Lancé en mars dernier, cet appel d’offres vise prioritairement les Big Four du conseil, (Altédia, Ingeus, BPI, Adecco), des cabinets chers à Laurent Wauquiez.
Un marché qui écarte de facto la myriade de cabinets de petite taille, non moins compétents, mais trop atomisés pour faire face à l’importance d’une telle commande.
Ce marché de l’accompagnement se compose en deux lots, déclinés par bassin d’emploi.
Le premier vise à reclasser 150.000 licenciés économiques et notamment, les bénéficiaires de la convention de reclassement personnalisé. Le second (environ 170.000 D.E), concerne les personnes présentées comme « susceptibles de sombrer dans le chômage de longue durée ».
Alors même qu’aucune évaluation sérieuse ne soit venue étayer l’utilité de recourir à ces gros cabinets, hier encore privilégiés par l’UNEDIC, Pôle emploi va lâcher près de 2.200€ par accompagnement.
De l’aveu même de Christian Charpy, présent ce matin au micro de la station RMC pour répondre aux auditeurs du jour, il y avait urgence.
Des auditeurs très remontés, on s’en doute…..
En effet, pour le patron de Pôle emploi, il fallait bien faire quelque chose pour désengorger la machine, d’autant que Pôle emploi redoute la nouvelle cohorte qui ne manquera pas de faire valoir ses droits dès la rentrée de septembre.
Une vague qui concernera, comme chaque année, les jeunes sortis du système scolaire et les fins de contrats saisonniers.
Raison de plus pour mettre les bouchées doubles et remettre dans le circuit ces gros cabinets, toujours prêts pour ce genre de pari gagnant, pour eux-mêmes surtout.
En attendant la décision d’attribution du gros lot, la fusion ANPE/Unedic aura permis au moins ceci de positif pour les finances de l’agence : faire chuter les prix de moitié.
En effet, face à la fronde des syndicats, les cabinets avaient de facto anticipé un possible recul des prix, lors de la réponse à l’appel d’offre en question.
De quoi s’agit-il ?
Globalement, il s’agit de prendre en charge les catégories de chômeurs qui coûtent le plus au régime d’assurance chômage et notamment les licenciés économiques de fraîche date. Le but : éviter qu’ils ne se dorent la pilule, aux frais du régime, plus que de raison. Initiative louable donc, si l’on est attaché à la bonne santé du système d’indemnisation.
Face à une dégradation de l’emploi qui devrait se poursuivre quelques trimestres encore, Pôle emploi compte aussi sur d’autres marchés passés l’été dernier et qui se poursuivent depuis.
Ces marchés sont d’une autre dimension, qui visent d’autres catégories de chômeurs et notamment, des personnes enkystés dans les minima sociaux, précaires, « déclassées », faiblement indemnisées, voir pas du tout.
Cette catégorie là ne fait pas de vagues, encore moins dans les medias, ou très ponctuellement, comme les intermittents du spectacle. Globalement, ce sont les CSP ouvriers, employés, des salariés abonnés au SMIC, des auxiliaires de vie, des femmes de ménage, des coursiers, chauffeurs livreurs, bref, des gens discrets, qui n’ont pas les moyens de se faire entendre.
Pour cette catégorie de « seconds couteaux », chômeurs de seconde zone apparemment, Pôle emploi fait aussi appel à des cabinets, contraints de se présenter en groupements, pour permettre de se positionner sur les différents lots attribués.
Or, pour ce segment de clientèle, l’agence n’offre au mieux que 400€ en moyenne, pour un service, qui n’en est pas moins réel, sinon compétitif, eu égard au royal cadeau promis aux Big Four.
Chômeurs de seconde zone, tarifs de seconde zone…et peut-être aussi – c’est un risque que prend Pôle emploi - prestations de seconde zone.
A l’heure où les bénéficiaires du RMI basculent dans le RSA, vendu comme une bonne potion , on se demande pourquoi une telle disparité de traitement entre catégories, venant d’un organisme public qui se veut au service des usagers, et qui brandit sans vergogne l’argument des droits et des devoirs.
Que l’Etat commence d’abord à assurer l’égalité des droits, il sera moins gêné ensuite pour exiger le respect des devoirs...