Dérives sectaires - Rapport 2010 de la MIVILUDES
La MIVILUDES vient de remettre son rapport 2010 au Premier Ministre (http://www.miviludes.gouv.fr).
Rappelons que la MIVILUDES est la Mission Interministérielle de Vigilance et de Lutte contre les Dérives Sectaires (création en 2002).
Par l’article 1 de la loi de 1905, la République Française assure la liberté de conscience et, en conséquence, garantit le libre exercice des cultes.
Dans ce cadre, le législateur s’est toujours refusé à définir tant les religions que les sectes : la nuance entre les deux est donc tout à fait relative.
Toutefois, des critères ont été retenus pour appréhender et caractériser les dérives :
- la déstabilisation mentale
- le caractère exorbitant des exigences financières
- la rupture avec l’environnement d’origine
- l’existence d’atteintes à l’intégrité physique
- l’embrigadement des enfants, le discours antisocial, les troubles à l’ordre public
- l’importance des démêlés judiciaires
- l’éventuel détournement des circuits économiques traditionnels
- les tentatives d’infiltration des pouvoirs publics
Par ailleurs, le site de la MIVILUDES indique également comment déceler une influence sectaire dans le comportement d’un proche :
- l’adoption d’un langage propre au groupe
- la modification des habitudes alimentaires
- le refus de soins
- une situation de rupture avec la famille ou le milieu social
- un engagement exclusif pour le groupe
- une soumission absolue, un dévouement total aux dirigeants
- la perte d’esprit critique et la réponse à toutes les interrogations existentielles
A la lecture des critères de dérive et des indices d’influence sur un proche, on se rend compte que les religions qui ont « pignon sur rue » pourraient facilement être dans le « collimateur » de la MIVILUDES : tout est question d’interprétation…
Pour en revenir au rapport 2010, ce dernier est composé de quatre parties :
- La résurgence de discours apocalyptiques à l’approche de 2012
- Les contributions du secrétariat permanent
- Les contributions des ministères
- Le rapport d’activité
Ce rapport est une source d’informations intéressantes et ce, même s’il convient de relativiser certaines prises de position quand on se réfère aux éventuels conflits d’intérêt que connaissent la MIVILUDES et son Président.
Une phrase interpelle toutefois le lecteur à la page 134 : « En ce début du troisième millénaire, l’irrationnel attire de plus en plus ».
Certes, cette phrase est citée dans le contexte du chapitre concernant « La dérive sectaire dans le domaine de la santé : l’exemple du cancer » mais il n’empêche qu’elle pourrait être généralisée à l’ensemble du fonctionnement de la société.
Pourquoi cette régression à notre époque ?
Plusieurs explications viennent à l’esprit pour expliquer cette situation.
Tout d’abord, nous avons une raison « structurelle » : les interrogations et peurs ataviques concernant notre destin.
Les autres raisons sont beaucoup plus conjoncturelles et, sans que la liste soit exhaustive, on peut citer :
- L’angoisse liée à la précarisation croissante, conséquence de la mondialisation financière qui broie les individus dans sa recherche effrénée de profits
- L’absence de sens dans nos sociétés livrées au « consumérisme » et à l’argent-roi dans un contexte où règnent, comme valeurs cardinales, l’apparence et la superficialité
- L’idéologie multiculturelle relativiste, fruit de la mondialisation migratoire, qui en mettant à égalité toutes les cultures et croyances, démultiplie considérablement le « marché » de l’offre
- L’influence de l’école qui, privilégiant le « vivre ensemble » aux dépens de la transmission des savoirs rationnels, entretient la faiblesse d’esprit au lieu de développer le sens critique
- L’attitude des pouvoirs publics qui flattent et financent de plus en plus allègrement certaines religions (qui comme on le voit au début du texte pourraient facilement être assimilées à des sectes) ; deux exemples pour illustrer le propos :
o Le premier fondamentalement important car valorisant la place des idéologies irrationnelles dans la société : les discours officiels du Président de la République
o Le second anecdotique mais symboliquement important car valorisant un interdit irrationnel par excellence : les menus sans porc dans les cantines scolaires (alors que plus de 75 % de la population mondiale consomment cette viande sans aucun problème sanitaire et s’en portent très bien)
La raison « structurelle » est et sera toujours présente mais semblait moins prégnante dans les décennies précédentes ; les raisons conjoncturelles sont probablement à la source de l’amplification actuelle du phénomène religieux et sectaire.
Et bien que provenant d’un homme d’église réputé en son temps pour son traditionalisme, nos dirigeants de tout poil feraient donc bien de méditer le sens universel de cette citation de Bossuet : « Dieu rit des hommes qui déplorent les conséquences dont ils chérissent les causes ».
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