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Accueil du site > Tribune Libre > Changer d’air !

Changer d’air !

On nous invite à changer d’air, de pays. On nous parle d’évasion. Sommes-nous des forçats pour chercher à fuir ?

Dans les premières années qui ont suivi son divorce, une boulimie de voyages s’est emparée d’elle : en couple ou bien avec les copines, en célibataires enjouées et hilares. Destinations bon marché pour une semaine, voire deux, à l’hôtel, parfois Le Club quand ses moyens le lui permettaient mais... toujours dans des lieux où rien de fâcheux ne peut arriver ; des lieux sans risque et dans lesquels aucune rencontre que l’on n’ait pas déjà faite, aucun enseignement que l’on n’ait pas déjà reçu et plus encore, quand il n’est pas question d’apprendre quoi que ce soit d’où que ce soit et de qui que ce soit.

Touriste à bagage unique et léger aux allers-retours multiples ! Jusqu’au jour où une lassitude énorme est venue mettre fin à ses envies de voyage. Elle ne supportait plus les aéroports, les retards, l’attente dans les salles de transit, les sourires imbéciles à la réception des hôtels, les taxis et les chameliers raquetteurs : le harassement de la mendicité sous le couvert d’un commerce hasardeux et si peu convaincant dans sa pratique.

Et l’eau que l’on peut tantôt boire, tantôt ne pas boire sous aucun prétexte, de même pour la nourriture.

Le soleil et l’argent, encore le soleil et toujours l’argent ! Pas d’argent pas de sourire et, pour un peu, pas de soleil. Dans les rues, on se promène mais on ne voit rien - comprenez : on ne peut rien évaluer, rien comprendre - puisque rien ne nous est expliqué. Et si d’aventure des autochtones lettrés et avisés devaient se proposer de le faire, nul doute que le mensonge serait au rendez-vous : ils nous diraient ce qu’ils pensent devoir nous faire entendre, qui ne serait - à leurs yeux - que ce que l’on souhaite s’entendre dire.

Et encore le soleil et la chaleur qui n’en finissent pas de vous aveugler, de vous ramollir physiquement et mentalement ; une fatigue épouvantable en fin de journée quand on regagne son hôtel dans un lieu situé non loin d’un bidonville qu’on tente de nous cacher jusqu’au jour où l’on trouvera bien des volontaires zélés pour y parcourir entre deux monticules de détritus, les sentiers nauséeux et purulents de misère ensoleillée : la curiosité n’a pas de prix puisqu’elle passe après l’ignorance de ceux qui ne soupçonnent pas un instant qu’ils puissent l’être.

Si on renonce à tout, pour occuper nos journées, il nous restera une piscine et un transat, ou bien un hamac, derrière une clôture, du matin au soir, avec le petit personnel, prisonnier tout comme nous et dont l’occupation principale consistera à changer nos draps, à vider nos poubelles, à lustrer nos lavabos, baignoires et toilettes, et ce, pour notre plus grand confort et notre plus grand bonheur jusqu’au moment où l’on ne supporte plus leur présence ; témoignage embarrassant d’une relation impossible de nous à eux sinon dans le mensonge, l’assujettissement, et encore le mensonge de tous ces visages qui mentent, même réjouis, même hilares ou bien indifférents.

Et le nôtre de visage face aux leurs, c’est déjà un départ, dans quelques jours et c’est aussi un rien qu’on aura laissé derrière nous et qu’on aura pris d’eux - sans oublier l’inévitable sentiment d’être allés jouer les riches chez les pauvres.

Un tel déséquilibre rend tout rapport impossible en l’état. Même la sincérité, la bonté vraies nous sont tout aussi insupportables car, quoiqu’il arrive, on ne sera jamais à la hauteur ; on ne pourra jamais rendre la pareille. Et tous les parfums, les senteurs et les couleurs n’y changeront rien : quelque chose a été saisi et ce saisissement nous empêche d’en saisir davantage.

Culpabilité accablante : on s’est fourvoyé dans un lieu qui n‘en est pas un.

***

Au retour, le sentiment de n’avoir rencontré personne. Pire encore ! Aucun sentiment puisqu’il n’était pas question d’y rencontrer qui que ce soit - sinon les mêmes, interchangeables à souhait, tels des voisins de palier, des collègues de bureau : là d’où l’on vient.

Être parti si loin pour retrouver les mêmes, bavards et suffisants...

Décidément, on mérite beaucoup mieux et ce mieux indisponible, on ira le chercher là où il n’est pas : chez soi, terré.

Mais là où l’on nous épargnera le pire : la bêtise et la honte. C’est déjà pas si mal.

Copyright Serge ULESKI.2007. Tous droits réservés.


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7 réactions à cet article    


  • Harald 6 mars 2008 13:02

    glj,l, !n nh
    hrtghwsz
    m ghen,
    g€g ,swey ty ;kuylirm:p !PyPooo
     ooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooooo


    • Harald 6 mars 2008 13:04

      Oups ! 1 000 excuses : je m’étais endormi sur le clavier en lisant votre article.

      Vous disiez donc ?


    • gany 6 mars 2008 16:26

      harald , un vrai pitre.

      Au moins j’aurai bien rigolé


      • Désuet Aigri 6 mars 2008 18:49

        Cher Monsieur,

        Déjà que j’avais bien apprécié votre précédent opus sur les imbéciles au bureau (étant moi même un imbécile au bureau), alors là je me fend d’un commentaire car je vous approuve entièrement.

        Longtemps j’ai été un adepte du dépaysement tarifé, mais je me suis rapidement aperçu de ce que vous décrivez si bien.

        Toute cette misère qui vous regarde, vous qui n’avez pas faim et êtes correctement vêtu. Et ce sentiment confus d’être dans la peau de Marie-Antoinette en 1788, que ce qui se quémande d’un ton plaintif sera, tôt ou tard, exigé avec des arguments qu’on ne peut refuser. Lors des troubles de la fin du 18eme siècle, en France, les foules qui attaquaient les chateaux ne se préoccupaient pas si leurs habitants étaient estimables ou s’ils étaient coupables d’exaction. Non, ils se retrouvaint tous à la lanterne. C’est pourquoi, je prévois depuis longtemps (20 ans) qu’un jour, on attaquerait les touristes parcequ’ils sont touristes. Cela vient effectivement de se passer en plusieurs endroits de l’Afrique.

        J’avais résolu le problème en voyageant POUR NE RENCONTRER PERSONNE. Les pays chauds en hiver et les froids en été. Des pays riches ou de toute façon personne ne parle à personne. Des destinations idiotes : Maubeuge, Paris le dimanche soir, Pecs (Hongrie), Marseille à Paques, Norvège (on s’y perd) ou Allemagne. Je ne jouissait que de l’espace, l’air pur, le temps vide ou rien ne se passe.

        Et puis maintenant j’en suis à votre point, je reste chez moi et je relis Sénèque.


        • Serge ULESKI Serge Uleski 6 mars 2008 21:24

          Merci d’avoir pris la peine et le temps d’ajouter ce commentaire.

          cela dit, vous écrivez : "Et puis maintenant j’en suis à votre point, je reste chez moi et je relis Sénèque. "

          Il est aussi question de continuer de voyager mais... autrement. On peut encore sortir, je pense.

           

          cordialement

          Serge ULESKI


        • zOoO zOoO 7 mars 2008 08:22

          Pour avoir travaillé de nombreuses années de l’autre coté de la barrière, j’adhère totalement à votre point de vue et suis devenu moi même un handicapé du voyage.

          Il m’est extrement difficile de trouver un interet quelconque au voyage classique et suis "obligé" de me trouver ou créer des centres d’interets pour me déplacer.

          Finalement c’est un mal pour un bien.


          • blurpy 7 mars 2008 09:39

            Votre desillusion m’étonne. Que pensiez vous pouvoir attendre d’une semaine de vacances à l"étranger" achetée en promotion comme des paquets de nouilles vendus par 2 ? Prise de risque zéro=bénéfice zéro, tout économiste le confirmera.

            A mon sens notre problème (peut etre franco-francais ?) c’est l’"étranger". Terme à la fois fascinant et retoutable que je gommerais avec délectation du dictionnaire. Il y a l’étranger plus riche et plus civilisé (bref les états unis en gros) là on y va pas parce que ca coûte cher et on nous y prendrait pour des pauvres (-cons ?). Ou alors quand on y va c’est pour admirer les riches (comme si on lisait le magasine GALA par exemple). Et l’étranger plus pauvre que nous (c’est à dire le reste de l’humanité), on y va parce que ca coûte pas cher et qu’il y a du soleil. Mais attention l’étranger est très dangereux ! Ah non, pas quand on s’inscrit pour un "voyage". On sait qu’on va dans un petit endroit aseptisé de l’"étranger" mais on verra quand même avec un peu de chance un petit bout d’"étranger" mais bien protégé derriere la vitre du bus ou en visitant une ville en groupe avec nos guides. Frisson à risque zéro garanti. Combien penseront que ce sont des "gens" et pas des étrangers qu’ils voient derriere la vitre, des gosses qui jouent, des mamans qui font leur marché, des pères qui rentrent du travail ? Et que s’ils n’ont pas de téléHD ni de voiture c’est parce qu’on est dans les tiers monde et que le tiers monde n’est pas (encore) matérialiste comme nous. Que tous ces gens là ont les mêmes petits bonheurs et malheurs que nous, sauf que chez eux les risques existent, ben oui y a pas la sécu ni la retraite. Mais nos grands parents (arrieres pour certains) ne les avaient pas non plus. Et leur monde était il plus mauvais que le notre... pas sûr.

            On nous fait croire que nous sommes bien au chaud derriere notre barriere occidentale, un peu comme Israel derriere les remparts en beton qui la protège des gazzaoui. Chez nous le bonheur insipide tarifé de l’autre cotè la misère (mange ta soupe, pense aux petits enfants du tiers monde qui n’ont rien à manger). Ils serait temps de balancer quelques Scuds dans la barriere et de s’apercevoir que nous sommes tous des étrangers !

             

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