Ces guerriers qui dissertent sur la paix...
Ah, le 11 novembre... la fameuse commémoration, bien pratique pour occulter pour un temps les misères que le peuple français subit aujourd’hui...
Pour autant, il y aurait tant d’autres choses à dire plutôt que de commémorer souvent assez hypocritement nos chers disparus...
Au-delà des bons sentiments, des paroles attendues, des mouchoirs sortis, que s’est-il passé ce fameux 11 novembre 1918 ?
Selon la parole d’un sage chinois, un bon armistice doit être équitable sinon il préparera la guerre suivante.
C’est la réflexion qu’auraient dû se faire les négociateurs de 1918, car les lourdes sanctions imposées à l’Allemagne allaient fatalement déboucher sur une nouvelle boucherie... laquelle n’a pas manqué de se produire entre 1939 et 1945.
En effet, ces sanctions empêchaient les vaincus de s’en remettre, les plongeant fatalement dans une misère noire, qu’allait exploiter plus tard, un certain Adolphe... avec les suites que l’on sait.
Au-delà des sanctions militaires (armée réduite à 100 000 soldats, occupation militaire de la rive gauche du Rhin, interdiction d’utiliser l’artillerie lourde, des cuirassés et des avions etc...) mais surtout les sanctions financières de l’ordre de 269 milliards de mark-or, soit plus qu’une année du revenu national. lien
Mais revenons à cette « journée de la paix »...
Finalement, en 2018, Macron a célébré la paix avec ceux qui vendent des armes... la France en étant l’un des plus gros contributeurs. lien
On n’a pas oublié que, questionné par quelques journalistes impertinents sur les armes vendues par la France à l’Arabie Saoudite destinées à bombarder le Yémen, alors que certains pays ont décidé de ne plus vendre des armes, Macron a esquivé la question, maniant « l’argument qui tue », argument simpliste s’il en est : « si nous n’en vendons pas, d’autres le feront »...
C’est en mars dernier que 2 associations ont saisi le gouvernement, s’indignant que depuis 4 ans, la France bat tous les records en matière de vente d’armes, en se classant, selon le SIPRI (centre de recherche suédois), au 3ème rang mondial en matière de vente d’armes.
Le délégué général de l’armement, Joël Barre, a justifié cette piètre position en déclarant : « l’exportation représente un tiers du chiffre d’affaire de notre industrie de défense. Celle-ci en a donc besoin, et nous en avons-nous-même besoin pour garantir, par exemple, les chaines de production de nos matériels ».
Sauf que les associations reprochent à cette justification bassement financière qu’elle ne tient pas compte du fait que ces ventes à des états ne respectant pas les droits humains sont moralement indéfendables.
En effet Amnesty international et ACAT (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture) ont précisé leur position : « il existe un risque très élevé que les transferts d’armes vers l’Arabie Saoudite et les Emirats arabes unis soient illégaux en vertu des engagements internationaux de la France »... s’appuyant sur le traité concernant le commerce des armes, ratifié en 2014 par notre pays, mais aussi sur la position du Conseil de l’Europe de décembre 2008. lien
Ça n’a pas empêché l’invitation faite à MBS, le leader de l’Arabie Saoudite, au « forum de la paix »... malgré la sale affaire de l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi. lien
Finalement, MBS a disparu des radars, et n’est pas allé à Paris. lien
L’invitation était d’autant plus surprenante qu’elle ne devait concerner que les pays ayant participé à la 1ère guerre mondiale, ou ayant projeté des troupes et travailleurs sur les théâtres européens d’affrontement. lien
Mais le petit président français n’en a cure.
Expliquant qu’il ne cédera pas à une « pure démagogie », ajoutant : « mon agenda n’est pas dicté par les médias, que ça vous plaise ou non », Macron a tenté de minimiser l’implication de la France dans la vente d’arme à l’Arabie Saoudite, affirmant qu’elle était « un modeste fournisseur »...sauf qu’en 10 ans, les ventes d’armes françaises se sont élevées à 11 milliards d’euros. lien
L’occasion de rappeler que les seuls vrais grands gagnants ont été les multinationales qui ont produit près de 9 millions d’obus. lien
Et puis ce serait oublier les près de 15 milliards de contrats passés récemment avec MBS, le dirigeant saoudien. lien
Cerise sur le gâteau, le président français tente d’opposer « nationalisme » et « patriotisme »... alors que ces 2 courants de pensée veulent « en même temps » exalter certaines valeurs nationales, et s’attacher profondément à la patrie, quitte à la défendre en cas d’attaque extérieure.
Mais revenons à la guerre de 14/18...
Il a fallu beaucoup de temps pour en découvrir des aspects pour le moins surprenants...
On aurait pu s’étonner de l’absence de la Chine, lors de la commémoration du 11 novembre, alors qu’elle avait largement contribué à « l’effort de guerre », avec pas moins de 140 000 citoyens chinois... dont 37 000 enrôlés dans l’armée française. lien
Surprenant aussi la mort de centaines de soldats le 11 novembre alors que l’armistice avait été signée, et que l’on a déclarés morts la veille... pour éviter des histoires...
C’est d’ailleurs ce que raconte Pierre Lemaitre, prix Goncourt, dans son roman « au revoir là-haut ». : « Quelques officiers lancent un dernier assaut, le 11 novembre, dans l’idée de réaliser un ultime coup d’éclat ». lien
Citons aussi les fraternisations entre français et allemands... lesquelles furent sévèrement punies par les officiers, et pourtant...
Il y eut même des matchs de foot organisés entre les 2 belligérants... ou des moments d’échanges pendant lesquels on troquait des saucisses contre des cigarettes, on trinquait, constatant que l’autre n’était pas le méchant que l’on disait...
Il arrivait aussi qu’ils collaborent entre eux, afin de protéger la vie de leur « nouveaux frères » avertissant « l’ennemi » d’une prochaine frappe d’artillerie, allant jusqu’à l’invitant à se planquer dans sa propre tranchée. lien
Il n’y a pas si longtemps, je lisais, lors d’une animation villageoise, des lettres de poilus, évoquant d’étonnants moments, lorsque par exemple les soldats français voyant l’adversaire se baigner à portée de fusils n’avaient pas envisagé de leur tirer dessus.
Au-delà des discours bienpensants macroniens, il ne faudrait pas occulter les conséquences de cette guerre, qui ne devait durer que quelques jours...et qui a fait 18,6 millions de morts, dont la moitié étaient des civils... pas plus que les 3,3 millions d’hectares de terres déclarées impropres... ni le quasi million d’orphelins laissés à la fin du conflit... ni les 600 000 veuves au lendemain de la guerre... lien
L’occasion de remarquer que le président français semble toujours fâché avec l’histoire, car lors de son discours, il a dénombré 10 millions de morts, 3 millions de veuves, et 6 millions d’orphelins...lien
Passons...
Le « en même temps » présidentiel n’aura jamais autant été d’actualité, puisque, comme l’écrit Pauline Tétillon, co-présidente de l’association Survie, dans les colonnes de l’Humanité, ce gouvernement « sponsorise la guerre, soutient la dictature, et en même temps, célèbre la paix ». lien
Il reste pourtant un hommage qui ne sera peut-être jamais rendu, hommage aux mutins, aux antimilitaristes, objecteurs de conscience, insoumis, anarchistes, ceux qui ont désobéi, ont protesté, qui ont abandonné leur poste, foudroyés par la peur, qui ont contesté les ordres, qui se sont dressés contre l’absurdité de la guerre et le pouvoir de ceux qui la déclarent, un hommage pour ceux qui ont étés emprisonnés, fusillés, battus, humiliés, exilés, déportés, condamnés aux travaux forcés pour avoir refusé de trouer la peau de leur frères humains..., comme l’écrit dans une tribune sur la toile un certain Yak Wasabi. lien
Et puis, où sont les noms de ceux qui ne figurent sur aucun monument aux morts ? Chaque année qui passe amène son lot d’oubliés... et leurs noms sont gravés sur la pierre... souvent après de longues démarches administratives.
En effet, ceux qui finalement ont découvert ces « oubliés de l’histoire », entament des procédures qui vont mettre des années à être prises en compte. lien
Décidément le soldat inconnu est de moins en moins seul...et qui pourrait imaginer que commémorer chaque année la fin d’une guerre serait aller vers la paix, si les états n’en prennent pas le chemin ?
Comme dit mon vieil ami africain : « le borgne n’a qu’un œil, mais il pleure quand même ».
Le dessin illustrant l’article est de Chapatte
Merci aux internautes pour leur aide précieuse.
Olivier Cabanel
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