Dailymotion vaut-il réellement 400 millions de dollars ?
Peut-on réellement prétendre à une valorisation délirante au regard du chiffre d’affaires lorsque l’essentiel de ce que l’on propose est illégal ? Le Web 2.0 est-il nécessairement hors la loi ?
A la lecture du dernier numéro de Challenges qui classe les plus grosses fortunes de France, les créateurs de Dailymotion sont interviewés et évoquent avec un brin d’assurance le fait qu’on leur a proposé près de 350 millions de dollars pour racheter leur société et qu’ils ont refusé, préférant faire monter les enchères. J’imagine qu’ils lorgnent sur le "milliard et plus" que les actionnaires de YouTube ont décroché auprès de Google (1,35 pour être précis après que TF1 s’était fait éconduire malgré une offre à 800 millions de dollars cash). Très franchement, c’est tout le bien que je leur souhaite et je serais heureux pour eux qu’ils décrochent ce jackpot historique dans l’épopée du web français.
Mais à voir la vague de procès qui a débuté tant aux Etats-Unis qu’en France, je reste très dubitatif quant aux chances de succès de cette entreprise. Une entreprise sans chiffre d’affaires et dont le "fond de commerce" est composé de vidéos copyrightées en immense majorité ne m’apparaît plus avoir une valorisation aussi délirante.
Aujourd’hui, ils ont été condamnés pour contrefaçon à l’initiative de la société UGC, de la production et de l’auteur pour avoir créé les conditions de la mise en ligne du film Joyeux Noël. Les dirigeants de Dailymotion envisagent de faire appel de cette décision et font comme si de rien n’était. Ils promettent de veiller à protéger désormais le contenu de ce qui est mis en ligne. Tout le monde a l’air de croire à l’épiphénomène.
Imaginez deux secondes un Dailymotion ou un YouTube sans le clip de votre chanteur préféré, la réplique culte, le reportage qui tue, j’en passe et des meilleurs, et vous obtiendrez un site insipide et sans beaucoup de saveur. Ce ne sont pas malheureusement les talents du net qui vont provoquer l’afflux de millions de visiteurs par mois (et je le regrette). Le Web 2.0, c’est un modèle influencé par des usages qui sont d’une gourmandise excessive et qui se moquent de la légalité. Les gens loupent un passage de Florence Foresti, une prestation de la Nouvelle Star, un scopitone des années 60, ils ont acquis le réflexe d’aller le rechercher sur ces sites, au mépris de la notion même d’ayant-droit. Et là, je n’envisage que le droit de propriété intellectuelle, je ne fais même pas référence au droit à l’image de chaque individu.
Les internautes sont schizophrènes au dernier degré. Ils font un scandale contre la DADVSI mais en même temps consomment à l’excès des sites ayant pignon sur toile dont le principal facteur de valorisation réside dans leur capacité intrinsèque à violer la propriété intellectuelle.
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