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Accueil du site > Tribune Libre > Culture de la soumission et société de la servitude volontaire

Culture de la soumission et société de la servitude volontaire

L’augmentation constante du taux de suicide dans nos sociétés nous pose, à tous, la question de ses origines. Face à une situation conflictuelle, nous serions devant un choix cornélien : se soumettre ou se démettre. Le suicide est l’une des formes les plus radicales de la démission. Il nous reste une troisième voie : la résistance.

Retour dans le présent

Démsision radicale chez France TelecomLa taylorisation et le fordisme ont segmenté l’entreprise soumise au principe de la division du travail en agents exécutants d’un côté et agents encadrants de l’autre. Cette vision dichotomique de l’organisation du travail n’a jamais été fondamentalement remise en cause, même si les limites entre le producteur et le dirigeant ont été rendues un peu plus floues avec le temps : intéressement, stock-options... La généralisation du contrat de salaire, alors que nos sociétés s’appuyaient avant 1940, à titre principal, sur une forme de travail non salarié, a institué la subordination. Elle a contribué à développer l’autorité artificielle (hiérarchie, argent) au détriment des formes naturelles de l’autorité (charisme, compétence).

L’institution de la soumission

Alors que le libéralisme triomphant se répandait partout dans le monde, le gouvernement Mauroy en 1982 mettait en place les lois Auroux censées renforcer les droits salariaux. Là où, en Angleterre et aux Etats-Unis, Thatcher et Reagan "libéraient" leur pays, les droits syndicaux se voyaient renforcés alors que le taux de syndicalisation continuaient à s’effondrer en France. Les affaires récentes autour des caisses de l’UIMM montrent que ce renforcement des droits s’est aussi, hélas, renforcé par la soumission de la représentation syndicale au nouvel ordre patronal de la société néo-libérale. Je me souviens de cette grande entreprise nationalisée dans laquelle tous les membres du CE (Comité d’Entreprise) allaient avec leurs familles en Autriche durant une semaine, en plein hiver, acheter les cadeaux de Noël pour les enfants des salariés avec la bénédiction des dirigeants de l’entreprise. Évidemment, cet exemple caricatural ne doit pas nous faire oublier que la majorité des militants syndicaux sont des gens qui ont le souci de l’autre.

Repus et gavés du superflu

Dans une société où nous devenons esclaves de nos pulsions, de nos désirs, de nos soifs, le déclassement généralisé par la chute du pouvoir d’achat sous la pression de l’augmentation du prix de l’énergie, des matières premières et des denrées alimentaires repose la question du sens de nos vies. Le marketing sait en jouer en mettant en exergue le superflu de façon à ce que nous ne voyions plus l’essentiel. Repus de nos téléphones mobiles, de nos écrans plats, de nos ordinateurs qui téléchargent les séries, gavés de jeux vidéos, nous en finissons par geindre quand les prix des denrées et du carburant augmentent là où d’autres crèvent de faim. Nos enfants pourront-ils comprendre la société de l’essentiel vers laquelle nous nous enfonçons à grand pas ?

L’existence sans référence

L' Aston Martin, la voiture à James Bond ! Notre intelligence se construit par référence... à nos parents, grand-parents d’abord, à nos frères et sœurs ensuite, à nos "maîtres" et à nos amis enfin. En téléportant nos enfants devant le petit écran, nous les vidons de leurs références au point où ils en viennent à refuser l’autorité des maîtres. Pour les amener à réussir, Martin Hirsch vient de proposer de rémunérer leur assiduité. Ils pourront ainsi acheter d’autres objets et se construire par référence à ces objets. Et notre liberté dans tout ça ? En enfermant les individus dans un monde où l’individuation passe par l’objet, nous en venons à objectiver l’autre en l’oubliant en tant que sujet. Nos sociétés sont devenues d’immenses usines à fabriquer du désir mimétique... et des boucs émissaires, sans référence à l’histoire et la mémoire. Et arrêtons de croire qu’il y ait de l’intelligence à "aimer" une voiture !

Crédit photos : Ariase, BBC


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10 réactions à cet article    


  • Julius Julius 19 octobre 2009 11:15

    > L’augmentation constante du taux de suicide dans nos sociétés ...

    Déjà la première phrase n’est pas vrai. Le taux de suicide en France est en diminution constante depuis 1993 : http://hrivnac.free.fr/wordpress/?p=1567


    • Le péripate Le péripate 19 octobre 2009 11:30

      C’est un élu.... alors, la vérité, aucun intérêt.


    • Gorg Gorg 19 octobre 2009 13:17

      @L’auteur
      Excellent article, mais il est vrai qu’il va faire grincer les dents aux crétins .....ou à ceux qui profitent de ce système.


      • Denis Szalkowski Denis Szalkowski 19 octobre 2009 13:19

        Ne réduisons pas le problème à la France. On peut aussi évoquer le Japon. Je faisais référence au monde « occidental ». Merci de ce commentaire.


        • PtitLudo PtitLudo 19 octobre 2009 15:32

          L’objectif est la dépossession des individus de leur poste de travail, ceci a été engagé depuis de nombreuses années car du point de vue des directions, les sachants avaient acquis trop de pouvoir.

          En effet comment refuser une augmentation à quelqu’un qui a le pouvoir sur le bon fonctionnement de l’entreprise.

          Il a donc fallu agir insidieusement pour progressivement déposséder ces individus de leur pouvoir devenu trop important aux yeux des dirigeants.

          C’est alors que les cabinets de consultants ont eu leurs heures de gloire, sous de multiples pretextes plus fumeux les uns que les autres, ils ont eu pour objectif de segmenter les activités de l’entreprises en des unités atomiques les plus petites possibles, et de confier chacune de ces unités à des personnes différentes.

          La contrepartie de cette révolution a été que tous ces « petits boulots » étant particulièrement inintéressants, abrutissants et répétitifs, et donc que la démotivation grandit de façon exponentielle.

          Pour exemple, comparer l’intérêt de concevoir, construire une voiture de A à Z, et la voir fonctionner, à l’intérêt de visser la roue arrière gauche sur 1000 voitures dans une journée (pas très bon exemple certes car celà est désormais automatisé).

          Il a donc fallu en parallèle développer de nouvelles formes de management à base d’objectifs, de pression individuelle, de mise en concurrence interne pour faire fonctionner ce système.

          En effet, alors que l’ancien système fonctionnait correctement de lui-même, les individus étant motivés par leur travail, le nouveau ne peut que se scléroser très vite : Consignes farfelues, parfois contradictoires venues d’en haut, tâches inintéressantes et répétitives, surcharge administrative, aucune responsabilité individuelle, ...

          Il y a effectivement ensuite 3 attitudes possibles vis-à-vis de cet état de fait :
          - l’acceptation bête (c’est à dire éviter de réflechir au maximum à ce qu’on est en train de faire) qui revient à la soumission, dont beaucoup s’accomodent mais qui peuvent rapidement basculer dans la 2ème catégorie. C’est de mon expérience dans cette catégorie que l’on retrouve le plus de gens.
          - la tentative de compréhension des objectifs de son travail, et essayer d’en tirer une satisfaction personnelle, c’est à mon avis cette catégorie d’individus qui en arrivent aux pires extrémités.
          - la résistance dans la mesure du possible, ce qui est hélas très rare et pas toujours possible, le contexte de crise n’aidant pas le soutient de cette posture dans de nombreuses entreprises

          Bien sûr il y a aussi la possibilité de démission, mais qui est une fausse solution, car pire que la 3ème solution. Tant qu’à faire, autant essayer de résister si c’est pour aboutir au même résultat, au moins l’honneur sera sauf, sinon c’est l’employeur qui gagne.

          Voilà c’était une petite réflexion personnelle sur le sujet, peut-être me suis-je un peu écarté du sujet central, mais à mon avis beaucoup de choses partent de là (combiné avec la pression consommatrice dont nous sommes la cible permanente, vous parlez également dans votre article).


          • Gorg Gorg 19 octobre 2009 19:04

            Excellente analyse, tout à fait de votre avis.


          • Denis Szalkowski Denis Szalkowski 19 octobre 2009 20:29

            Je crois que c’est comme cela qu’il faut voir la mise en place des systèmes « qualité ». Très juste.


          • herbe herbe 19 octobre 2009 20:32

            Cher auteur,

            J’ai bu comme du petit lait cet article, mais pour moi qui suit déjà acquis ça ne sert pas à grand chose sauf peut-être à compter les rangs dans une même communauté de pensée.

            Ce qui m’afflige profondément c’est de voir au travers de certains commentaires ( pas difficile à trouver malgré des chiffres et des évidences déjà donnés sur d’autre fils) que certains sont figés dans leur aveuglement et leur surdité et propagent des idées qui sont à l’origine de tant dégâts ...

            Certains continuent à défendre l’impitoyable et piteuse idéologie de la croissance matérielle et de l’avoir aux dépends de celle de l’essence (tiel), de l’être. Nous avons plus que jamais à inverser les priorités.

            Rappel en ce qui concerne les chiffre pour france telecom un autre commentateur léon a déjà parlé de saloperie intellectuelle !!! :

            http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/a-propos-des-suicides-a-france-63294#forum2271330


            • Roger Martinovsky 22 octobre 2009 14:23

              je pense que vous avez rien compris , il serait temps de vous reveiller mes petits......

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