Dérives psychiatriques
DSM en question
C'est cet aspect clinique, ne nécessitant pas que des moyens matériels et des thérapeutiques biochimiques, qui continue à s'imposer dans l'institution, qui n'arrête pas d'être en crise.
Un certain nombre de spécialistes, surtout français, ne pouvant se résoudre à réduire leur fonction à la distribution de molécules chimiques et au suivi purement technique voire technocratique, s'opposent à des réformes qui, depuis un certain nombre d'années, visent surtout le sécuritaire.
Même quelques rapports officiels font état de la grande misère dans laquelle la psychiatrie se trouve aujourd'hui.
Ils insistent sur le fait que la discipline et sa pratique demandent à être repensées.
Les dérives du nouveau DSM, la bible venue d'Outre-Atlantique sont patentes. Elles débouchent sur des classifications et donc des diagnostics parfois aberrants et sur des surprescriptions parfois dangereuses (comme ici en médecine classique), pour le plus grand bonheur des firmes pharmaceutiques. [ le DSM-IV, recense 297 pathologies, classées par grandes catégories. C'est cette classification qui fait référence pour les recherches sur les pathologies mentales, qu'il s'agisse d'études épidémiologiques ou de celles menées par les laboratoires pour évaluer leurs molécules (antidépresseurs, anxiolytiques ou autres neuroleptiques. ]
La surmédicalisation et la marchandisation de la maladie en général deviennent des problèmes qui n'affectent pas seulement les pratiques psychiatriques.
Ensuite, chaque psychiatre a tendance à pousser sa spécialité ou son sujet de prédilection et à vouloir élargir le filet des patients potentiellement concernés. Enfin, ils ne réfléchissent pas du tout aux conséquences d’une inflation des diagnostics pour la société et les patients eux-mêmes..."
Il dénonce le business qu'a constitué la vente spectaculaire du manuel et signale qu'"il faut faire très attention quand on pose un diagnostic, surtout sur un sujet jeune. Parce que, même s’il est faux ou abusif, ce jugement risque de rester attaché à la personne toute sa vie. Le diagnostic va changer à la fois la manière dont l’individu se voit et la manière dont les autres le voient. Or, même si les experts du « DSM-5 » peuvent avoir parfois raison dans leur façon de modifier telle ou telle catégorie diagnostique, et si chacun d’eux peut avoir la compétence nécessaire pour l’appliquer de manière pertinente à ses patients, il n’en va pas de même des médecins généralistes qui, aux États-Unis comme en France, prescrivent 80% des psychotropes.
Ils ne sont pas formés à la psychiatrie et sont particulièrement sensibles au marketing des laboratoires. Et pour ces derniers, comme je l’ai dit, toute modification de diagnostic est une aubaine, parce qu’elle permet de proposer de nouveaux médicaments ou de nouveaux usages pour des médicaments anciens. Ce qui accroît le coût pour la collectivité et les risques d’effets secondaires. [ Lire « À qui profitent les psychotropes ? »]...
... Les données épidémiologiques sont structurellement gonflées. Sur le terrain, les enquêteurs ne sont pas en mesure d’évaluer si un symptôme est complètement présent ou non. Si bien que les chiffres intègrent beaucoup de cas non significatifs. Par ailleurs, c’est l’intérêt des grandes institutions publiques de recherche, comme les NIH (National Institutes of Health) aux États-Unis, de se référer à des données surévaluées. Cela leur permet de décrocher davantage de crédits. Les compagnies pharmaceutiques, elles, tirent argument des taux élevés pour dire que beaucoup de malades ne sont pas identifiés et qu’il faut élargir le marché.
Le « DSM » a moins d’impact en France qu’aux États-Unis, puisque chez nous le remboursement des frais médicaux n’est pas directement lié au diagnostic. Quel est le meilleur système ?
Le système américain est très contraignant, car le psychiatre ou le généraliste est obligé, si le patient veut faire jouer l’assurance, de poser un diagnostic dès la première visite. Une visite qui, chez le généraliste, est de sept minutes en moyenne (4) ! C’est une source d’erreurs, et d’inflation des diagnostics et des dépenses de santé. En France, il n’y a pas d’obligation de faire un diagnostic mais, du coup, de nombreux traitements sont engagés sans examen sérieux, et cela n’empêche pas l’explosion des dépenses de santé..."
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* DSM-5, le manuel qui rend fou_
- De stop DSM a post DSM
- Sommes-nous tous des malades mentaux ?
- "On assiste à une médicalisation de l'existence"
- Petit tour du monde du normal et du pathologique
- Relativité du normal et du pathologique
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