdique » car on entend la manipulation et l’on sent le ponion.

              cordialement.


            • joelim joelim 22 octobre 2009 20:00

              Admettons que Hortefeux ait été sanctionné, que Mitterrand ait démissionné, que Sarkozy se soit retiré de l’EPAD, et alors, quel aurait été le progrès de la société ? Nul, excepté la satisfaction de la victoire qui n’apporte rien si ce n’est un supplément de sens moral équivalent [..]

              Le cas Hortefeux est bien bénin, mais Mitterrand et Jeanjean, selon vos propos, ne feraient pas régresser la société à leur nouveau poste ?

              Donc tout vaudrait tout, est-ce çà la nouvelle philosophie molle qui s’écoute parler ? 

              Un système qui s’autorégule et un autre (le nôtre) qui choisit la fuite en avant, vous ne voyez pas de progrès dans le 1er ? Désolé mais franchement çà me troue quelque part.

              • Moristovari Moristovari 22 octobre 2009 21:06

                Un article qui rejoint un thème qui m’intéresse particulièrement : cette tendance sociale à la schizophrénie, cette incapacité grandissante à dfférencier action et représentation notamment dans tous les phénomènes contestataires. Ainsi Agoravox est-il devenu une vallée des bannis, un temple catharsis de la frustration où faits et rumeurs se mélangent pour former un tout représentatif de l’esprit contemporain : celui des médias, celui des autres. Comme si la communication était l’action.

                La démocratie explique en partie cette tendance. Quand le citoyen prend au sérieux sa petite responsabilité politique donc historique, c’est souvent sans critiquer au préalable sa propre compétence sur les sujets d’envergure qu’il s’apprête à juger. Ainsi, quand il se jette dans l’agora citoyenne, est-il soumis à tous les vents, des croyances établies aux rumeurs grandissantes, et cette pollution contre laquelle il ne possède aucun masque à oxygène - l’esprit critique, notamment envers toute information indirecte - à tôt fait de faire de lui un nouvel émetteur de rumeurs et un nouveau pilier des croyances établies.

                Il n’existe que deux manières d’apprendre : par les erreurs ou par l’éducation. Mais quand à l’éducation, plus que jamais, attention à quels maîtres on se voue.


                • ddacoudre ddacoudre 22 octobre 2009 21:36

                  bonjour maristovari

                  excellent commentaire, je ne crois pas que pour participer à un média citoyen qui peut servir d’exutoire narcissique, il faille tout savoir, car alors nous n’écririons plus rien. ainsi il n’est pas un article qui ne comporte ses propres insuffisance faute de maitriser le sujet dont il traite. mais au moins les commentateur peuvent y apporter leur contribution voire en corriger les erreurs, ce qui n’est pas possible sur les autres médias, qui lorsqu’ils déversent leurs fiels ou leurs mensonges, ceux ci poursuivent leurs effets nauséabonds qu’il ne convient même pas de contrecarrer faute d’aggraver encore plus la situation. tu as bien souligné que notre existence se déroule sur le mode échec et notre éducation n’est que l’empilement de ce que chaque culture a pu retenir de nos échecs successifs et poursuit vainement une vérité salvatrice en se construisant des mondes schizophréniques. c’est un fou qui s’élève au dessus du mur voit un passant et l’interroge, vous étes nombreux de ce coté ???


                • Moristovari Moristovari 23 octobre 2009 11:24

                  Peu importe que l’on sache tant qu’on doute que l’on sait. Cette humilité nécessaire à tout apprentissage est hélas oubliée - c’est excusable si on accepte le déterminisme dont celui d’une mauvaise éducation - par la plupart des citoyens, soit certains de leur savoir, soit confiant en leur bon sens. Dès lors, le débat démocratique est une impossibilité intellectuelle et technique.

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